Nous ne Sommes Rien Soyons Tout !

Valerio Evangelisti

Rivages / Thriller - Janvier 2008 - Traduction (italien) : Serge Quadruppani

Tags :  Roman noir Roman historique Crime organisé Trafic Corruption Truand Etats Unis Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 20 février 2008

Adolescent, Eddie Lombardo traîne sur les quais du port de Seattle. Son père et ses deux frères sont dockers et syndicalistes. Lui ne veut pas de cette vie de labeur et de gagne petit. Il compte bien gagner de l’argent. Beaucoup d’argent. Et si possible rapidement et sans trop donner de sa personne. L’occasion va lui en être donné par un gros bonnet de la pègre locale. Contre rétribution, il va les renseigner sur les agissements des dockers. Et quel meilleur poste d’observation que celui que représente le bureau du syndicat ? Eddie enfile donc le costume de dirigeant syndicaliste et l’argent commence à rentrer. Il donne rapidement satisfaction à ses protecteurs et se profile un avenir facile pour lui. Son objectif : le port de New York !

C’est à une véritable radiographie de l’histoire du syndicalisme américain que s’est livré l’auteur. Hyper précis, documenté, le roman regorge de références historiques (on croise Jimmy Hoffa et le syndicat des camionneurs). Evangelisti nous promène sur près de quatre-vingts années en suivant la « carrière » d’Eddie. D’abord indic à la solde des compagnies maritimes, ses talents de magouilleur et d’homme de main vont lui ouvrir les portes des hautes sphères du syndicalisme. Et à cette époque, qui dit syndicat dit mafia.

Parti de Seattle dans les années vingt, nous le suivons à San Francisco vivre les grèves de 1934 et 1935. Elles paralysèrent le port entier et presque toute la côte ouest. Eddie part ensuite à New York à la veille de l’engagement des USA dans la Seconde Guerre Mondiale. Il y reste jusqu’à la fin de la « Chasse aux sorcières » du sénateur McCarthy durant les prémices de ce qui deviendra la Guerre Froide. Nous le retrouvons enfin en 1999 à Seattle, à la fin de sa vie. Devenu infirme et impotent il se contente de regarder au dehors les grèves qu’il dirigeait jadis.

Au cours de ce voyage dans le temps et à travers le pays, l’auteur retrace une période importante de l’histoire américaine. Les collusions entre syndicats et mafia, le poids des immigrés dans les organisations criminelles (les Italiens en particuliers et l’importation du modèle mafieux de Sicile), la corruption des dirigeants politiques, la violence, sont des thèmes qui sont omniprésents dans les œuvres qui essaient d’éclairer l’histoire des USA (on pense parfois à Scorsese et Gangs of New York). Tous sont bien amenés et l’ambiance est prenante.

C’est très noir, violent (les mœurs d’Eddie valent quelques passages peu ragoûtants), mais il manque du rythme. Evangelisti a réussi un tour de force avec ce livre, mais il semble vouloir trop en faire. C’est pourquoi il alterne quelques fois longueurs et raccourcis improbables. Je pense que c’est pour garder l’attention du lecteur. Qu’il continue de lire un roman et non pas une somme historique. Avec ce titre génial, je m’attendais à un roman plus vif et accrocheur, c’est ce qui nuance mon appréciation.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

La saison deux de l’excellente série produite par HBO The Wire, dont l’action se déroule sur le port de Baltimore et dans le milieu du syndicat des dockers, reprends certains thèmes du roman. En particulier les relations complexes entre les syndicats et la mafia.
Toujours sur ce thème des syndicats, on pourra également se rapprocher du roman de Budd Schulberg, Sur les Quais, ou du film Hoffa dans lequel Jack Nicholson incarne le célèbre syndicaliste américain.

Le début...

Les dix premières lignes...

Depuis des semaines, le bateau à vapeur dominait de sa masse haute et noire Harford Street et la totalité du port central de Seattle. Les hélices étaient immobiles, les cheminées n’exhalaient aucune fumée. Les quelques membres de l’équipage du Delight restés à bord passaient leurs journées à regarder d’un air morose les foules qui, sur le quai numéro cinq, se réunissaient quotidiennement pour les insulter. Même les officiers s’étaient résignés à la présence des banderoles accrochées de force sur les flancs. Les inscriptions, ils devaient désormais les connaître par cœur : « Boycottons le bateau de la mort ! », « Vivent les camarades russes ! vive la révolution ! », « un seul grand syndicat ! ». Des phrases tout à fait analogues figuraient sur les panneaux des manifestants.
Eddie Lombardo tenait son propre panneau signé entre les genoux tandis que, assis sur le bord d’un wagon à demi renversé dans le fossé, il se roulait une cigarette (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

Dans l’Amérique troublée des années vingt s’est développé un puissant mouvement syndical. Eddie Lombardo, jeune italo-américain d’abord tenté par le proxénétisme, entame une carrière de mouchard au service du patronat. Violent, totalement dépourvu de morale, Eddie — qui se fait appeler Florio pour rompre avec sa famille « communiste » — gravit rapidement les échelons de l’International Longshoremen’s Association, organisation du port de New York bien connue pour ménager les intérêts des armateurs plutôt que ceux des dockers. Maître ès chantage et extorsion, aussi doué pour déclencher une grève que pour y mettre fin, il n’hésite jamais à rendre « service » à ses puissants protecteurs mafieux ni à utiliser les femmes pour satisfaire ses pulsions perverses, quitte à s’en débarrasser ensuite le plus cyniquement du monde.
Mais avec la guerre, l’Amérique change, et le syndicat du crime avec elle. Eddie a beau avoir passé sa vie à étouffer des « rouges », le délire maccarthyste ne le sert pas. Devenu encombrant, trop voyant du fait de ses mœurs effrayantes, il perd la confiance des parrains. Or dans ce monde-là, mieux vaut ne pas se retrouver seul…


L'auteur(e)...

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Valerio Evangelisti










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