Le Cinquième Clandestin

Marin Ledun

La Tengo Editions - Juin 2009

Tags :  Thriller Roman d'enquête Polar social Crime organisé Discrimination Journaliste Paris Années 2000 Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 09 juin 2009

Cinquième arrondissement de Paris, rue Mouffetard. Alors que dans cette soirée finissante de juillet les touristes et noctambules s'égaillent sur les trottoirs, une jeune femme désespérée par une expulsion annoncée se jette de la fenêtre de son appartement du cinquième étage, un bébé dans les bras. Son dernier regard sera pour une autre jeune femme, à peine aperçue derrière les barreaux d'un soupirail, les mains liées d'une cordelette.

Mona Cabriole, journaliste à Parisnews et envoyée sur place par son patron pour couvrir l'événement, remarque dans la foule une jeune femme noire qui semble plus concernée que les autres badauds, mais lorsqu'elle tente d'entrer en contact, cette dernière prend la fuite. Elle apprend bientôt que la victime était elle-même d'origine africaine…

Dans la série Mona Cabriole initiée par La Tengo Editions (Paris, un personnage, vingt arrondissements, vingt auteurs, et du rock'n roll), c'est Marin Ledun qui se "charge" du cinquième. Pour qui entame la série avec cet épisode, il découvrira une Mona plutôt angoissée par sa propre solitude, ce qui tranche avec, par exemple, celle présentée dans le précédent numéro — beaucoup plus "légère" (cf. La Bourse ou la Vie, Laurence Biberfield) — au point qu'on en vienne à s'interroger sur la cohérence de sa personnalité ; la première n'ayant au fond pas grand-chose à voir avec la seconde.

Marin Ledun envoie donc une Mona solitaire dans le cinquième, arrondissement aussi étudiant que touristique où se croise dans la rue beaucoup de monde mais où se jouent, derrière les murs, de sombres drames.
Opiniâtre et désœuvrée, Mona retrace le parcours d'Hassia qui résonne étrangement en elle :

Marre des faits divers, des bas de page où l'on ne sait plus si la disparition d'un clébard est plus importante que la mort d'une jeune femme.

C'est cette insupportable indifférence face au drame qui pousse la journaliste à remonter la piste du désespoir. Hassia : Rwandaise, réfugiée politique, sans papier, d'une beauté saisissante, qui accumulait les petits boulots sans jamais accorder sa confiance à personne. Une clandestine au milieu de la foule.
Mona apprend qu'Hassia n'a jamais été enceinte. Dès lors, à qui pouvait bien être ce bébé qu'elle tenait dans ses bras ?…

Marin Ledun nous présente les circuits secrets de ceux qui profitent des immigrés clandestins en toute impunité. Ces marchands de sommeil qui opèrent au vu et au su de tout le monde, mais que personne ne veut voir.

Tout le monde ment.
Même Louis, même moi.
Secrets de famille, désirs inassouvis, rancœurs, regard envieux, petites histoires dans la petite histoire, quotidien de silences coupables.
Tout le monde se connaît et tout le monde ment.
Pour la bonne cause, par jalousie ou par envie. Parfois les trois, souvent une seule de ces raisons suffit.
Le mensonge pour ne pas avoir à regarder la vérité en face.
Pour ne pas s'avouer qu'il y a soi et les autres.

Mais ces marchands-là vont beaucoup plus loin dans l'ignominie, séquestrant, réduisant les filles au statut de prostituées, organisant des trafics aux conséquences mortelles.
Marin Ledun, qui se fait dans une première partie du roman "informatif", social :

En se durcissant d'année en année sous l'impulsion des tenants du sécuritaire et du dogme de la « tolérance zéro », les nouvelles lois sur l'immigration ont rendu la vie des prétendant à l'émigration de plus en plus hasardeuse. Hommes et femmes sont livrés à la merci de tous les salauds prêts à tout pour du fric et du bon temps. Et les femmes sont évidemment celles qui subissent les pires attaques. La triple peine pour les sans-papiers en robe. Clandestines en France, répudiées dans leur pays d'origine, et livrées aux ordures de tout pays pour payer la dette séculaire de la connerie humaine.

donne ensuite à son récit un traitement beaucoup plus proche du thriller, avec séquestration dans des caves sombres, courses poursuite dans des galeries souterraines, bruit de chaînes et traces de sang, revisitant les sous-sols oubliés du cinquième — n'oublions pas que le roman s'inscrit dans une série au cahier des charge strict.
D'ailleurs, c'est sans doute là que le bas blesse. Format trop court, imposition des citations musicales, revue de détail de l'arrondissement, sans compter la personnalité de Mona Cabriole qui, elle, ne semble pas clairement définie ; et on obtient pour la série, comme pour chacun de ses épisodes (ou au moins ceux que j'ai pu lire) un résultat pas complètement abouti, comme en déséquilibre. Frustrant.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Marin Ledun a choisi, comme dans cet épisode de Mona Cabriole, de mêler polar social et thriller. Lire, à ce titre, son roman Modus Operandi.
Sur le thème des marchands de sommeil, toujours à Paris mais à une autre époque, on pourra se rapprocher du roman de Joseph Bialot, La Main Courante.

Le début...

Les dix premières lignes...

Rue Mouffetard, 23h30, des relents de friture et d'huile à brûler s'échappent des restaurants à fondue, se mêlent aux rires des étudiants et des touristes venus se saouler au blanc de Savoie et à la mauvaise bière, et glissent le long des façades, de la montagne Sainte-Geneviève vers l'église Saint-Médard. Les mains avides se serrent, les corps s'enlacent, les verres se lèvent, et les trottoirs se congestionnent et se vident au rythme effréné des allées et venues des noctambules (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

Paris, 100 rue Mouffetard : quand une jeune femme se jette du cinquième étage, un bébé dans les bras, personne n'a rien vu, tous se taisent. Tous, sauf Mona Cabriole. Pourquoi un tel geste de désespoir ? Et que cachent les sous-sols de cet immeuble géré par des marchands de sommeil ? La journaliste de Parisnews devra descendre dans les profondeurs de la ville et se baigner dans les eaux d'un fleuve oublié pour aller ausculter les limites de la soumission. Les hurlements qu'elle y entend sont-ils ceux des battles punk-rock organisés dans les soubassements, ou bien proviennent-ils de voix que l'on voudrait étouffer ?


L'auteur(e)...

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