Gallimard / Série Noire - 1953
Tags : Roman noir Polar urbain Crime organisé Truand Paris Années 1950 Littéraire Argotique Moins de 250 pages
Publié le : 03 octobre 2009
Le Riton, c'est un vieux de la vieille, élevé à Montreuil ; un as de la rapière. Et lorsque le p'tit Fredo est venu le provoquer jusque sur ses terres, on pense qu'il ne faudra pas plus d'une heure pour lui faire payer l'affront. Recta.
Tout le monde croit savoir ce qui s'est passé, Larpin et Maffeux en tête — deux inspecteurs de la PJ qui ont assisté à la provoc' —, tout comme Angelo, le bras droit de Fredo, et ses bires. Il y a du règlement de compte dans l'air, et Max le Menteur, ami de Riton et présent sur les lieux, se retrouve de fait en première ligne.
Seulement le Fredo, on l'a retrouvé la gorge tranchée, et ça, ça n'est pas dans les manières de Riton qui est habitué, en bon professionnel, à frapper au ventre, en remontant. Alors, qui a fait le coup ? Et qui veut lui faire porter le chapeau ?
Apparaît bientôt l'explication de tout ce tintouin et le fait que Josy, la régulière de Riton, un peu trop bavarde, ait répété ce que son homme lui a confié sur l'oreiller ; à savoir le résultat fructueux de son dernier coup en compagnie de Max.
Ainsi Fredo, puis Angelo, aiguillé par Josy, tentent-ils de soutirer le fruit de leur dur labeur aux deux vieux compères qui, on s'en doute, ne se laisseront pas faire…
Touchez pas au Grisbi ! est un sommet dans l'art et la maîtrise de l'argot. Simonin ne simule pas son usage, il vit en argot et ses personnages le suivent sur le même chemin, hyperréaliste.
C'est le monde des truands parisiens qui est ici montré, un monde qui s'étend de Montmartre à la place Clichy en passant par Pigalle. Un monde que Max le Menteur, un vétéran de la blousaille, s'apprête à quitter. Un monde dont il a fait le tour, qui l'a fait vivre, mais qu'il ne regrettera pas.
Si la truculence est au rendez-vous, si l'on sourit à la lecture des filouteries, des embrouilles et des trahisons que se réserve tout ce beau monde, on peut lire aussi ce roman comme un témoignage des mouvements qui agitent la société française dans les années cinquante. Le monde bouge, l'époque change, les influences extérieures se font pressantes et Max, spectateur et "victime" de cette évolution, n'apprécie guère les nouveaux engouements de la jeunesse.
On peut prendre Touchez pas au Grisbi ! comme un simple divertissement, réussi, mais ce serait oublier cette touche si particulière d'Albert Simonin qui, outre son usage irrésistible de l'argot, sait toujours glisser dans ses intrigues, de manière diffuse, ce regard acéré et lucide sur le monde qui l'entoure. Il se trouve que c'était ici la première fois.
Le titre du roman n'est pas seulement une menace, c'est aussi une leçon de morale, touchante.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Rencontrant un énorme succès populaire dès sa parution (prix des Deux-Magots quinze jours après sa sortie) et préfacé par Pierre Mac Orlan, de l'Académie Goncourt, Touchez pas au Grisbi a été adapté fidèlement dès 1954 au cinéma par Jacques Becker avec Jean Gabin dans le rôle de Max (ce qui relança sa carrière d'acteur).
Il est le premier volet d'une trilogie qui se poursuit avec Le Cave se Rebiffe puis Grisbi or not Grisbi.
A noter que l'ensemble de la trilogie a été rééditée en un seul volume, titré Le Grisbi, par La Manufacture de Livres en avril 2010.
Les dix premières lignes...
Pensant avoir mal compris, tout le monde s'était tu.
On n'entendit plus soudain que le bruit mou de la houpette avec laquelle Josy, la môme de Riton, se tamponnait le visage. Machinalement, la mère Bouche avait mis en veilleuse la rampe du percolateur qui sifflait un peu.
« Ton Riton, je m'en vais le fourrer ». répéta le petit Frédo en se levant.
Devant le zinc, personne mouftait.
Chacun pouvait en penser ce qu'il voulait, de cette provocation. À moi, ça rappelait la lecture du verdict au procès de Paulo-le-Pâle, l'instant où le président avait annoncé que Paulo y allait du cigare. Pour le petit Frédo, c'était du kif, sauf qu'il venait lui-même de prononcer sa condamnation (…)
Quatrième de couverture...
Max-le-Menteur pensait se classer parmi les hommes de poids du milieu des malfrats parisiens. Il ne lui manquait pas grand chose. Mais l'assassinat de Fredo vient tout remettre en cause. Qui a tué ce chef de bande ? Riton, son ennemi héréditaire, et meilleur ami de Max ? En son absence, c'est ce que tout le monde croit. Et pour les lieutenants de Fredo, la vengeance va être simple : tuer Max. Entre la police qui cherche Riton et les tueurs fous à ses trousses, Max n'aura pas une minute à lui.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...