Seuil Policiers - Septembre 2005 - Traduction (suédois) : Anna Gibson
Tags : Roman d'enquête Polar social Mystique Flic Suède Années 2000 Plus de 400 pages
Publié le : 31 octobre 2005
On attendait avec impatience la parution française de ce roman de Henning
Mankell, sorti en Suède depuis 2002, et mettant en scène Linda
Wallander, la fille du célèbre commissaire, entrant elle-même dans la
brigade d'Ystad. La "confrontation" promettait des étincelles, les
aficionados ne seront pas déçus...
Le récit s'ouvre, en guise de prologue, sur le suicide collectif, le massacre de la secte du Temple du Peuple, à Guyana en 1978. Une extermination
massive de plus de mille personnes, hommes, femmes, enfants, un
évènement réel qui permet à Mankell d'entrer dans la fiction en faisant
apparaître un survivant à ce carnage.
Retour à Ystad, août 2001. Un cinglé sadique s'amuse à enflammer des cygnes pour le plaisir fugace de les voir, dans la nuit noire, s'envoler dans les
flammes. Linda Wallander, quant à elle, vient de terminer sa formation
à l'école de police de Stockholm et est de retour à Ystad où elle doit
bientôt prendre ses nouvelles fonctions d'aspirante. Elle habite
provisoirement chez son père et ces deux-là se tapent un peu sur le
système... Linda, impatiente d'entamer sa carrière, passe le temps en
renouant des liens avec ses anciennes amies d'enfance.
C'est alors qu'on découvre, au fond d'une forêt, une macabre mise en scène
qui va mettre en émoi tout le commissariat : une tête coupée,
accompagnée de deux mains aux doigts entremêlés sur une bible
griffonnée. La police est sur les dents, Kurt Wallander en première
ligne. Quant à Linda, l'inquiétude lui vient suite à la disparition
inexpliquée d'une de ses amies...
Henning Mankell prend son temps, il n'est pas un habitué des rythmes
frénétiques chers à certains, mais plutôt du crescendo organisé. Toute
la première partie de ce roman s'attache plutôt à la psychologie des
personnages et aux retrouvailles entre Linda et son père. L'auteur
montre, avec une grande acuité et beaucoup de délicatesse, les zones
d'ombres des âmes torturées, les sentiments qui unissent père et fille,
les incompréhensions aussi, les questionnements ; ils se ressemblent
tant dans leurs différences... Linda (re)découvre son père :
Je le soupçonne d'être un type profondément sentimental, qui rêve en secret de petits rendez-vous romantiques et qui déteste, au fond de lui, la réalité incompréhensible et brutale qui l'entoure.
Alors l'intrigue se développe et apparaît le cœur de ce roman et sa raison
d'être. Henning Mankell s'interroge sur les sectes fanatiques, faisant
le distinguo entre les escrocs, les gourous de pacotille et ceux, ô
combien plus dangereux, qui ont vraiment la foi, leur foi, même teintée
de folie.
L'auteur décrit le parcours d'un homme perdu, ne trouvant pas sa place dans une société mercantile, à la recherche d'un épanouissement personnel, qui va dériver, au hasard des rencontres, et se forger une image de messie rédempteur. Sa "croyance" prend ses fondements dans la bible et la chrétienté, qu'il adapte à sa folie, à sa quête de valeurs fondamentales. L'homme n'est pas fou
pourtant. Il croit, il détient la vérité, sa vérité, ce qui est bien
pire.
Henning Mankell analyse cette descente aux enfers (ou cette montée au ciel...) avec la même finesse dont il fait preuve pour décortiquer les rapports père-file. Il s'interroge, et par là même son lecteur, sur les tenants de cette dérive religieuse, rappelant au passage qu'aucune "église" n'est à l'abri de tels fanatismes ou intégrismes. Un rappel brûlant à l'actualité.
Reste une intrigue à la construction irréprochable, servie par un style qui
fait merveille, des personnages d'une profondeur et d'une épaisseur
jamais en défaut. Henning Mankell n'est pas un grand optimiste dans sa
vision de la société humaine en mouvement, mais il n'en a pas pour
autant perdu tout espoir :
Je redoute l'automne (...). J'ai peur de tous ces brouillards qui arrivent en rampant, de toute cette pluie et de toutes ces corneilles qui croassent dans les arbres. La seule chose qui me redonne du courage, c'est de penser aux fleurs de printemps que je plante en ce moment dans mon jardin.
Un vrai grand roman !..
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Sur ce même sujet des sectes, dans un genre différent, et traitant cette fois plus particulièrement de l'église de scientologie et de ses pratiques, vous pouvez lire le roman de Paul Colize, Clairs Obscurs, admirablement documenté.
Les dix premières lignes...
Les pensées fusaient dans son cerveau telles des gerbes d'aiguilles
chauffées à blanc. La douleur devenait insoutenable. Pour éloigner la
panique, il tenta désespérément de réfléchir. Qu'est-ce qui le
tourmentait le plus ? Pas besoin de chercher. Il savait. C'était la
peur. Que Jim lâche ses chiens sur lui, comme sur une proie terrorisée,
aux abois. Il était devenu gibier. Toute cette longue nuit du 18 eu 19
novembre où il resta terré, à bout de force, sous un arbre déraciné, il
crut entendre les chiens (...).
Quatrième de couverture...
Fin août 2001, dans la forêt aux abords d'Ystad, la police fait une atroce
découverte : une tête de femme coupée, deux mains jointes comme pour la
prière reposent près d'une bible aux pages griffonnées d'annotations.
Ce crime intervient après une série d'incidents macabres, notamment
l'immolation d'animaux par le feu. Le commissaire Wallander est
inquiet. Ces actes révoltants seraient-ils le prélude à d'autres
sacrifices, humains cette fois, et de plus vaste envergure ?
Linda Wallander arrive à Ystad, impatiente d'endosser l'uniforme de la
police. Contre l'avis de son père, dont elle partage déjà
l'anticonformisme et l'irascibilité, elle se lance dans une enquête
parallèle, qui l'entraîne vers une secte religieuse fanatique, résolue
à punir le monde de ses péchés. Linda va bientôt le regretter...
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...