Suburbio

Fernando Bonassi

Moisson Rouge - Septembre 2008 - Traduction (portugais) : Danielle Schramm

Tags :  Roman noir Polar social Quidam Amérique du Sud Années 2000 Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 11 décembre 2008

Une rue de la banlieue de São Paulo, une maison — « une merde de maison de Pollacks » —, un couple : un vieux, une vieille, qui ne se parlent plus depuis dix-huit ans. On contemple l'ennui de ce duo sans nom, sans parole. C'est long, l'ennui, morne et plat, palpable sous la plume de Fernando Bonassi. Sordide aussi…
Dans ce silence assoudissant, c'est comme un Brésil qui se livre : une petite frappe dans un café ; une lotterie clandestine ; un témoin de Jehovah esseulé (excellent) ; le voyage en car d'une illettrée ; ou ce trou dans le mur de la salle de bains qui permet au vieux d'observer en cachette sa voisine lorsqu'elle va aux toilettes, de se soulager…
Fernando Bonassi monte une succession de scènes du quotidien des vieux, comme un grand vide, parfois difficilement surmontable. On voudrait qu'il se passe quelque chose dans cette non-histoire, on espère, pour eux. On assiste à une lecture composée en noir et blanc, grise, une association de longs plans fixes, sans dialogue, sans musique. Elle est bien loin la samba… Le Brésil d'aujourd'hui n'est pas drôle…

Et puis vient le début de l'histoire, alors que l'heure de la retraite a sonné pour le vieux, qu'il a quitté pour toujours son tour et son atelier. Encore plus de temps pour picoler, pour oublier ses frustrations. Plus de temps pour mater la fille des voisins qui s'exhibe, le choque. Plus de temps pour vois la femme du voisin qui lui fait singe, absoute de son infidélité par son mari malade. Plus de temps pour se cogner à la vieille.
Le vrai début de l'histoire, c'est lorsque la petite fille qui fait disparaître la pluie apparaît :

Le vieux percevait que toute cette beauté qui s'épanouissait chez la petite fille redonnait vie au peu de beauté qui vieillissait en lui. C'était comme si cette germination de femme le faisait renaître.

Le vieux s'amourache, reprend vie, décide d'arrêter de boire, comme si enfin cette éclaircie lui donnait une direction à suivre, une forme de responsabilité.

Impossible d'aller plus loin dans cette intrigue qui n'en est pas une. Cette renaissance aura des suites bien sûr…
Il faut s'adapter, dans cette lecture, au rythme imposé par l'auteur. On voudrait que tout aille plus vite, mais Fernando Bonassi ,'est pas de cet avis. Il écrit pour montrer entre les lignes, et c'est cette lenteur qui permet d'entrevoir le paysage qui se profile à l'arrière. Un Brésil à la Lula ? Peut-être…
En tout cas, quelque chose qui n'inspire pas l'envie mais reflète sûrement, durement, une réalité. Fernando Bonassi écrit, décrit, sans emphase, de manière plate pourrait-on dire, et pourtant il y a un côté addictif à son style, sa poésie, hypnotisant, qui fait qu'on veut toujours savoir ce qui va suivre ce rien. Étonnant…
Au final, reste une image très sombre, voire pessimiste, peuplé de solitudes qui s'entrechoquent et où l'avenir est loin de se teinter de rose.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Suburbio est le premier roman de la collection Semana Negra éditée par Moisson Rouge et dirigée par Paco Ignacio Taibo II, avec un lien évident vers le célèbre festival espagnol de polar.
On attend la suite…

Le début...

Les dix premières lignes...

Premières informations.
Premières impressions du temps de cette histoire,
avant et après.
Paysage contemplé à l'œil nu :

La plaque la plus petite — « Savant Italien Émérite » — a disparu, il n'en reste que la marque. La plus grande, presque morte de rouille, ne tient au mur que par une vis. Elle grince encore aujourd'hui. Rouille. Les eaux de pluie ont répandu le jus de la rouille. C'est essentiellement ce qui attire l'œil sur ce coin de rue. La vigueur des traînées sombres. La moisissure imprimée sur le ciment. Fossile.
Pour lire l'information sur cette plaque, il faut pencher la tête, comme avec un air de méfiance : Lombroso (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

« C'est au matin d'un dimanche des Rameaux que la vieille décida qu'elle ne serait plus la femme du vieux, même pas pour une nuit de plus. Elle se leva, délivrée du poids qu'elle portait d'habitude toute la journée. Une obligation qu'elle avait oubliée mais à laquelle elle demeurait fidèle.
— Maintenant je ne suis plus ta femme.
Le vieux réfléchit un moment et dit :
— Et alors ?
La vieille dut se montrer plus explicite :
— Je ne dors plus avec toi.
Et le vieux, un peu gauchement :
— Ah ! alors c'est ça.
La vieille sortit en reculant. Comme ça, sans le savoir, elle regardait le vieux en face pour la dernière fois. Beaucoup d'années allaient passer depuis ce jour jusqu'au temps de cette histoire, mais c'était déjà comme ça. »

L'histoire d'un couple de vieux vivant dans une zone industrielle de São Paulo, lié par la rancœur et par l'échec, face à leur extrême solitude et au délitement des liens sociaux. L'histoire d'une rencontre entre le vieux et une petite fille qui vient illuminer leur vie quelques instants.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Fernando Bonassi










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