Clamser à Tataouine

Raphaël Quenard

Flammarion - Mai 2025

Tags :  Comédie Serial Killer Quidam France Années 2020 Humoristique Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 16 juillet 2025

On découvre d’entrée un jeune homme sans trop d’états d’âme qui joue les gigolos « arnacœur » auprès de Liliane, octogénaire en fin de parcours, mais se révèle aussi un écrivain en herbe qui confie son premier manuscrit à sa quasi-dulcinée. Un livre de souvenirs…
Retour quelques mois plus tôt. Le narrateur est à Paris, désœuvré, inadapté, sur le point de finaliser un suicide lié à son mal être avant de finalement renoncer pour entreprendre un grand projet :

L’addition de ma lâcheté devait être payée. Par moi ou par un tiers.
(…)
J’avoue que mourir sans avoir commis de crime me laissait comme un goût d’inachevé. Comme si la messe n’avait pas été dite.

En tant qu’écrivain, Raphaël Quenard reste conforme au personnage qu’il propose comme comédien en phase de promo. Il a ce phrasé si particulier, identifiable, parsemé de vocabulaire désuet et d’expressions incongrues qui font sa patte, sa signature. Pour autant, il y a une forme très naturelle dans cette expression, on n’y ressent aucune espèce de feinte, comme si l’encre de cette plume coulait de source. Le bonhomme est perché, voilà tout. Appréciera qui veut.
Certains pourraient croire à une forme calcul, mais d’autres lui reconnaîtront un certain talent.

Gloire à tous ces honnêtes gens qui piaillent à tort et à travers, ces honnêtes gens qui commencent leurs phrases sans en connaître la destination. Ouvrir la bouche, c’est se promettre de galoper dans les landes infinies de notre langue bénie. Rien de plus. Existe-t-il plus plaisante perspective ? Dire tout et son contraire, c’est le début de la transparence. C’est le seul moyen de retranscrire avec justesse le chaos d’une âme humaine.

Il s’agit donc de tuer, uniquement des femmes, tout en descendant un à un les degrés de l’échelle sociale. Même s’il y a crime, ne nous y trompons pas, Clamser à Tataouine n’est clairement pas à classer parmi les polars, même si les frontières sont de plus en plus poreuses et les échanges fréquents. D’ailleurs, les quelques assassinats décrits y seront traités en quelques lignes à peine.
Non, dans ce premier roman l’auteur se raconte à sa manière, agrémentant sa fiction d’anecdotes et de réflexions puisées dans une réalité plus proche.
Reste que le procédé apparaît répétitif au fil des chapitres et que passé l’effet de surprise on se lasse un peu de ce ton monocorde. Raphaël Quenard observe son monde d’un œil faussement léger qu’on peut trouver attrayant, mais il peine à renouveler son approche. D’un crime à l’autre, d’une victime à l’autre, on suit quasiment le même sentier — repérage, digressions, assassinat, fuite — un défaut qui nuit à maintenir l’intérêt. Au fond, on se demande si l’auteur n’en est pas réduit, d’une manière ou d’une autre et comme beaucoup de ses congénères, à plus s’observer le nombril qu’à soigner son intrigue et « respecter » son public.
Heureusement, quelques personnages — merci Warda — croisés au fil des pages viennent relancer la flamme avant que celle-ci ne s’éteigne dans un final « téléphoné » pour ne pas dire bâclé.
Un texte court (heureusement, plus ç’aurait été trop), une plume alerte, une certaine originalité, mais un ensemble qui, passée l’excitation de la découverte, peine à convaincre.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Cette histoire de gigolo qui fait l’entame de Clamser à Tataouine m’a fait repenser avec un sourire aux lèvres aux aventures scabreuses de Dino Scalla imaginées par Jacky Schwartzmann dans Pension Complète.

Le début...

Les dix premières lignes...

Tataouine, novembre 2024
Je coule les jours les plus doux de mon existence. J’ai trouvé la parade ultime. Vivre aux crochets d’une octogénaire, c’est quand même le pied. J’y invite tous mes camarades chromosomiques. Ou du moins ceux qui parmi eux ont l’heur d’être gérontophiles. Bienheureux ceux pour qui la flétrissure n’est pas un frein. Liliane a 82 ans. Liliane dégouline de rides. Liliane a des trous de mémoire béants. Liliane ne se déplace qu’avec le secours d’une canne. Malgré tout, Liliane partage ma couche. Ou plutôt je partage la sienne puisque c’est moi qui suis chez elle.
Que la vie peut être agréable quand on est épargné par les problématiques pécuniaires. L’habit et le logis m’étant fournis, me voilà sans grand souci, comme dirait La Fontaine (l’auteur, pas la femme).


La fin...

Quatrième de couverture...

« La discutable dextérité dont j’ai fait montre pour me dépatouiller de mon existence laisse à penser que je suis tout sauf un exemple à suivre. »
C’est le moins qu’on puisse dire. Le narrateur est un jeune marginal qui n’a jamais cherché à s’intégrer. Ce qui ne l’empêche pas de trouver plus commode de rejeter l’entière responsabilité de son ratage sur la société. Et il compte bien, « en joyeux sociopathe », lui faire salement payer l’addition de sa défaite. Son plan ? S’immiscer dans toutes les classes sociales pour dénicher chaque fois une figure représentative de cette société détestée. Et la tuer. En écrivant le roman de ce psychopathe diaboliquement pervers, provocateur et gouailleur, l’auteur entraîne le lecteur dans une épopée macabre mâtinée d’un humour noir très grinçant.
Avec un style aussi électrique qu’inventif, Raphaël Quenard dissèque le cerveau malade d’un monstre moderne et met en scène toute la galerie de personnages qui l’entourent.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Raphaël Quenard










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