Luneau Ascot - Février 1985 - Traduction (anglais) : 0 Laurence
Tags : Roman noir Comédie Corruption Arnaque Quidam Grande-Bretagne Années 1970 Littéraire Humoristique Entre 250 et 400 pages
Publié le : 16 novembre 2007
Dans la présentation de ce roman noir, Tom Sharpe comparé à Waugh et Wodehouse dit travailler quant à lui au coupe-coupe. Á la lecture de La Route Sanglante du Jardinier Blott, on le croit volontiers. D’un point de départ simplissime et archétypal, Sharpe croque une peinture outrée et jubilatoire de l’Angleterre rurale, gentry et politique.
Sir Giles est un homme d’affaires prospères. Ses affaires ne sont pas des plus propres. Il s’est enrichi par les expulsions et les démolitions de biens immobiliers. Après l’argent, il a voulu un poste de représentant à la chambre des Lords et un château, et en conséquences a épousé Lady Maud, laquelle est l’ultime descendante d’une vieille famille de la gentry, les Handyman.
Sir Giles a des mœurs sexuelles… particulières. Et le mariage, au grand désarroi et à la grande rage de Lady Maud, n’a pas été consommé et n’a donc pas produit les héritiers attendus par la dernière des Handyman.
Aujourd’hui, Sir Giles veut se séparer de son épouse. Mais comment échapper à ce mariage sans perdre le château, voilà le point de départ de La Route Sanglante du Jardinier Blott. Sir Giles a une idée, faire passer une autoroute dans le jardin de la propriété et toucher une confortable compensation financière, et le divorce, enfin. Quelques mots à l’oreille d’un fonctionnaire acquis à sa cause — notre député magouille dans le domaine depuis des lustres — et la machine est lancée.
Le roman est constitué de la bataille qui va se livrer autour de ce projet d’autoroute. Car Lady Maud n’a pas l’intention de laisser une quelconque décision administrative inepte défigurer son parc. Avec toutes les caractéristiques de la gentry sûr de son bon droit, elle se dresse de toute sa taille, imposante, et de tout son poids, pas moins imposant, contre le projet d’autoroute. Elle finira par découvrir la traîtrise de son époux et par engager les hostilités contre lui. Elle trouvera un allié inattendu en Blott, le jardinier du château, cet ancien militaire Italien qui est resté après la seconde guerre mondiale au service de sa famille. Italien, ou Allemand ? Qu’importe, il a lui aussi dans l’idée qu’une autoroute traversant ses plantations n’est pas une bonne idée.
L’écriture de Tom Sharpe est dynamique. Il dresse de ses personnages des portraits caricaturaux et paradoxalement « attachants ». Du simple coup de crayon au vitriol au portrait à charge, chacun est brossé sous la plume de l’auteur en cours de projet : le vieux juge fossilisé, Lady Maud représentant le pouvoir gentleman-farmer bien encré dans son comté, le mari aux mœurs particulières so british, le fonctionnaire margoulin et magouilleur, le fonctionnaire tatillon dépêché de Londres parce qu’on ne le supporte plus, le jardinier ancien prisonnier de guerre italien mais né en Allemagne, la maîtresse sans cervelle, les avocats de province, ils sont tous de la partie et chacun en prend pour son grade.
Aucun des personnages n’est aimable aucun n’est haïssable. Tom Sharpe s’amuse à croquer tout un bestiaire et à stigmatiser les uns et les autres pour le plaisir, le sien et celui du lecteur.
Dans le hall d’entrée, Lady Maud, radieuse dans sa robe de coton, restait tapie au milieu des fougères. Loin au-dessus de sa tête, le lustre de verre dépoli diffusait une lueur rougeâtre au-dessus de l’escalier de marbre et ravivait l’aspect apoplectique des visages rougeauds de ses ancêtres qui, accrochés aux murs, regardaient ce qui se passait d’un air menaçant. Lady Maud tapota sa coiffure : elle était prête. Son plan était tout tracé. Monsieur Dundridge aurait droit à un traitement gracieux, au moins au début. Après, elle verrait comment il réagirait.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
En 1992, La Route Sanglante du Jardinier Blott a été adapté au cinéma sous le titre Sexes Faibles par le réalisateur Serge Meynard.
Autrement, il y a des chances que vous appréciez Woodehouse…
Les dix premières lignes...
Sir Giles Lynchwood, Député du Worfordshire Sud, était dans son bureau et s’allumait un cigare. Par la fenêtre, il pouvait voir les tulipes et les primevères en fleur, une grive picorer le gazon et le soleil briller dans un ciel sans nuages ; au loin, les escarpements de la gorge Cleene se dressaient au-dessus de la rivière.
Mais les pensées de Sir Giles n’étaient pas tournées vers la beauté du paysage. Son esprit était orienté vers tout autre chose : l’argent, Mme Forthby, et la distance entre ce qu’il était et ce qu’il aurait pu être (…)
Quatrième de couverture...
Sir Giles a un siège au Parlement, un château et une femme — mais est-ce qu’on peut appeler ça une femme ? Lady Maud a un siège au carré, un château et un mari — mais est-ce qu’on peut appeler ça un mari ? Sir Giles est impuissant ; Lady Maud n’est pas près d’oublier leur nuit de noces. Elle n’a rien d’une bombe sexuelle mais elle veut un héritier. Comment susciter une brise de désir chez son masochiste de mari ?
Chacun sa méthode. Il suffit, dans le cas présent, de faire passer une autoroute en plein cœur du domaine séculaire. Les convoitises se déchaînent alors à un rythme effréné. Les juges rescapés d’empoisonnements alimentaires piétinent leur fierté d’hier ; les hauts fonctionnaires tombent très bas ; les masos tournent sado et inversement ; les jardiniers culbutent les ladies au beau milieu des plates-bandes. Jusqu’à l’embrasement final.
Sa trombine... et sa bio en lien...
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