La Lune d'Omaha

Jean Amila

Gallimard / Série Noire - 1964

Tags :  Roman noir Polar social Psychologie Quidam France profonde Années 1960 Littéraire Populaire Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 31 octobre 2005

Recommandé 06 juin 1944, le débarquement en Normandie comme si vous y étiez. Premier régiment d'infanterie américain, le grand "Un" rouge, compagnie C, quatrième section, au fond de sa barge :

Brow regardait vers la France, et la France fumait (...). À perte de vue dans la grisaille on pouvait voir le flotte d'invasion ; mais au ras des vagues cela perdait toute grandeur. Chacun pour soi, dans la morne résignation du troupeau de bêtes qu'on conduit à l'abattoir.

Un vrai carnage... De la quatrième section, seul le sergent Reilly en réchappera. Vingt ans plus tard, il est devenu un des gardiens du cimetière militaire américain d'Omaha Beach, veillant sur l'armada de jardiniers locaux qui entretiennent les gazons impeccables ; il est même marié à une jeune française. La mort d'un de ses "employés", le père Amédée Delouis, va être l'occasion de prises de conscience et de nombreux bouleversements...

Jean Amila commence son récit en décrivant par le détail cette guerre qu'il exècre. Il le fait admirablement, avec des mots d'une justesse infinie qui rendent palpable l'atrocité vécue par les premières lignes, la chair à canon, celle qui ne porte jamais les galons...
Puis vient le sergent Reilly, homme d'honneur, gardien de cette citadelle de la mémoire qu'est le cimetière, ne brillant pas par son intelligence mais droit dans ses bottes. Ses certitudes d'homme simple vont être mises à mal par la mort du père Delouis et la révélation de secrets peu ragoûtants. Reilly est confronté aux magouilles des paysans locaux, décrits comme rapaces et charognards, avides, secrets :

L'ennui dans la discussion avec un Normand, c'est qu'on ne sait jamais s'il sait. Et il faut toujours agir de l'ai entendu qui laisse savoir qu'on sait qu'il sait qu'on sait ; ce qui va des fois très loin et on ne s'y retrouve plus !
Ça ressuintait la haine de Bas-Normands, longtemps retenue, comprimée par des années de sourires et pchitant tout d'un coup, mais en ayant bien soin de ne pas se mettre dans son tort !

Jean Amila n'aime pas ces gens-là, ce qu'ils représentent, et il sait le montrer, mais il les connaît suffisamment pour pouvoir décrire leurs travers avec un telle pertinence.
Mêlée aux malheurs générés par la guerre, l'auteur nous présente une galerie de personnages simples, humains, pris dans les soubresauts de la violence étatisée, broyés par l'Histoire des hommes qui fait de ceux qui tombent au combat des héros. Une histoire de morale formatée, mal placée, alors que la vie est ailleurs, servie par un style d'une clarté éblouissante, simple et travaillé, limpide, où chaque mot est à sa place et où les images sont d'une netteté saisissante :

Elle avait le goût pour la plonge, comme les âmes droites. Curer, laver, frotter, essuyer. Une façon comme une autre de garder son équilibre.

Un livre magnifique !


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

DVD Jean Amila a écrit de nombreuses œuvres qui sont pourtant méconnues. Faites comme moi : rattrapez le temps perdu et partez en exploration au cœur de ses romans. Il n'est jamais trop tard pour bien faire.

En 1985, Jean Marbœuf adapte le roman de Jean Amila en un téléfilm au titre éponyme, avec dans les rôles principaux Jean-Pierre Cassel, Dominique Labourier, Mort Schuman et Olivia Brunaux.

Le début...

Les dix premières lignes...

On ne voyait rien que le ciel bas, sauf quand la barque piquait du nez ; alors on distinguait la plage lointaine en rideau grisâtre. La France !
On entendait le chuintement de la houle et les coups de grosse caisse des paquets de mer qui prévenaient chaque fois avant le déluge d'embruns. Le fond de l'embarcation était déjà envahi par une couche de vingt à trente centimètres d'eau en mouvement continuel, de bâbord à tribord, d'avant à l'arrière, glougloutant sinistrement dans les caillebotis (...).


La fin...

Quatrième de couverture...

"On ne voyait rien que le ciel bas, sauf quand la barque piquait du nez..."
Vingt ans après, dans l'alignement blanc parfait des croix, le cimetière américain d'Omaha Beach offre sur la mer calme un point de vue à couper le souffle... Le sergent Reilly se souvient. Il est le gardien de ces tombes ; la mémoire et le seul survivant de la 4ème section. Il a refait sa vie et connaît les magouilles sordides des paysans locaux. Un petit monde matois, sous tension, à l'affût... Que le père Delouis casse sa pipe et révèle un secret bien gardé et la mort, à nouveau, rôdera sur la dune...


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Jean Amila










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