Jigal Polar - Mars 2005
Tags : Roman d'enquête Crime organisé Corruption Détective amateur Journaliste Marseille Années 2000 Entre 250 et 400 pages
Publié le : 1er mai 2005
Clo, aidé de son voisin Milou, vaque à ses occupations de berger jardinier lorsque débarque à scooter une jeune fille qui se jette dans ses bras en pleurant toutes les larmes de son corps. Interloqué, il ne reconnaît pas tout de suite la donzelle mais finit tout de même par l'identifier comme la vague assistante de deux jeunes apprentis journalistes venus le rencontrer quelques temps auparavant à propos d'un projet de reportage sur la French Connection.
En fait, Neïla, c'est son nom, cherche un refuge car ses deux amis cinéastes, Albin et Assad, se sont fait selon elle buter alors qu'ils poursuivaient leurs investigations auprès d'un ex-truand rangés des voitures : un certain Toussaint Popolasca. Clo contacte son ami flic, Raf, qui fait le tour des popotes, mais rien n'est semble-t-il arrivé jusqu'aux oreilles de la maison poulaga. Neïla a l'air sincère, vraiment terrorisée, et puis elle lui raconte son histoire : petite fille marocaine du Rif, "vendue" par son père à une cousine famille de diplomates installés à Marseille et d'où, devenue une véritable esclave des temps modernes, sans papiers, battue par la mère, abusée par le père, voire même violée, elle finira par s'enfuir sans que ses patrons ne soient jamais inquiétés. Elle a fini dans la rue, à la merci de mecs qui n'en voulaient qu'à son jeune cul, puis a retrouvé un semblant de sécurité auprès d'Albin et Assad, un ménage à trois, une nouvelle famille.
Alors Clo recueille Neïla et commence à chercher, à se renseigner sur ce fameux Popolasca. De fil en aiguille, il découvrira que ce truand repenti pourrait bien être lié à l'assassinat le plus médiatisé du vingtième siècle, celui du président Kennedy, le 22 novembre 1963 à Dallas.
Maurice Gouiran est un fin documentaliste, mais c'est aussi un faiseur d'histoires et à partir d'une thèse développée autour de l'assassinat de Kennedy, qui aurait été réalisé par des tueurs issus du milieu marseillais, il mêle l'Histoire majuscule des années 40/60 à l'histoire "minuscule" d'une petite marocaine maltraitée par la vie. Mais c'est aussi d'une plongée dans les arcanes marseillaises qu'il s'agit et Maurice Gouiran nous détaille par le menu le film des accointances malodorantes qui sévirent dans cette ville au sortir de la deuxième guerre mondiale entre les milieux mafieux et politiques. On y découvre l'ascension fulgurante de la famille Guerini, comment les communistes furent "trahis" par un certain Gaston Deferre, comment fut organisée la main mise sur la ville. C'est aussi un long détour par les mystères qui entourent l'assassinat du président des États-Unis, les virements et revirements des versions officielles. Dallas est également l'occasion d'un réquisitoire sans appel contre les couloirs de la mort de la prison de Polunsky, décrits en détail, comme est disséqué le fonctionnement de la justice américaine, son rapport permanent à l'argent, et qui emprisonne à tout va "des nègres, des pauvres, des latinos, des illettrés. Des mecs inutiles et gênants" qui contribuent directement à la réélection des shérifs et des juges, ceux-là même qui les ont arrêtés et condamnés.
Par une écriture simple, directe et limpide, Maurice Gouiran nous entraine, en compagnie de son ex-journaliste de héros, personnage récurrent des ses romans, Clovis Narigou, à le suivre dans ses colères, ses indignations. Loin des caricatures marseillaises, un roman où s'écoule pourtant le printemps, la nature en beauté, la "pétanque", les conversations au Beau Bar en compagnie de l'Alule, le Furoncle, Biscottin, l'Anchois, l'Endive... et le pastis. Mais pour finir "les mots viennent tout seul frapper le papier lorsqu'on écrit avec la rage".
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Clovis Narigou est au centre des romans de Maurice Gouiran. Celui-ci étant son huitième, un petit tour du coté des éditions Jigal vous en apprendra plus sur les précédents.
L'auteur cite dans ce roman un lien quasiment "surréaliste" mais pourtant bien réel qui vous en apprendra plus que de longs discours sur les couloirs de la morts au Texas : celui du Texas Department of Criminal Justice. Édifiant.
Pour finir, et à propos de l'assassinat de Kennedy, vous pourrez comparer les thèses en lisant la version de James Ellroy, American Tabloïd.
Les dix premières lignes...
Mercredi 14 avril
Vous êtes-vous déjà retrouvé à six mètres de hauteur, une tronçonneuse à la main, en équilibre sur une interminable échelle calée contre le tronc d'un peuplier qui oscille au gré du vent ? J'ai connu dans une autre vie des situations plus périlleuses, mais je dois avouer que je n'en mène par large !
Le mistral a cassé une grosse branche et je joue les élagueurs équilibristes tandis qu'une voix d'outre-tombe semble monter des profondeurs de la terre et ânnone : "Cheudeu, Clo, on n'y arrivera jamais, c'est trop haut..."
En guise d'encouragement, on fait mieux... Mais Milou n'a jamais été d'un naturel très optimiste (...).
Quatrième de couverture...
En 1963, à Marseille, une époque tire à sa fin. À Dallas, le président Kennedy meurt sous des balles inconnues.
Quelque quarante ans plus tard, Clovis Narigou toujours plus enclin à se laisser nonchalamment vivre dans les collines de l'Estaque qu'à venger la veuve et l'orphelin, se voit, bien malgré lui, embarqué sur les traces des assassins de JFK. Et de la French Connection aux grèves brisées en 47 sur le port, Clovis va rouvrir un pan entier de l'Histoire de Marseille. Un passé peu glorieux et jalonné de morts violentes où se mêlent politique, hommes de l'ombre, mafia, CIA, complot, milliards de dollars, trafic de drogue et pouvoir.
Un cocktail explosif qui des années après continue à malmener truand repenti, journaliste véreux et malfrats aux dents longues...
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...