Gallimard - Février 2010
Tags : Roman noir Psychologie Quidam Années 2000 Littéraire Moins de 250 pages
Publié le : 16 avril 2010
Marc est professeur à l’université. En plus de la littérature, il assure un cours d’écriture comme seuls ses collègues aux États-Unis en prodiguent habituellement. Depuis quelques années, il s’est découvert une facilité, une faculté, à séduire ses étudiantes et il ne s’en prive pas. Seulement là, au petit matin, Barbara, sa toute nouvelle conquête, git morte dans son lit. Comme il est méfiant, Marc va se débarrasser du cadavre plutôt que d’aviser la police de cette mort accidentelle.
Et puis, la belle-mère de Barbara fait son apparition… et Marc découvre que les femmes mûres peuvent être attirantes et beaucoup plus déstabilisantes que les petites jeunes dont il se satisfaisait jusque là. Cela n’est en rien une bonne nouvelle, fragilisant l’équilibre instable qu’est sa vie, à commencer par les relations qu’il entretient avec sa sœur, avec qui il partage la même maison au cœur de la montagne. Fragilisant également quelque peu ses certitudes, l’obligeant à se remettre en cause et à vivre ce bouleversement.
Djian n’est jamais tendre avec ses personnages, mais la vie n’est jamais vraiment tendre avec qui que ce soit. Avec Marc, Djian nous offre de nouveau le portrait d’un homme qui tente de survivre, d’aller de l’avant, en sachant qu’il sera difficile d’y trouver quoi que ce soit de réjouissant. Marc est un homme détruit, démoli, depuis longtemps, un homme qui, bien qu’ayant une situation enviable, vit en marge. En marge de la société, en marge d’une certaine morale… Isolé dans la montagne avec sa sœur, il se préserve, ou a essayé jusque là de le faire et ça n’est plus possible.
Djian n’est pas tendre avec ses personnages, exigeant, comme il l’est avec lui-même et son écriture. Lire Djian peut paraître simple mais cela demande un certain effort, il faut se mettre à la hauteur. Alors cette fausse simplicité peut dérouter mais il faut s’accrocher. Ne serait-ce que pour comprendre, dans ce roman particulièrement, où il nous emmène. Car rien n’est évident, un cadavre, une enquête de police mais aussi les tergiversations d’un homme déglingué, voilà ce qui nous est offert sans qu’on sache très bien quoi en faire…
Attention, ce bouquin est loin d’être un roman raté. À mon humble avis, c’est le doute qui en est le centre, le moteur. Le doute qui habite Marc et dont il ne peut se défaire, ce doute qui nous envahit au fur et à mesure des pages, nous demandant ce qu’il est en train de vivre et si ce qui nous est raconté n’est pas sa vision, sa version de l’histoire. Une version arrangée et dont l’une des variantes possibles est beaucoup moins à son avantage. Beaucoup plus effrayante. Qui est Marc au fond et qu’a-t-il fait ?
Alors, d’accord, ce n’est peut-être pas le meilleur de Djian, on ne peut pas tous les ans écrire Impardonnables ou Frictions, mais il faut le lire, il ne faut pas bouder le plaisir que nous offre son style. Et un roman de Philippe Djian, même moyen, est toujours un roman du dessus du panier, un roman qui vole bien au-dessus de la production littéraire habituelle, ne serait-ce que parce qu’il ne s’agit surtout pas d’un produit.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Tous les autres Djian, bien sûr. Avec quelques uns qui ressortent, comme Impardonnables, Losrsque Lou…
Allez voir également du côté de Brautigan ou Bret Easton Ellis, les parentés avec ces auteurs étant assez claires.
Les dix premières lignes...
S’il y avait une chose dont il était encore capable, à cinquante-trois ans, par un grand soir d’hiver que blanchissait la lune et après avoir bu trois bouteilles d’un vin chilien particulièrement fort, c’était d’emprunter la route qui longeait la corniche le pied au plancher.
Il conduisait une Fiat 500, au moteur fatigué, mais qui aurait sans doute eut la force de le jeter au fond de la vallée s’il n’avait gardé sur le volant une main ferme — et sur la route des yeux suffisamment ouverts.
L’air glacé s’engouffrait par le carreau baissé (…)
Quatrième de couverture...
Une Fiat 500. Au volant, Marc. A côté de lui, sa plus jolie étudiante. C’est la nuit, ils foncent chez lui finir la soirée en beauté.
Au petit matin, son goût prononcé pour les jeunes élèves de son cours d’écriture va soudain lui passer.
À cause des routes de montagne ? Du néo-conservatisme ambiant ? Des crises de sa sœur ? Ou plutôt du charme des femmes mariées ? Marc ne saurait dire. Du moins, pour le moment…
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...