Librinova - Septembre 2024
Tags : Comédie Arnaque Truand Marseille Années 2020 Populaire Moins de 250 pages
Publié le : 20 décembre 2024
À Marseille, Marcel Dumas sort de prison. Truand à la mine de patron de bistrot campagnard, il réclame au gardien, du haut de son mètre soixante tout en rondeur, qu’on lui rende son riot-gun et ses cartouches avec le reste de ses effets personnels avant de bien vouloir franchir les portes. Derrière lui, son inséparable pote Arthur Castagniccia, trente centimètres de plus et vingt kilos de moins.
Ces deux-là viennent de passer les neuf dernières années au placard pour braquage alors que leur complice, Old Jack, s’en est tiré indemne et, accessoirement, avec la caisse, après avoir descendu le directeur de la banque et blessé sérieusement dans sa fuite le lieutenant Germain Belhomme, devenu depuis très rancunier…
C’est du polar à l’ancienne que nous propose Tito Topin avec toute sa gouaille et sa verve intactes. Une histoire de truands du côté de Marseille et sous le soleil de la Méditerranée. Une parenthèse nostalgique qui sent les dialogues à la Audiard ou Simonin, les images à la Lautner ou Verneuil, les mimiques à la Blier ou Ventura. Pas étonnant si l’on précise qu’Arrivederci, Trésor ! a dans un premier temps constitué le scénario d’un film qui n’a jamais vu le jour.
Tito Topin n’est pas un perdreau de l’année. Lui, l’inventeur de Navarro, le grand ami de Jean Yanne qui a fait le bonheur de la Série Noire dans les années quatre-vingt, l’auteur du magistral 55 de Fièvre, adoptant un ton beaucoup plus sombre lors de son passage chez Rivages au début des années deux mille, nous revient auréolé de ses quatre-vingt-dix printemps et en pleine forme.
Il semble que les éditeurs n’aient plus le goût pour ce genre d’histoires puisque c’est chez Librinova que paraît ce court roman. À moins que Tito Topin n’ait choisi délibérément de n’en faire qu’à sa tête et d’autopublier comme bon lui semble cette aventure réjouissante. Je n’en sais foutre rien, et au fond, ça n’est pas si important.
Pour Marcel et Arthur, la situation est simple. Après avoir cru que le bon vieux Old Jack les attendait patiemment avec leur part du butin, ils doivent se rendre à l’évidence : ils se sont fait enfler. Ils partent à la recherche de leur complice envolé, mais ne sont pas vraiment outillés pour et décident, d’un commun accord, de recourir aux services d’un professionnel. Et quoi de mieux qu’un détective privé pour retrouver un truand ?
En bons dindons de la farce, nos deux truands de pacotille se feront avoir jusqu’au trognon et les femmes qu’ils croiseront sur leur route leur seront forcément fatales. Restera l’amitié, infaillible.
Arrivederci, Trésor ! se lit d’une traite, comme une tranche de légèreté, une douce rigolade qui vous caresse les zygomatiques. Tito Topin n’a pas perdu son talent pour les comédies policières et nous le prouve avec simplicité et un sens aigu de la formule et du dialogue :
Il avait une voix conforme à l’idée qu’on se fait de la voix d’un homme accoutumé à l’autorité, une voix de clairon sans le moindre trémolo, une voix à hisser le drapeau.
Bien sûr son roman ne révolutionnera pas le genre et paraîtra sans doute un peu « daté » à certains, mais ce serait dommage de ne pas s’offrir ce petit plaisir régressif pour une paire d’heures.
— Tu connais un copain qui a touché des pots-de-vin ? Cite-moi un dealer, un braqueur, un voleur, même un tueur qu’a touché des pots-de-vin. Aucun. Cherche autant que tu peux, tu trouveras pas un criminel qu’a touché un pot-de-vin. Il y a que les politiques qu’en touchent et tu vas pas me faire croire que les politiques, c’est des criminels ? Parce que moi, en neuf ans de taule moins deux jours, j’en n’ai pas vu un seul.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Chez Tito Topin, on a le choix de l’embarras… N’hésitez pas à vous replonger dans ses premiers polars, vous y trouverez un ton qui n’existe plus guère aujourd’hui.
Les dix premières lignes...
Ça puait grave, ils en avaient plein les naseaux, relents de peaux mal rincées, de slips sales, de laine humide, de tabac froid, de flatulences, de pieds, de moisi, de merde et de cantine. Merde et cantine, un pléonasme pour tous ceux qui ont fréquenté l’endroit. Près de trois mille l’année dernière dont une bonne moitié d’origine étrangère.
— Tout est là, grommela le greffier en posant un tiroir ouvert sur le comptoir, un plateau de bois tellement usé qu’il avait l’air d’avoir été piqué au radeau de la Méduse.
C’était un quinquagénaire qui comptait vingt ans et quelques de boîte au compteur sans avoir changé son uniforme malgré les quarante kilos de surcharge pondérale qu’il avait accumulé pendant ce temps en se tapant régulièrement double ration de polenta midi et soir. Sa peau rugueuse et crevassée, sa bouche sans lèvres, ses yeux mouillés, ses touffes de cheveux roux, tout son physique était en contradiction avec une voix fluette de petite fille impubère.
Quatrième de couverture...
— Pour me consoler, je dirais qu’il est mort de sa belle mort, déclara Marcel en embrassant Jack sur la bouche à la manière maffieuse, tel qu’il avait pu l’observer dans les films de Coppola. Mais pourquoi on l’a déguisé comme ça ? Le pauvre, on dirait qu’on l’a trempé dans du blanc d’œuf.
— Le blanc est la couleur du deuil dans certaines civilisations, expliqua Arthur qui avait vu une émission de Thalassa sur le sujet, un truc qui se passait, il ne savait plus où, mais loin.
— Oui, mais lui, il l’était pas, civilisé.
— Il l’était devenu.
— C’est comme sa julotte, elle aussi elle est toute en blanc d’œuf. Il désignait la veuve de Jack, occupée à recevoir les condoléances d’un vieil homme en babouches et pyjama, chauve, myope et barbichu, visiblement éprouvé par le chagrin.
— Pas sa julotte, ce n’est pas respectueux, Marcel. Dis plutôt, sa veuve.
— Si tu veux, mais la vache, le morceau qu’il se payait…
— Chì bellu culu ch’ella hà…
— Voilà que tu baragouines en corse. Qu’est-ce que ça veut dire ?
— Ça veut dire qu’il devait avoir un gros budget de Viagra.
Sa trombine... et sa bio en lien...
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