Cadres Noirs

Pierre Lemaitre

Calmann-Lévy - Février 2010

Tags :  Roman noir Vengeance Quidam Années 2000 Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 20 février 2010

Chaque fois, je joue leur jeu. Une annonce ? Je réponds. Des épreuves ? Je passe les épreuves. Des entretiens ? Je viens aux entretiens. Il faut attendre ? J’attends. Il faut revenir ? Je reviens. Je suis conciliant. Avec des types comme moi, le système a l’éternité devant lui.

Le monde du travail nous concerne tous. Son emprise se fait même sentir, de plus en plus fort. Pour autant, ce n’est pas un thème si commun dans le roman policier. Donald Westlake l’avait assez brillamment exploré avec Le Couperet, la solution extrême utilisée par un chômeur pour retrouver du travail. Joseph Finder dans Paranoïa Place, son intrigue au sein d’une entreprise. Iain Levison utilise des personnages de paumés toujours laissés pour compte du monde du travail.

Côté français, après avoir dans l’ordre rendu hommage au polar et mené son lecteur dans une histoire de folie et de manipulation, c’est Pierre Lemaitre qui va à son tour voir comment on supporte l’angoisse d’une vie sans emploi. Le regard des autres, le regard sur soi et le temps pour réfléchir, Alain a tout ça, à cinquante-sept ans et une carrière de bon petit soldat en tant que DRH derrière lui. L’humiliation, le mépris, la dégringolade, tout y passe dans une première partie qui traîne un peu à mener vers la suite.

Depuis quatre ans qu’on se connaît, forcément, je considère mon conseiller du Pôle emploi comme l’un de mes proches. Il m’a dit récemment, avec une sorte d’admiration dans la voix, que j’étais un exemple. Ce qu’il veut dire, c’est que j’ai renoncé à l’idée de trouver du travail, mais que je n’ai pas renoncé à en chercher.

Car Alain, parfait prototype marié, propriétaire et père de deux grandes filles, va tout faire pour ne pas sortir du système. C’est son unique obsession, et bien sûr le point où les choses tombent dans le drame et le suspense. Comme à son habitude, Pierre Lemaitre articule ses histoires en ménageant deux ou trois rebondissements bien sentis. Juste ce qu’il faut. Cadres Noirs, comme Robe de Marié, utilise des éléments convenus (ici les magouilles d’une grosse entreprise pétrolière nommée Exxyal, le côté film d’action américain), rehaussés par la simplicité qu’il atteint parfois, et la sympathie suscitée par ses personnages. Le fonctionnement de notre société s’étale sous nos yeux, juste un peu poussé, deux fois rien, pour montrer — s’il en est besoin — à quel point nous pouvons servir de chair à canon (médiatique, économique…). Ça semble un peu facile et évident mais la piqûre de rappel se prend avec plaisir. La fin en fait un peu trop ; Pierre Lemaitre réussit mieux son coup dans la démonstration du cynisme, la tension des rapports de force.

Ce qui est difficile, ce n’est pas d’être chômeur, c’est de continuer à vivre dans une société fondée sur l’économie du travail. Où que vous tourniez les yeux, il n’est question que de ce qui vous manque.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Les romans déjà cités, à commencer par Le Couperet de Donald Westlake.

Le début...

Les dix premières lignes...

Je n’ai jamais été un homme violent. Du plus loin que je remonte, je n’ai jamais voulu tuer personne. Des coups de colère par-ci par-là, oui, mais jamais de volonté de faire mal vraiment. De détruire. Alors là, forcément, je me surprends. La violence c’est comme l’alcool ou le sexe, ce n’est pas un phénomène, c’est un processus (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

Alain Delambre est un cadre de cinquante-sept ans anéanti par quatre années de chômage sans espoir.
Ancien DRH, il accepte des petits jobs démoralisants. À son sentiment de faillite personnelle s’ajoute bientôt l’humiliation de se faire botter le cul pour cinq cents euros par mois…
Aussi quand un employeur, divine surprise, accepte enfin d’étudier sa candidature, Alain Delambre est prêt à tout, à emprunter de l’argent, à se disqualifier aux yeux de sa femme, de ses filles et même à participer à l’ultime épreuve de recrutement : un jeu de rôle sous la forme d’une prise d’otages.
Alain Delambre s’engage corps et âme dans cette lutte pour regagner sa dignité.
S’il se rendait soudain compte que les dés sont pipés, sa fureur serait sans limite.
Et le jeu de rôle pourrait alors tourner au jeu de massacre.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Pierre Lemaitre










Edition(s)...

Informations au survol de l'image...

Réédition

Du même auteur...

Bibliographie non exhaustive... Seuls sont indiqués ici les ouvrages chroniqués sur le site.

Robe de Marié