Après la Lune - Février 2011
Tags : Roman noir Polar politique Quidam France Années 2010 Littéraire Original Moins de 250 pages
Publié le : 23 mars 2011
Au printemps 2006, alors que la jeunesse manifeste contre le projet CPE, ils sont quatre — Maude, Guillaume, Raoul et Stéphane — en attente, à l'écart, vaguement étudiants, vaguement intellos, vaguement musiciens, vaguement alcooliques ou drogués mais franchement politisés pour certains, à tendance anar, qui éditent une revue politique ultraconfidentielle intitulée Catharsys ?, n'envisageant leurs avenirs que loin des lignes qu'on a tracées pour eux.
Le suicide de Stéphane va désintégrer ce groupe.
En mars 2009, alors que la crise financière secoue les économies, ils vont se retrouver à l'initiative de Maude qui rentre en France après un long séjour en Amérique du Sud et subit le choc de redécouvrir le quotidien de la région nancéienne qu'elle avait quittée trois plus tôt. Après avoir connu les débordements de vie, la grisaille, les silences, l'étroitesse d'esprit, la peur ambiante lui semblent insupportables. Un CRS piétinant son appareil photo lors d'une manifestation et brisant ainsi ses deniers espoirs cachés de devenir reporter servent de déclencheur. Il lui faut agir pour ne pas sombrer…
Raoul s'est enfermé dans la solitude, ne conservant qu'une lucarne virtuelle ouverte sur Internet à travers laquelle il diffuse une nouvelle version de Catharsys ?.
Guillaume boit toujours autant, mais il s'est un peu "rangé", est devenu gardien de nuit dans un hôtel bourgeois et ronge son frein devant les réflexions de son patron.
Ces trois-là sont trentenaires, laissés pour compte et inadaptés à vivre dans la société française et le monde d'aujourd'hui, ultralibéral, mondialisé. Pour n'avoir pas à les subir, ils relève la tête et décident de passer à l'action terroriste en éliminant quelques patrons de passage à Nancy pour un congrès du Medef et séjournant à l'hôtel Mercy dans lequel officie Guillaume…
Action Directe n'est plus depuis vingt-cinq ans au moins. Le terrorisme d'extrême gauche est affaire du passé malgré qu'on ait voulu il n'y a pas si longtemps le remettre en selle sur les épaules de Julien Coupat. Pourtant, aujourd'hui peut-être plus qu'hier, il se justifierait. Tel est plus ou moins le postulat de départ du roman de Pierre Brasseur ; ou comment devient-on terroriste dans la France de 2010.
En trois parties distinctes, l'auteur nous conte la révolte, l'épopée sanglante puis la reprise en main du trio composant le Groupe Terroriste de Libération. Le regard est posé au plus près de ces activistes amateurs, montrant leurs motivations plus ou moins boiteuses, leurs hésitations mais aussi leur détermination résignée, désespérée, leur peur lorsque arrive le moment des tuer des hommes.
Pierre Brasseur ne juge pas (on sent même qu'il compatirait plutôt), il montre, sans mettre en scène, ou plus précisément en faisant oublier sa mise en scène. Et nous assistons au glissement progressif de Maude et ses compagnons vers une forme de violence extrême, plus induite par leur environnement que par leur idéologie, du moins pour ce qui concerne le passage à l'acte.
Ainsi l'auteur rejoint les thèses des comportementalistes et choisit, en toute logique, l'écriture « béhavioriste » pour mener son récit. Et c'est là le double intérêt de Je Suis un Terroriste. Ce choix narratif n'est pas innocent, il colle parfaitement au sujet, lui donne une saveur toute particulière, et ce d'autant plus qu'il est parfaitement maîtrisé. Une sorte d'appropriation qui dédaignerait les intégrismes en matière littéraire mais privilégierait néanmoins l'exigence.
Alors on pense forcément à Jean-Patrick Manchette, on se rappelle Nada (paru en 1972), mais plus qu'un hommage, il s'agit ici d'un prolongement réussi ; l'époque a changé.
Et tout le monde sait ça : autre époque, autre mœurs…
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Nada, forcément.
Les dix premières lignes...
Ce 30 mars 2006, à une heure du matin, un homme de vingt-huit ans au blue-jean déchiré observait d'un regard glacé les platitudes céréalières de la Champagne pouilleuse.
C'était un vieux wagon Corail aux sièges orange, trop durs, éclairés par de simples veilleuses. Bien que ce fût le printemps, il pleuvait une flotte verglaçante, et les rares voyageurs grelottaient dans leurs gros manteaux.
Seule Stéphane Anselme restait éveillé. Il fumait clope sur clope, malgré l'interdiction, et portait souvent à sa bouche une bière en métal noir, une 8.6 dégueulasse et anesthésiante (…)
Quatrième de couverture...
Nancy, mars 2009.
Maude Meyer a trente ans et vit chez ses parents, mais elle rêve encore d'une carrière de grand reporter. Ses potes ne sont guère mieux lotis. Guillaume, le guitariste raté, alcoolique cynique, Raoul, l'intello qui s'enferme dans sa barre HLM, ces post-punks géniaux et désespérés en ont marre de rester passifs. Leur seule certitude, c'est que la France v replonger dans la terreur. Contre la barbarie de l'ultralibéralisme, ils décident de prendre les devants. Et les armes.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...