La Nuit Divisée

Wessel Ebersohn

Rivages / Noir - Avril 1993 - Traduction (anglais) : Hélène Prouteau

Tags :  Roman noir Polar politique Polar social Polar militant Discrimination Serial Killer Psychologie Afrique du Sud Années 1970 Littéraire Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 11 mars 2009

Même pour les habitants de Soweto, ces rues n’étaient pas sûres la nuit. La frustration accumulée par des millions d’insultes trouvait un exutoire dans des assassinats quotidiens.

Weizmann, le patient que les autorités viennent d’envoyer en consultation chez Yudel Gordon est un personnage étrange avec ses doigts gantés. Yudel, psychiatre de son état qui officie dans les prisons, découvre peu de temps après, auprès de son ami Freek, chef de la police, que Weizmann a déjà tué huit personnes, et sans jamais être inquiété par les autorités. Dès lors ce cas va devenir le centre d’intérêt de Yudel, au point de mener sa propre enquête sur le personnage.

Au travers des yeux de Yudel, l'auteur nous expose schématiquement la situation de l'Afrique du Sud dans les années soixante-dix. La société est scindée en trois groupes qui composent la pyramide sociale du pays : les Blancs privilégiés anglophones et un peu coupés des Noirs, le prolétariat Blanc, souvent raciste, qui parle l'Afrikaner, et les Noirs, laissés pour compte.

Jusqu’à aujourd’hui, Yudel n’avait pas spécialement remarqué l'existence du Black Social Endeavours. Comme la plupart de ses concitoyens, il vivait dans une société fermée, dont les frontières ne dépassaient pas les préoccupations étroites du groupe auquel il appartenait. Il n’avait que rarement l’occasion grâce à son travail d’aller au-delà de cette vision limitée. Il savait que ses compatriotes noirs évoluaient dans un monde totalement différent de celui dans lequel il vivait et il comprenait en partie leur souffrance, mais comme il ne les partageait pas, cela restait évidemment limité.

Weizmann, l'épicier paranoïaque, faisant bien sûr partie des Afrikaners. Il est attaché à garder ses privilèges et use de son droit de défendre sa propriété à l'extrême. Tuant en toute impunité. Et c'est bien cela que veut stopper Yudel, car il sait qu'il n'y aura jamais de fin. Mais il ne peut obliger le vieil homme à poursuivre la psychothérapie, il va donc enquêter sur lui pour trouver une autre solution.
Mais quand les services de Sécurité s'en mêlent et menacent Yudel, à mots à peine couverts, d'être considéré comme communiste s'il ne coopère pas avec eux au sujet de Weizmann, celui-ci se retrouve plongé de l'autre côté du miroir, de l'autre côté de la répression.

Le mouvement communiste était redouté dans la société dans laquelle ils vivaient. Y étaient associés les quatre-vingt-dix ou cent quatre-vingts jours de garde à vue sans avoir droit au moindre procès, les restrictions de liberté selon le bon plaisir de la police politique, les ordres d'assignation à résidence obligeant la victime à ne pas bouger de sa maison ou de son appartement, les condamnations à la prison... Peu de Sud-Africains souhaitaient se voir associés à de telles mesures.

À partir de ce moment, le roman devient vraiment politique. Et Yudel, malgré les risques encourus, s'aventure jusqu'au township de Soweto, célèbre pour les émeutes de 1976, assiste à un congrès d'extrême droite, le South African Freedom Campaign, qui l'amène jusqu'à cette scène de torture qui est, certainement, le point culminant du livre.

Un livre qui parle des peurs collectives, des peurs inconscientes d'un pays, l'Afrique du Sud, incarné par cet épicier, Weizmann. Un homme, qui part en morceaux, gangréné par une maladie qui le ronge par ses extrémités. Un homme angoissé par les dangers de la ville, des rues, par les Noirs qui errent, par les Blancs qui fréquentent ces Noirs, et par toutes les atteintes à l'ordre établi qui peuvent nuire à sa famille, à sa tranquillité. Par un monde qui change.

À découvrir vite, les livres de cet auteur se font de plus en plus rares.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Pour rester sur l'Afrique du Sud, un petit tour du côté de Deon Meyer ou Louis Ferdinand Despreez.

Le début...

Les dix premières lignes...

De l'endroit où elle se tenait aux aguets, dans l'ombre de l'enseigne d'un vendeur de voitures d'occasion, Cissy voyait très bien la porte. Elle était déjà passée devant en descendant la rue et avait vu les sacs de pommes de terre empilés contre le mur du fond et les cartons de boîtes de biscuits qui ne semblaient pas avoir été encore ouverts.
La lumière à l'intérieur tombait indirectement d'en haut, ne laissant filtrer qu'une faible lueur d'un côté de la porte. Grâce à cette lumière, elle avait pu regarder dans la pièce. Les biscuits, c'est ce qui l'intéressait le plus. Un carton de biscuits ne pèserait pas trop lourd. Si elle en attrapait un rapidement, elle courrait avec Billy jusqu'aux jardins derrière la gare et se cacherait dans les buissons. Dans un carton comme ça il y en aurait assez pour elle et Billy et il en resterait plein pour demain (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

Weizmann, petit commerçant qui tient une épicerie, vient de tuer une jeune Noire qui, selon lui, tentait de pénétrer dans sa boutique. Or, cette jeune Noire est la huitième personne de couleur que Weizmann abat dans des circonstances analogues. Et selon la rumeur publique, le petit commerçant laisserait, certaines nuits, la porte de son magasin ouverte pour mieux piéger ses "victimes"…


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Wessel Ebersohn










Edition(s)...

Informations au survol de l'image...

Réédition Réédition