Baleine - Mars 2012
Tags : Polar fantastique Quidam Littéraire Moins de 250 pages
Publié le : 12 mai 2012
1948. Polmo a "raté" sa guerre ; quatre ans d'Offlag, pas un coup de fusil de tiré. Alors il a rempilé, prêt à en découdre avec les cocos du côté de l'Asie pour n'avoir su contrer les fachos sur la ligne Maginot.
À Marseille, en compagnie de Fifi et d'une flopée d'engagés volontaires, il embarque à bord du Cap Tourane, direction l'Indochine.
Le voyage n'est pas de tout repos, le rafiot en mauvais état, et lors d'une escale technique à Port Saïd, Polmo récolte en une seule tournée l'amour et une chaude-pisse carabinée. C'est heureusement la première, Zeinab, qui l'accompagnera le plus longtemps, en pensée.
Arrivé à destination, Polmo découvre une inorganisation totale et des militaires qui se comportent comme des colons en goguette, méprisant autant les Vietnamiens qu'ils viennent "sauver" que les Algériens qu'ils ont sous leurs ordres.
C'est une armée de pacotille, mais au sein de laquelle Polmo voudrait briller, pour l'honneur. Malheureusement, les seules zones où l'on montre un peu d'efficacité sont la buvette, le bordel de campagne et la fumerie d'opium. Aucun contact avec l'ennemi, sinon celui de l'intérieur ; Polmo se lie d'amitié avec un aumônier au cynisme de circonstance :
Avec des bleus comme toi les ronds-de-cuir de l'état-major peuvent se friser les moustaches ! Une tour par-ci, un cheval par-là, ils avancent leurs pions dans le delta, les blancs roquent, les jeunes reculent et reprennent la main avant qu'on les déloge… La stratégie de l'échec. Tu n'es qu'une pièce sacrifiée, Polmo, tu es trop naïf, tu vas finir par croire au petit Jésus soviétique !
Et puis enfin une mission, une première escarmouche, un premier contact, fatal. Et c'est la grande bascule… Polmo se réveille.
À partir de là, il n'y a pas que Polmo qui bascule. Nous avons passé un gros tiers du roman et si vous souhaitez vous garder un peu de surprise, ne lisez pas ce qui suit.
Pour autant, difficile de commenter ce Aux Armes Défuntes sans évoquer le réveil de Polmo, en 2109… Le monde a changé de forme, mais sur le fond pas vraiment. Réactivé en pays de misère, dans des bas-fonds futuristes, Polmo va expier son racisme. Lui qui s'est raté sans des aspirations guerrières d'un autre siècle veut cette fois réussir la suite et se remémore à sa manière un slogan qu'il n'a pas vécu : « Faites l'amour, pas la guerre ».
Faites le sexe, pour être plus juste, le sexe comme une révolution :
Le cul demeure, pour le prolétariat et les esclaves du ghetto, le principal moteur de l'Histoire !
Dès lors, dans cette société à étage qui a banni les rapports sexuels pour la plèbe, qui a été jusqu'à éradiquer toute présence féminine dans certaines zones, Polmo se fait le narrateur/orateur des jeux de l'amour. Il embellit ses maigres souvenirs, s'en invente, pour mieux servir les fantasmes de ses compagnons d'infamie.
Aux Armes Défuntes se lit comme une fable dont les clefs sont propres à chacun. Mais les cachettes sont parfois obscures et je dois avouer mon embarras quant au découpage étonnant du récit, sa finalité. Car si Pierre Hanot écrit comme un poète écorché qui se nourrit de colère — une colère qui a du style — lorsqu'il rencontre les éditions Baleine, leur goût pour le décalage, la provocation, l'iconoclaste, le résultat ressemble à une expérience décapante dont on peine à éprouver le résultat. Une sorte de cadrage-débordement (*), certes réussi, mais dont l'issue semble incertaine.
On se demande quels sont les rapports entre les deux parties du récit (mais peut-être est-ce moi qui ai la vue basse), quel est le propos de Pierre Hanot, ce qu'il veut nous dire.
Entre le portrait colonialiste du début, avec un Polmo va-t-en guerre déçu par les défaites, puis ce monde futuriste où il se refera une "virginité" en forme de rédemption, j'ai eu personnellement beaucoup de mal à m'y retrouver.
Reste tout de même la plume de Pierre Hanot, ses sursauts hardis, son lyrisme gouailleur et sa colère, toujours intacte.
(*) : le cadrage-débordement, comme son nom l'indique, est une figure du rugby qui consiste, lors d'un face à face, à attirer son adversaire dans un "piège" en le fixant dans sa défense, avant de l'esquiver par une pirouette habile pour le déborder et filer à l'essai, ou vers le prochain défenseur.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Désolé, pas d'idée…
Les dix premières lignes...
À l'heure de la sieste, les rues étaient exsangues, Marseille ne bourdonnait plus que par son port et sur les quais, les bidasses embarquaient dans la pagaille. Peuchère, en ville la guerre aux portes de la Chine, tout le monde s'en battait l'aïoli.
À peine pansées les blessures, on venait de survivre encore une fois aux fridolins, pourquoi donc se soucier des conflits à venir, surtout pas de celui-ci, à des milliers de kilomètres, aux extrémités de l'Orient, aux confins de nulle part (…)
Quatrième de couverture...
1948, Marseille, le sous-lieutenant Polmo embarque sur le Cap Tourane à destination de l'Indochine où il rêve de se couvrir de gloire. Après une traversée rocambolesque, vient enfin l'heure du combat contre un ennemi insaisissable, dans la boue et les rizières. Très vite confronté à la réalité d'une guerre perdue et d'une cause inique, Polmo voit ses dernières illusions s'évanouir…
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...