Gallimard / Série Noire - Mars 1998
Tags : Roman noir Roman d'enquête Flic Années 1990 Entre 250 et 400 pages
Publié le : 31 octobre 2005
Trophée 813 du meilleur roman francophone en 1998.
Prix Mystère de la critique en 1999 (meilleur roman français).
Moloch, le dieu purificateur du feu, à qui on offrait des sacrifices humain,
est au cœur de ce magnifique roman de Thierry Jonquet, et à travers lui
les enfants subissant tous les outrages.
Inspiré de faits divers, ce récit dense mêle plusieurs affaires dans lesquelles
interviennent des enfants. Ce sont tout d'abord quatre de leurs
cadavres carbonisés qui sont découverts dans une maison abandonnée. La
police est sur les dents mais les indices sont peu nombreux. Ce sera un
inconnu qui, ayant sauvé une fillette du massacre, mettra l'équipe
d'enquêteurs sur la piste. Une équipe déjà croisée d'ailleurs dans Les Orpailleurs, et c'est avec grand plaisir qu'on retrouve ces personnages à la
profondeur incontestable : les Rovère, Dimeglio, Sandoval et autre
Nadia Lintz...
À travers cette enquête fouillée où le souci du détail juste est constamment présent, Thierry Jonquet
aborde de front la pédophilie et son institutionnalisation, le fait
qu'elle soit aussi aujourd'hui un marché qui enrichit certains en même
temps qu'elle broie irrémédiablement des vies. D'ailleurs, l'enquête ne
court pas après un meurtrier, mais bien plutôt un justicier, c'est
dire...
L'auteur ne s'arrête pourtant pas là dans le regard qu'il porte sur la violence faite aux enfants. En
parallèle de cette intrigue principale, il vient en ajouter une seconde
traitant ce qu'on appelle le syndrome de Münchausen ; il s'agit ici
d'une mère empoisonnant sa fille à l'insuline dans l'espoir de ne
jamais la perdre. Autre violence, privée celle-là...
Thierry Jonquet fait preuve ici d'une maîtrise affirmée de son talent
d'observateur, de témoin, de rapporteur, en un mot : de conteur. Il
nous offre un roman noir prenant, poignant, où s'étalent les
différentes facettes de son savoir faire. Un regard acéré porté sur la
société, une intrigue à la construction irréprochable, le tout cuisiné
par un orfèvre maîtrisant admirablement son style. Ce roman est un chef
d'œuvre !..
Moloch a valu à Thierry Jonquet et à son éditeur un procès pour violation du
secret de l'instruction dans l'affaire Kaskaz. S'il reconnaît aisément
s'être inspiré de cette sordide histoire d'empoisonnement pour
l'écriture d'une partie de son récit, l'auteur affirme (et avec lui la
justice puisqu'il fut relaxé) que c'est à travers le traitement fait
par la presse qu'il a constitué la matière de son inspiration et non en
allant piocher dans les dossiers du juge.
Fut posée, à cette occasion, la question de la possibilité pour un
romancier, et donc un auteur de fiction, de s'inspirer de fait divers
réels tombés dans le domaine public du fait de leur médiatisation. Fort
heureusement, la réponse fut oui.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Pour ceux qui ne l'auraient pas déjà lu, retrouver l'équipe du commissaire Rovère dans Les Orpailleurs.
À propos des enfants qui, sans être un sujet récurrent dans ses romans
demeure tout de même une des préoccupation de Thierry Jonquet, on
pourra s'attarder sur La Vie de ma Mère ! et sa description de l'exclusion dans le système éducatif.
Egalement Clara et la Pénombre de Jose Carlos Somoza, dont plusieurs éléments de l'intrigue sont proches de ceux de Moloch (maltraitance des enfants, considérations sur l'art etc...).
Les dix premières lignes...
Ils étaient là, pataugeant dans la boue, hébétés, certains pleurant,
d'autres hagards, les mains tremblantes, la gorge nouée par le dégoût,
la pitié, la colère, la honte, un mélange confus de ces sentiments si
voisins, tous à scruter le ciel gris-bleu, dans ce matin de printemps,
tous à songer à ce qu'ils avaient fait une demi-heure, une heure plus
tôt, quand le téléphone avait sonné chez eux pour les tirer du sommeil
et les convoquer devant cette maisonnette d'apparence si banale,
dressée au fond d'un terrain vague (...).
Quatrième de couverture...
L'Éternel parla à Moïse et dit : Tu diras aux enfants d'Israël : si un
homme des enfants d'Israël ou des étrangers qui séjournent en Israël
livre à Moloch l'un de ses enfants, il sera puni de mort...
Si le peuple du pays détourne ses regards de cet homme qui livre ses
enfants à Moloch et s'il ne le fait pas mourir, je tournerai moi, ma
face contre cet homme et contre sa famille et je le retrancherai du
milieu de son peuple avec tous ceux qui se prostituent comme lui en se
prostituant à Moloch...
La Bible, Lévitique, XX.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...