Giorgio Scerbanenco

Biographie succincte...

Giorgio Scerbanenco est né à Kiev en 1911, de mère italienne et de père ukrainien. Son père est fusillé par les bolcheviks et il est contraint de fuir avec sa mère qui décèdera à Rome peu de temps après. À l'âge de 16 ans, il émigre à Milan. Orphelin et sans argent, pour subsister, il travaille pour des journaux féminins, d'abord comme correcteur, puis comme auteur de nouvelles et de romans à l'eau de rose.
Il se tourne vers le polar dans les années 50, en écrivant d'abord des nouvelles. Puis il a l'idée de créer "un type de flic italien et non pas seulement une version gauchement italianisée d'un Spade ou d'un Maigret". C'est ainsi que naît Duca Lamberti, ancien médecin radié de l'ordre pour euthanasie, qui collabore avec la police dès sa sortie de prison dans le premier roman de la série Vénus Privée.
Quatre romans mettent en scène ce personnage et c'est avec eux que Scerbanenco atteint à la reconnaissance internationale. Il obtient le grand prix de littérature policière en 1968, pour À Tous les Râteliers (titre original : Tradittori di Tutti), second de la série des Duca Lamberti.
Scerbanenco est mort à 58 ans à Milan, alors qu'il commençait tout juste à atteindre à la renommée méritée de père du roman noir italien.
En 1996 en Italie a été créé un prix portant son nom, décerné au meilleur roman policier italien chaque année.

Un commentaire personnel...

Publié le 1er janvier 2006

L'écriture de Scerbanenco est emplie de poésie et de rudesse tout en même temps. Dans les romans et nouvelles qui ont été traduits en français, on sent encore cet accent simple et parfois facile de la littérature populaire, dans laquelle l'auteur a été extrêmement prolifique.
Cela donne un mélange étonnant et enthousiasmant, qui replongera les amoureux de l'Italie dans cette ambiance si spéciale, faite d'exclamations, de superlatifs, de sourires resplendissants, mais aussi de dureté et d'omniprésence de la corruption et de l'arnaque. Pour les autres, gageons que ça leur donnera envie d'aller faire un tour dans le plus beau pays du monde...
Les récits de Scerbanenco sont très noirs et très urbains, dans la plus pure tradition des auteurs de noir. Milan est à Scerbanenco ce que Los Angeles est à Ellroy : la véritable héroïne, le lieu de tous les secrets, de toutes les bassesses et toutes les grandeurs, une jungle dans laquelle un personnage de détective hors du commun mais toujours profondément humain nage, se noie parfois, se cherche...
Le personnage de Duca Lamberti est présent dans quatre romans : Vénus Privée (Venere Privata, 1966), À Tous les Râteliers (Tradittori di Tutti, 1966), Les Enfants du Massacre (I Ragazzi del Massacro, 1969) et Les Milanais Tuent le Samedi (I Minalesi Ammazzano il Sabato , 1969).
On peut également signaler un recueil de nouvelles noires absolument sublimes, Péchés et Vertus ( I Sette Peccati e le Sette Virtù Capitali, 1974).
La plupart des œuvres de Scerbanenco ont été publiées chez 10/18, et semblaient quelque peu oubliées, mais depuis peu, les éditions Rivages semblent avoir décidé de remettre à l'honneur ce grand auteur de noir, en publiant deux romans jusque-là jamais traduits en français : Le Sable ne se Souvient pas et Les Amants du Bord de Mer.

D'un autre grand du noir italien, Andrea G. Pinketts :
"Il a réussi à raconter la face cachée de l'Italie des années 60 d'une manière quasiment sociologique, presque anthropologique. Alors que ces années-là semblaient être celles du boom économique et du bien-être, il est parvenu d'une façon unique et magistrale à les dépeindre comme les années de l'horreur... Et si je dois, dans cent ans, expliquer à un enfant les années 60, je lui ferai lire Scerbanenco."

(entretien paru dans Jade 19 © Gerardo Lambertoni (Soleil Noir), Jakob Kreutzfeld & 6 Pieds Sous Terre, 2000).