Piraña Matador

Jean-Hugues Oppel

Gallimard / Série Noire - Janvier 1992

Tags :  Roman d'enquête Polar social Crime organisé Trafic Truand Amérique du Sud Années 1990 Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 31 août 2005

À Santa Cruz de Natividad, sur le fleuve, il n'y a qu'un bateau par mois pour embarquer et débarquer nouvelles fraîches et passagers. Jorge Luis Alfaquès fait partie des arrivants du jour qui viennent se perdre au fin fond de la jungle amazonienne. C'est une espèce de mercenaire, attendu par un nervi tout de blanc vêtu, un peu anachronique dans l'atmosphère étouffante, homme de confiance de Don Armando de Cristobal y Majorca.
Dans l'air moite et collant, Jorge Luis décline l'invitation du larbin à rejoindre illico son maître et préfère se chercher une chambre. Il va tomber, entre deux mauvaises quintes de toux dues au crabe qui lui bouffe ce qui lui reste de poumons, sur le bordel local tenu par une caricature de mère maquerelle perdue derrière une paire de seins énormes. Va pour une chambre au bordel : un tueur à gages sur le retour peut bien s'en contenter...
Santa Cruz a connu une nouvelle jeunesse lorsque la mine de diamant a ouvert à proximité, attirant son flot de miséreux grattant la terre après avoir récolté le caoutchouc des arbres et l'ensemble de la nébuleuse qui va avec : marchands de sommeil, flics véreux, joueurs, souteneurs, trafiquants en tous genres... Un territoire avec à sa tête le fameux Don Armando ; une ordure selon Emilio Marguliès, le syndicaliste local qui tente, avec ses maigres troupes et sous la surveillance rapprochée du boss, de faire respecter quelques maigres droits. Emilio est un parleur, un négociateur, quant à Mendoza, dit "l'indien", son adjoint, il pencherait plutôt pour la manière forte : il a compilé ses lectures de jeunesse et en a fait un amalgame révolutionnaire d'où ressortent guérilla urbaine, explosif, pain dans la gueule, autogestion... mais pas négociation. Le troisième larron, le plus réfléchi, mais doté d'un charisme d'huitre, s'appelle Escobar...
Jorge Luis finit enfin par rencontrer son commanditaire (Don Armando) qui lui désigne sa cible : Marguliès. Il est temps, pour le représentant de la compagnie minière, de ramener les espoirs ouvriers à un niveau acceptable, celui de la peur...

Jean-Hugues Oppel nous présente une lutte syndicale exotique, perdue au milieu de nulle part, mais respectant à la lettre les principes fondamentaux de cette comédie : les sans grades, les gratte-misère, face à l'écœurante supériorité de leurs patrons. Les manœuvres des uns envers les autres, les petites et les grandes trahisons :

Pouvoir de l'argent, faiblesse de l'idéal, le système a fait ses preuves, et n'est pas prêt de se casser la gueule.

Viennent se mêler à la fête, un tueur à gages payé pour désamorcer la révolte qui gronde, mais qui ne se laissera ni berner, ni faire, une "insurrection" autochtone qui finira dans un bain de sang, la forêt vierge, objet de toutes les convoitises, inhospitalières ; un décor en panavision...
Mais c'est aussi, toujours, sous toutes ses formes, la lutte du petit contre le gros, de l'individu face à la foule, de l'indien d'Amazonie face à la compagnie minière, d'une civilisation expansionniste contre une plus en phase avec la nature qui l'entoure, le bien, le mal, le yin, le yang, le recto et le verso, le tutti et le quanti...
La vie quoi, avec personne pour gagner la partie, dans une atmosphère où la sueur coule à flot...


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Jean-Hugues Oppel a la réputation de se renouveler de roman en roman sans jamais vouloir exploiter un filon porteur ; c'est donc au coup par coup qu'il convient de l'apprécier. Toutefois, n'hésitez avec French Tabloïds, c'est un travail remarquable... de mauvaise foi (?)

Le début...

Les dix premières lignes...

Entre le gros ragondin qui creuse près du manglier et l'embout de la sarbacane, il y a comme un fil tendu qui les lie l'un à l'autre. Une droite immatérielle, une route pré tracée dans l'espace, un rail invisible pour guider la fléchette emplumée porteuse de mort que va souffler le chasseur. Quand l'arme et la proie se confondront dans sa volonté, annihilant la distance et le temps.
Le rongeur interrompt soudain son travail de terrassier. Se redresse, les narines frémissantes, les moustaches en alerte. Le chasseur souffle (...).


La fin...

Quatrième de couverture...

À Santa Cruz de Natividad, la Mort vient toujours par le fleuve. Avec les ouragans et les cyclones nés au large de l'océan, les piranhas voraces rôdant entre deux eaux, les pirogues des champions de la fléchette au curare, les nefs des conquistadores aux chimères assassines et des trafiquants d'âmes missionnaires...
Un jour, Jorge-Luis Alfaquès est arrivé à Santa Cruz de Natividad. Par le fleuve.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Jean-Hugues Oppel










Edition(s)...

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