Ambernave

Jean-Hugues Oppel

Rivages / Noir - Février 1995

Tags :  Roman noir Polar social Polar maritime Quidam France Années 1980 Littéraire Poétique Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 31 janvier 2006

Recommandé Entre le prolos(gue) et l'épiglauque, descriptions d'un Ambernave "amsterdamisé", ce roman de Jean-Hugues Oppel n'est rien moins que 250 pages de bonheur jubilatoire.
Dès les premières lignes, vous êtes attrapés.
Quoi que l'on vous racontera par la suite, quelles que soient les salades que l'on vous servira, les personnages abracadabrantesques qu'on vous présentera, vous y croirez. Parce que l'écriture de Oppel est absolument pure et sublime.

Ambiance de port en pleine crise, clodos et autres exilés de ce monde battent le pavé en quête d'un peu de bonheur, ou simplement d'un croûton de pain ou d'un litron de rouge pour faire glisser la misère.
Emile, alias Patte folle, est un vieil homme, clochard juste avant la clochardise : il a encore une maison, lui. Un toit qu'il s'était assuré avant qu'un accident sur le bateau lui vole une moitié de jambe. Un reste d'intimité et de dignité.
Le vieil homme est malin, adroit, il sait éviter les mauvais coups et trouver les bonnes combines. Et il est passionné de Steinbeck. Dans la poche de sa redingote crasseuse, il y a LE livre : Des Souris et des Hommes. LE livre, celui qui détient la vérité, surpassant largement la Bible pour ce qu'Emile en sait.
Emile un soir déniche dans un hangar un colosse accompagné d'un chiot.
Il s'attendrit, Dieu sait pourquoi, et ramène l'homme et sa bestiole sous son toit. L'homme, il le baptise Joe parce qu'il l'imagine américain, "Johé" comme il dit avec son accent de rue. Le chien, il ne le baptise pas. Et il entreprend de les nourrir tous les deux.
Un lien subtil se tisse entre le clochard et son protégé, un lien de crainte, de monologue, de tendresse profonde. Au-delà des mots.
Le colosse ne parle pas. Il préfère cogner. Enfin, de temps en temps.
Quand il se sent agressé, quand on embête son chiot, quand quelque chose d'incompréhensible va chatouiller le fond de sa mémoire et fait remonter des souvenirs destructeurs.
Et puis tout autour d'eux, Emile, Johé, le chien, il y a quand même le monde qui continue à tourner, les marins qui continuent de faire la grève, le croque-mitaine du port qui continue à casser des passants en mille morceaux.
Il y a aussi Monsieur Wong, chef de la pègre asiatique locale, inquiet de l'impact des carnages périodiques sur ses affaires.
Quelques flics également, un fonctionnaire de mairie qui vient expulser Emile, une maison close, des rades, des rues sombres.

L'écriture de Oppel, plus que toute autre chose, fabrique une ambiance. Elle est fluide comme une rivière, généreuse comme un champ de blé, riche d'adjectifs, de descriptions, sans jamais trop en faire. Les dialogues sont de véritables perles, jargon dur et parfois embrouillé d'Emile, où perce la fragilité de l'homme en marge.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Pas d'idée... Si ce n'est, peut-être, une exploration plus poussée de ce même auteur.

Ambernave a reçu en 1995 le Grand Prix de littérature policière.

Le début...

Les dix premières lignes...

Dans le port d'Ambernave, il y a des marins, ce qui en soi n'a rien d'étonnant.
Dans le port d'Ambernave, il y a des marins qui ne chantent pas, parce que le cour n'y est plus. Parce qu'ils n'ont plus de rêves. Ce qui les hante, c'est la fermeture totale des chantiers navals, le chômage, la mise au rencart. La crise. Les premiers bassins condamnés se remplissent de vase et d'algues en chevelures moribondes, ceux qui travaillent encore exhalent déjà une odeur de rouille et de désespoir mêlée aux senteurs acides des arcs électriques du robot soudeur, machine aveugle et sourde aux plaintes humaines. Un linceul d'ozone enveloppe les superstructures géométriques d'un géant des mers à l'ébauche sur sa rampe de lancement, ultime navire dont l'étrave labourera la baie au jour du baptême ; des lèvres d'écume sale se refermeront sur son sillage dans un clapot lugubre. Comme on suture une plaie (...).


La fin...

Quatrième de couverture...

Dans le port d'Ambernave, il y a des marins, ce qui en soi n'a rien d'étonnant. Il y a aussi Emile, l'ancien docker misanthrope, qui boîte et boit. Qui a trop lu Steinbeck. Qui cherche un homme sur les quais sans le savoir, au hasard de ses errances portuaires. Et le trouvera dans l'haleine glacée des brumes océanes, pour vivre enfin le livre à sa manière.
Des petits chiens et des ombres.
Un roman noir insolite et envoûtant par l'auteur de Brocéliande-sur-Marne.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Jean-Hugues Oppel










Edition(s)...

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Réédition

Du même auteur...

Bibliographie non exhaustive... Seuls sont indiqués ici les ouvrages chroniqués sur le site.

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