Polaroid / In8 - Mars 2013
Publié le : 24 mars 2013
Tout le monde connaît Natalie Wood (au moins de nom), qui à seize ans donna la réplique à James Dean dans La Fureur de Vivre et tint un peu plus tard l'un des rôles principaux dans West Side Story ; la star hollywoodienne par excellence des années cinquante soixante.
Chacun sait également quel tragique destin fut le sien au mois de novembre 1981 lorsqu'on retrouva son corps non loin des côtes de l'île californienne de Santa Catalina dans la baie de Los Angeles.
Déjà à l'époque, la simple noyade fut mise en doute par quelques témoignages. Malgré cela, l'enquête officielle conclut néanmoins qu'il s'agissait seulement d'un regrettable accident. Ainsi Robert Wagner, son mari, et Christopher Walken, tous deux présents sur le Splendour cette nuit là, purent-ils reprendre leurs carrières respectives ; cinématographique pour le second, plus télévisuelle pour le premier.
En 2011, Dennis Davern, capitaine du yacht familial en 1981 et donc lui aussi présent le soir de la disparition de l'actrice, revient sur son témoignage en indiquant qu'a eu lieu sur le bateau une violente altercation entre Natalie Wood et son mari et que ce dernier aurait beaucoup tardé à prévenir les secours après que fut constatée la disparition de sa femme.
L'enquête fut brièvement relancée, mais ses conclusions restèrent sensiblement les mêmes. Ni le témoignage de Marilyn Wayne qui croisait non loin cette nuit-là, ni la conviction de Lana Wood, la sœur de Natalie, n'eurent raison des juges. La mort restait accidentelle. Seules les causes de la mort devenaient indéterminées…
Ainsi sont les faits. Et c'est à partir de là que Marin Ledun intervient. Le conteur d'histoires, l'écrivain, l'homme de la fiction.
Nous sommes le 28 novembre 1981 et Robert Wagner, dont c'est le récit puisqu'il "parle" à la première personne, va nous raconter sa soirée de Thanksgiving.
Le cadre est serré, les faits têtus, mais qu'à cela ne tienne, Marin Ledun s'empare des personnages, des lieux, du contexte, du timing, et à travers la voix de Robert Wagner, nous donne sa version du mystère de la mort de Natalie Wood.
Chacun trouve sa place, y compris Dennis Davern en fidèle serviteur, et Marilyn Wayne en héritière d'un soir, mais ce sont Wagner, Wood et Walken qui sont en vedette. À travers les échanges de ces trois-là, c'est l'envers du décor du rêve américain, version grand écran, qui vole en éclats. Le gendre idéal Robert Wagner a du plomb dans l'aile avec sa carrière qui vacille, ses problèmes d'érection et ses magouilles financières ; l'ingénue Natalie Wood n'est guère mieux lotie ; quant à Christopher Walken, il se révèle une fieffée ordure arriviste et manipulatrice. Bref, le soleil ne brille pas bien haut sous le soleil de Los Angeles. Normal, me direz-vous, pour un huis clos nocturne…
En à peine quatre-vingt pages, Marin Ledun réussit à donner une version plausible de la mort de Natalie Wood et à dresser un portrait mordant de trois figures emblématiques du cinéma hollywoodien, révélant les compromissions avec les truands, les affaires de drogue. Son écriture précise et le rythme qu'il met dans son récit donnent une lecture plaisante, mais — et sans doute est-ce dû au format un peu court du livre — l'ensemble est quand même construit à grands traits et l'on sort de No More Natalie avec comme un arrière goût d'inabouti. Connaissant l'auteur, on peut penser qu'il y avait là matière à… fignolage.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Hollywwod et ses acteurs sont des sujets de choix pour les auteurs de polar. Pourquoi ne pas essayer, par exemple, Megan Abbott, et son Absente.
Les dix premières lignes...
Christopher « Ronnie » Walken en était à son quatrième whisky quand Natalie émergea enfin sur le pont. Elle portait un ensemble rouge vaporeux du plus mauvais goût qui ne dissimulait rien ou presque de son anatomie, un foulard de soie autour du cou et des sandales achetées la veille dans une de ces boutiques de luxe de Los Angeles. Des lunettes noires glissées dans ses cheveux complétaient la panoplie de la parfaite star de cinéma sur le retour. Je la pris dans mes bras et j'émis un sifflement admiratif, moins pour l'indécence parfaitement décadente de sa tenue — la femme que j'avais épousée pour la seconde fois en 1971 n'avait rien perdu de son charme — que pour gommer le sourire béat qui se dessinait à présent sur les lèvres de l'acteur. J'obtins l'inverse de l'effet escompté (…)
Quatrième de couverture...
28 novembre 1981. Le yacht de l'acteur Robert Wagner s'élance dans la baie de Los Angeles. Natalie Wood, sa femme, est à bord, ainsi que la belle gueule de Christopher Walken, et une cargaison illicite — dix kilos de cocaïne et 250.000 dollars en liquide — que Wagner devra rendre, bien entendu. Mais rien n'est simple à Hollywood et la trahison rôde.
Marin Ledun revient dur la noyade d'une icône, révélant sous son vrai jour la faune du cinéma des seventies. Frelatée, décadente et vendue. Les acteurs doivent rester des acteurs et les truands des truands, surtout dans la vraie vie où l'on ne meurt qu'une fois.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...