Je m'Appelle Reviens

Alexandre Dumal

Gallimard / Série Noire - Mars 1995

Tags :  Roman noir Polar politique Polar militant Truand France Années 1980 Populaire Argotique Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 09 mai 2007

Une dizaine d'années, la pauvreté, des parents absents, un vieil ivrogne solitaire comme "éducateur" — ou père spirituel — et, très vite, la découverte du frisson, du plaisir de voler. De ses propres ailes forcément, évidemment, mais aussi dans la caisse de la boulangère... Du coup, sa scolarité s'en ressent :

Coincé entre le parc et les stades, l'ordre et le désordre, ma scolarité eut le plus grand mal à se frayer un passage. Je calais, redoublais, calais encore. Plus on me menaçait, plus on m'excluait,plus on me frappait, moins j'avançais sur le chemin du savoir auquel je préférais celui de la connaissance. Je n'appréciais ni le maître ni la maîtresse. Je détestais leur discipline et leur morale. J'échouais lamentablement à la conquête du certif et, à cinq reprises, je changeai d'établissements scolaires, porté par le puissant courant du rejet.

Alors on décide de l'envoyer au boulot le jeunot, pour qu'il apprenne le sens de la vie. Distributeur de prospectus (qui finiront à l'égout), gratte-papier... Et là-dessus arrive mai 68...

Ainsi s'engage la vie d'Alexandre Dumal qui se livre ici à un exercice qu'on rencontre plutôt rarement sous la couverture de la Série Noire : l'autobiographie.
Car c'est bien ce dont il s'agit, de cet enfant rebelle qui va grandir en conservant sa colère chevillée au corps, de cet adolescent qui après avoir refusé l'école et son carcan, refusera le travail quand on voudra le lui inculquer en tant que valeur fondamentale.

Non, c'était décidé, je ne voulais ni collier ni laisse — il était temps que j'assume pleinement mon rôle dans le grand théâtre de la connerie humaine : voleur.

Mais voilà, le corollaire du statut de voleur, c'est la police et, au bout, la prison. Lorsque pour la première fois un juge l'y envoie, "pour réfléchir", il trouve là un terrain où parfaire ses connaissances :

En prison, on ne rencontre que quelques assassins paumés, quelques malades qui violent et des voleurs en pagaille. C'est avec eux que j'allais réfléchir. Je décidais donc de profiter de cette chance unique et je sentis que j'étais ici uniquement pour apprendre.

Alexandre Dumal, à partir de son cas personnel et de sa propre histoire, montre le cycle infernal qui conduit et ramène en prison. Comment celle-ci se fait l'école du crime et entraîne, à sa manière, vers l'escalade : vol à la roulotte, puis escroquerie, cambriole, arnaque, et enfin attaque à main armée.
Pour autant, Alexandre Dumal, tel qu'il se présente, n'est pas à ranger du côté du milieu, des truands mafieux. C'est un rebelle, réfractaire à toure forme d'autorité, viscéralement opposé à l'idée d'un travail "obligatoire", et qui, pour cela, goûtera des QHS avant de s'en sortir par l'écriture.

Une écriture à laquelle il a pris goût, s'appropriant une langue avec laquelle il joue, revisitant la syntaxe, le vocabulaire, jusqu'à trouver le mot juste.
Le récit est sans doute un peu daté (fin des années soixante-dix, début des années quatre-vingts) et sans doute la population carcérale n'est-elle plus tout à fait la même aujourd'hui, qu'on y trouve moins de gangsters à la papa comme en a rencontré l'auteur, et s'il s'essouffle un peu passé le premier tiers — dans des histoires de cavales — il retrouve tout son intérêt pour évoquer la solitude, le vide d'une vie en fuite, et les conséquences de l'enfermement.

Alexandre Dumal est de cette graine d'anars qui survivent aux années sans jamais baisser la garde ; on sait avec ce livre un peu mieux pourquoi.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Désolé, pas d'idée...
Ou peut-être, pour l'époque, pour l'ambiance, À Bulletins Rouges, de Jean Vautrin.

Le début...

Les dix premières lignes...

Par ma naissance, je suis fils de pauvres et pauvres de père en fils, mais, tout comme les aristocrates, le travail m'est une répugnance. Au lieu de cela, je voyage, je dors dans l'herbe, je lis en me berçant dans un hamac, je fais l'amour, j'écoute et je parle.
Aujourd'hui, mais j'ai mis fort longtemps, je n'éprouve plus aucune hostilité envers ceux qui m'ont obligé de travailler, je me contente de le regretter, car je préférerais qu'ils se promènent. J'ai remarqué très tôt, trop tôt peut-être, que le travail c'est surtout de la fatigue (...)


La fin...

Quatrième de couverture...

"Vous êtes condamné au travail salarié !"
J'avais à peine quinze ans quand le "gomme-misère" du peuple m'a signifié la sentence, mais, franchement, j'me voyais pas avec un patron et des collègues, à me fader chaque jour de la semaine, presque à perpétuité... Ça m'a foutu tellement la trouille que ça m'en a donné des ailes — Pégase du crime — j'me suis mis à voler, voler, voler... Jusqu'au jour où je suis tombé. Patatrac ! La gueule dans le caniveau. Et j'peux même dire que j'suis tombé de haut quand j'les ai vu se précipiter sur moi pour me lapider, avec leur farouche volonté de me briser, mais ils n'avaient pas vu que j'étais infrangible et... pas vu... pas pris !


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Alexandre Dumal










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