Gallimard / Série Noire - Octobre 1994
Tags : Polar social Polar urbain Années 1990 Moins de 250 pages
Publié le : 31 octobre 2005
Thierry Jonquet renoue ici avec la peinture sociale, voire même l'étude sociologique, chère à son côté militant et citoyen.
À l'origine destiné à une édition jeunesse, La Vie de ma Mère ! est
aujourd'hui reconnu dans les milieux enseignants ou liés à la pédagogie
comme une mise en lumière pleine de vérité des mécanismes de la mise à
l'écart d'une partie de la population du système éducatif français,
souvent la plus démunie, souvent celle dont le besoin est le plus
pressant.
L'auteur nous entraîne au cœur de la banlieue, celle qui fait peur, celle où on applique les sacro-saints
principes du traitement social du chômage. On y retrouve les enfants
des cités : Kaou, Mohand, Farid, ainsi que le narrateur, Kevin, qui, du
haut de ses quatorze ans, se retrouve en section d'éducation
spécialisée.
On y croise la misère bien sûr, mais en toute pudeur, sans pathos. On y croise également la délinquance
puisque le propos de l'auteur tend à montrer, à constater, que lorsque
l'éducation nationale relègue sur des voies de garage sans issue les
adolescents désœuvrés, elle fait le lit des bandes organisées, en lien
avec la misère sociale, l'inculture, la démission de l'état dans ses
missions premières.
Sans excès, avec réserve et beaucoup de tendresse, Thierry Jonquet montre plus qu'il ne dénonce,
laissant au lecteur le soin de tirer ses propres conclusions sur cette
épineuse question. Mais ce roman est aussi l'occasion d'un travail en
profondeur sur la langue des banlieues, pleine de truculence, de
raccourcis, mais aussi le signe flagrant d'un appauvrissement. Le voyage
de ce gamin démuni, particulièrement attachant dans son combat pour
garder les pieds sur terre, est traité tout en finesse ; mais n'est-ce
pas la moindre des qualités de cet auteur majeur de la littérature
noire française ?
Quelques pistes à explorer, ou pas...
La Vie de ma Mère ! a été adapté en bande dessinée en 2003 (texte de Thierry Jonquet, dessin de Jean-Christophe Chauzy, chez Casterman).
Côté peinture sociale et vie de banlieue, n'hésitez pas une seconde, dès que vous avez deux heures de libres, à dévorer La Bête et la Belle, du même auteur. C'est un véritable régal.
Les dix premières lignes...
Il me l'avait bien dit, monsieur Bouvier, que si je continuais à faire
l'andouille, je pourrais jamais aller au collège normal, comme les
autres copains de la classe. Monsieur Bouvier, c'était le maître qu'on
avait en CM2. Il était vachement sévère, monsieur Bouvier. Il me
punissait sans arrêt, mais faut dire qu'on faisait le souk dans la
classe, moi, Farid, Mohand et Kaou !
Monsieur Bouvier, il nous avait mis au fond, tous les quatre, à côté de l'aquarium, pour pas qu'on gêne les autres (...).
Quatrième de couverture...
Ce n'est pas l'histoire de sa mère car de mère, il en a si peu.
Elle n'est jamais là, elle travaille comme standardiste de nuit à
Lariboisière. Elle fait de son mieux. Alors il vit sa vie tant bien que
mal et la raconte dans son langage à lui, le môme des cités. Il n'est
pas fort en rédaction, mais lui aussi il fait de son mieux...
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...