Les Vrais Durs Meurent Aussi

Maurice Gouiran

Jigal Polar - Octobre 2008

Tags :  Roman d'enquête Roman historique Polar social Détective amateur Marseille Années 2000 Populaire Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 26 novembre 2008

La presse locale l'annonce par rafales successives : les anciens légionnaires ne sont pas à la fête du côté du Marseille. Déjà trois cadavres ont été retrouvés, trois vieillards égorgés de ce "fameux" sourire kabyle.
C'est Biscottin qui rapporte la nouvelle à Clovis Narigou. Il est d'autant plus inquiet qu'il n'a plus de nouvelles depuis dix jours d'un vieil ami, un collègue de bistrot qui se fait appeler le Pollack et qui lui a confié en dépôt une vieille boîte de souvenirs personnels tout en lui confiant craindre pour sa vie. La Pollack est lui aussi un ancien légionnaire.
Après un quatrième assassinat, un homme de quarante-cinq ans est arrêté. Mourad Boualem avoue les crimes, et même deux supplémentaires commis dans une autre région ; il affirme avoir agi par vengeance personnelle…

Maurice Gouiran a un cheval de bataille : faire entrer l'Histoire (avec un grand H) dans l'histoire — à moins que ça ne soit l'inverse — et il s'y atèle une nouvelle fois dans ce roman. C'est la légion étrangère qui est au départ au cœur de son récit, la légion et sa participation active à la guerre d'Algérie. Mourad Boualem est né du viol répété d'une Algérienne par un commando de légionnaires français et Clovis découvre peu à peu son histoire.
Si la thèse officielle reconnaît peu à peu la pratique de la torture, dans les deux camps, cherchant à la justifier d'une manière ou d'une autre, elle réfute la pratique du viol, niée et considérée comme indigne. C'est en partie pourquoi la police, comme la justice, cherchent à enterrer cette affaire et à ne pas relancer ce débat houleux. Mourad Boualem se suicide dans sa cellule, et Maurice Gouiran n'oublie pas de rappeler que le viol est aussi une coutume guerrière :

Vingt mille femmes violées en Bosnie-Herzegovine en 1992, quinze mille au Rwanda en 1994, cinquante mille filles capturées par les forces gouvernemantales au Soudan afin de servir d'esclaves sexuelles, des dizaines de millier de viols au Congo entre 1994 et 2003…
Et tout cela se fait en toute impunité.
Outre le fait qu'il apparaît comme une récompense pour le vainqueur, le viol de guerre est devenu une redoutable arme d'humiliation massive des femmes et des peuples, une arme d'autant plus perverse que ceux qui en sont victimes la ramènent rarement.

Et le Pollack dans tout ça ?... Toujours introuvable… et c'est là que l'histoire se complique dans des prolongements inattendus. Car si Mourad est mort, la menace pèse toujours, et Biscottin est en première ligne. Vous connaissez le poids l'amitié pour Clovis, vous imaginez donc ce qui en résulte. Il faut juste préciser que la belle Alexandra a rejoint Clovis pour l'été et qu'il se retrouve un peu coincé aux entournure…

Avant la guerre d'Algérie, il y a eu l'Indochine, et avant encore la fin de la seconde guerre mondiale. Autant d'événement qu'on présente comme séparés, mais qui s'inscrivent, de fait, dans une continuité temporelle.
Si on connaît les rapatriés d'Algérie, les harkis, et le sort qui leur a été réservé par la politique française, qui a entendu parler des réfugiés d'Indochine ? Maurice Gouiran construit une intrigue qui lui permet de mettre en lumière des rapatriés au nombre de mille deux cents, rassemblés dans un camp dans le Lot, et oubliés là comme symboles d'une défaite :

C'est bien tout le problème d'une France victorieuse dix ans auparavant qui a dû accueillir un certain nombre de ses ressortissants boutés hors de ses colonies, un troupeau exotique et égaré, matérialisant l'échec de la grande nation, la fin de l'Empire. En plus, c'étaient des Annamites qu'il fallait à tout prix dissimuler afin d'oublier au plus vite cette débâcle indochinoise qui prenait trop concrètement l'image de ces visages aux yeux bridés.

La "petite" histoire dans la "grande"…
Beaucoup de légionnaires de l'Indochine partiront en Algérie. Certains auront aussi vécu la seconde guerre mondiale. Forcément, dix ans, c'est vite passé. Et Maurice Gouiran, tissant des liens entre ces conflits, nous entraîne jusqu'à la recherche du trésor de guerre des nazis.
Construite à partir d'éléments bien réels, l'intrigue de Maurice Gouiran tient la distance, mais il se fait dans cet épisode plus interrogatif que vindicatif. On l'a connu plus "hargneux" et l'on pouvait s'attendre de sa part à plus de "piquant" envers tous ces militaires. Restent bon nombre de questions habilement posées, et un Clovis Narigou plutôt angoissé par ses affaires de cœur.
On l'a connu, lui aussi, plus vaillant…


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Les Faussaires - Stefan RuzowitzkyMaurice Gouiran évoque au cours de son récit le film de Stefan Ruzowitzky, Les Faussaires, qui retrace en détail cette entreprise de déstabilisation des économies anglaises et américaines à grand renfort de fausses monnaies durant la seconde guerre mondiale.

Quant à Clovis Narigou, s'il vous a séduit, sachez qu'il traverse l'œuvre de Maurice Gouiran de part en part et qu'il vous sera difficile de ne pas le croiser à nouveau.

Le début...

Les dix premières lignes...

Lundi 6 août, l'Estaque
— Oh ! Clo, tu me fais ça bien, hé ! Tu déconnes pas. Fais voir un peu…
L'ancêtre est méfiant comme c'est pas possible. Je sens qu'il jette un œil inquisiteur, par-dessus mon épaule, sur le mortier de marbre de Carrare, avant d'égrener son chapelet :
— Le gros sel… Voueille… Le poivre moulu… Voueille… L'ail… Voueille…
J'ai horreur qu'on se pointe dans mon dos pour épier ce que je fais. Je me retourne brusquement.
— Dis, Biscottin, tu m'invites, je me braque une partie de la bouffe et toi, tu trouves à redire ?
— Non, c'est pas ça, mais j'aime bien que les choses elles soient faites dans les règles de l'art.
— Je les connais les règles de l'art ! Tu me les as répétées cent fois chez Léon !
Il hausse les épaules :
— On sait jamais… Et pas d'œufs, hé… Te ne mets surtout pas d'œufs dans la rouille (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

Qu’un légionnaire assassiné nous entraîne dans les méandres de la guerre d’Algérie… passe encore ! Mais quand deux, trois puis quatre de ces mercenaires à la retraite sont retrouvés égorgés, difficile d’imaginer que d’autres guerres plus anciennes, l’Indochine ou la 2e guerre mondiale, puissent en être la cause ! Et pourtant…
Des faubourgs d’Alger au trésor des nazis, du delta du Mékong aux lacs autrichiens, de New York au camp des oubliés, Clovis, égal à lui-même, va parcourir le monde et relire l’Histoire afin de démêler ce sac de nœuds aux racines obscures !
Mais quel est donc le lien entre les piliers du Beau Bar, ces virils baroudeurs et la Madone de Botticelli ?


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Maurice Gouiran










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Bibliographie non exhaustive... Seuls sont indiqués ici les ouvrages chroniqués sur le site.

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