Rivages / Thriller - Mai 2004 - Traduction (anglais) : Dominique Mainard
Tags : Roman noir Polar social Trafic Discrimination Corruption Avocat Quidam Etats Unis Années 2000 Littéraire Plus de 400 pages
Publié le : 22 décembre 2007
La ville de Deaf Smith est une petite bourgade du Texas, proche de San Antonio et de Houston. Billy Bob Holland, après avoir été Texas Rangers, est avocat pénaliste. Les fenêtres de son bureau font face au tribunal et aux locaux du sherif. L’univers dans lequel évolue Billy Bob est minuscule, chacun est au courant de beaucoup. Il est aussi symptomatique de l’american way of life actuel : l’opposition riches/pauvres, l’existence des gangs, la corruption du système.
Tout débute innocemment, l’avocat est invité à un déjeuner par Earl Deitrich, l’un des hommes les plus riches du comté. Sa femme, la sculpturale Peggy Jean a été l’un des premiers amours de Billy Bob. Il conserve d’elle une vision nostalgique, auréolée des beauté et bonté qu’il lui prêtait au temps de leur rencontre. Au cours du repas, les Deitrich ajoutent un invité impromptu à leur table, Wilbur Pickett, l’ouvrier qui creuse des trous sur leur propriété et est humilié, ce jour-là. La montre ancienne, exhibée par le nabab, disparaît. Earl Deitrich accuse Wilbur de l’avoir dérobée en même temps que trois cents mille dollars en bons au porteur. Billy Bob va se charger de la défense de celui qui n’a jamais réussi qu’à rater tout ce qu’il a entreprit au cours de sa vie, la défense du pauvre face à la mise en marche d’un système judiciaire si favorable au riche accusateur, lequel bénéficie de sa haute position sociale ainsi que de l’assistance empressée et vraisemblablement acquise des services du sherif local, Hugo Roberts-n’a-qu’un-poumon.
James Lee Burke ne dresse pas une intrigue policière dans Heartwood. L’enquêtrice qui travaille pour Billy Bob, Temple Carroll, apporte des éléments qui éclairent les diverses positions. Il ne s’agit pas d’un polar au sens strict du terme, mais d’une chronique sociale. Les protagonistes sont nombreux et le narrateur omniscient passe des uns aux autres, nous faisant partager beaucoup de scènes.
Le pivot central du roman est l’avocat Billy Bob Holland — il s’agit de la deuxième « aventure » du personnage. À travers ses déplacements auprès de Wilbur Pickett et de son épouse, ses rencontres avec le sherif et le procureur, ses entretiens avec d’autres clients, se dévoile la vie de Deaf Smith. Personnage solitaire, aux prises avec les fantômes de son passé, au cœur des instants de paix bucolique qui parsèment le roman.
Les deux autres centres de gravité du texte sont les membres des familles Deitrich et Ramirez. Chez les Deitrich, on trouve le patriarche Earl qui détient l’argent, le pouvoir et la femme, le fils d’un premier lit, dévoyé et violent, dépositaire de tous les dons d’une naissance riche, l’épouse — personnage le plus énigmatique du clan car son image aveugle. Chez les Ramirez, on rencontre le frère aîné, Cholo, bébé bercé trop près du mur, membre du gang des Purple Hearts, son bras droit, Ronnie Cruise, et Esméralda sœur du premier, ex du second. Les uns ont richesse et rang social, les autres ont violence et folie.
Un pâté d’immeuble brûle entraînant la mort de quatre pompiers. Il appartenait à Deitrich. Le comptable du même Deitrich est tué par une bande de jeune latinos. Bien sans rapport, témoin bavard. Les uns se servent des autres pour leur profit.
L’univers de Billy Bob Holland s’inscrit dans cette tension. Sa profession l’amène à fréquenter élite et lie de la société de Deaf Smith.
Le roman s’inscrit totalement dans le paysage et le passé de son territoire, le Texas. Il a ses bases dans la possession des terres et de leurs richesses, dans la violence fondatrice et mythique qui a construit cette partie des États Unis. L’écriture de James Lee Burke est empreinte de nature, cette nature qui semble parfois retenir son souffle et celui du lecteur dans l’attente d’une nouvelle explosion de violence. Cette nature qui est le seul lieu où s’inscrivent des instants de paix.
Ce soir-là, Pete est moi achetâmes une barquette de poulet frit et nous nous installâmes sous un saule pleureur, sur la berge de la rivière, pour pêcher à la ligne.
Burke décrit une Amérique où la violence physique est banalisée, existe en chacun, retenue ou libérée sans l'appui d’une quelconque morale.
Dégénérescence de la société et de ses membres, qui n’épargne semble-t-il aucun des personnages — multiples — du roman. Inscription de cet univers dans un territoire sudiste imprégné de racisme et de stratification sociale. Deux éléments qui évoquent Faulkner…
Quelques pistes à explorer, ou pas...
La Rose du Cimarron (premier volume consacré à Billy Bob Holland), les romans de la série Dave Robicheaux (La Pluie de Néon, Dans la Brume Électrique avec les Morts Confédérés, Dixie City…). À vous de choisir.
Les dix premières lignes...
Il serait facile de prétendre que nous éprouvions de la rancœur à l’égard d’Earl Deitrich parce qu’il était riche. Jusqu’à un certain point, c’était peut-être vrai. Il avait grandi à River Oaks, près de Houston, dans une immense et somptueuse demeure blanche trônant au sommet d’une colline ombragée d’arbres. Par sa taille et son isolement, cette bâtisse se distinguait même de la richesse faramineuse qui caractérisait ses rares voisines. Mais la fortune d’Earl Deitrich n’était pas la seule chose qui nous dérangeât (…)
Quatrième de couverture...
Dans la petite ville de Deaf Smith, l’avocat Billy Bob Holland est amené à affronter l’homme le plus puissant de la région, Earl Deitrich. Ce dernier accuse l’un des ouvriers qui travaillent pour lui d’avoir volé une montre à la valeur inestimable et, surtout, cent mille dollars de bons au porteur. Billy Bob accepte d’assurer la défense de l’ouvrier, un jeune homme foncièrement bon et naïf nommé Wilbur Pickett. Mais il se trouve bientôt pris entre la loyauté qu’il doit à son client et les sentiments qu’il nourrit encore pour la femme d’Earl Deitrich, Peggy Jean, dont il était autrefois amoureux.
Peu à peu, Billy Bob va dénouer les fils d’une machination complexe impliquant un gang de voyous mexicains, deux criminels évadés et… un gisement pétrolifère.
Ce roman a reçu le grand prix du roman noir étranger au festival du film policier de Cognac en 2004.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...