Nord Western

Gwen Orval

Ravet-Anceau - Septembre 2007

Tags :  Roman noir Polar social Quidam Lille Années 2000 Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 27 octobre 2007

Un mercenaire rentre au bercail. Direction Lille. Retour aux sources après quatre années passées sur les champs de bataille. Marre de cette vie-là...
Dans le train qui remonte vers le nord, une rencontre. Une femme, plutôt bourgeoise, avocate, et un rendez-vous, prometteur. Mais un second passager a l'homme de main dans son collimateur : Francis Labhurne. Celui-là est flic, de l'ombre, et aurait besoin d'aide pour quelque chose de pas tout à fait légal. Mais notre homme n'est pa prêt à accepter. Il en a soupé des coups tordus.

Arrivé à Lille, il cherche à renouer avec se souvenirs : le bar des Amis, et son patron, Jean. Mais le bar est fermé, à vendre, et son ami a disparu, envoyé finir ses jours en maison de retraite par ses filles ingrates. Le mercenaire ne l'entend pas de cette oreille ; il n'est pas rentré pour découvrir un nouveau désastre. Il décide de racheter le bar, de remettre Jean derrière son comptoir — le seul endroit où il restera en vie — et de se faire aider par Isabelle, l'avocate rencontrée dans le train. Le plan est simple. Sa réalisation, un peu moins...

Gwen Orval fait dans le foisonnant, dans le dense. Nord Western est un roman de poids qui s'engage dans de multoples directions.
On y trouve avant tout un décor, celui du nord de la France, de la région lilloise, qui n'a rien d'un assemblage de carton-pâte ; celui-ci est vivant, vivant de la "misère" de ceux qui l'ont construit :

Ils (les gens du Nord) accueillent la vie de ce siècle comme une contrepartie du bonheur ouvrier du précédent. On vit des souvenirs de la ducasse, des frites et de la barbe à papa. Vous pourrez visiter d'autres trous paumés, d'autres villages de basse fosse. Jamais vous ne pourrez retrouver cette assurance d'avoir touché le fond, d'être cloîtré au chaud dans la misère.

Vient ensuite ce personnage sans nom, guerrier qui a traversé quelques champs de bataille nauséabonds — comme ceux de Yougoslavie — et souhaite aujourd'hui s'en soustraire, les oublier, se trouver un nid douillet. L'occasion lui est donnée de la trouver en aidant Jean à réintégrer son bar. Il y a là comme une manière de racheter les "fautes" qu'il a commises, d'expier des péchés dont on ne sait rien, tout comme on ne sait rien de son nom.
Cette aventure-là sera périlleuse. L'entrepreneur qui a racheté la bar est un escroc, un gars du bâtiment prêt à toutes les magouilles, toutes les spéculations, surtout les malhonnêtes.
Gwen Orval, à travers le personnage de Hunois (l'entrepreneur), met en scène le monde des chantiers du bâtiment et le recours aux travailleurs clandestins, les méthodes employées pour les exploiter, les contraindre au silence. L'analyse des situations est fine, tous comme l'est celle de l'urbanisme qui l'accompagne :

On avait voulu construire ici une ville avec un nouveau visage, la tronche moderne et indéterminée de toutes les nouvelles agglomérations. Du béton, du verre et de l'acier partout. Comme si la ville pouvait exister par elle-même, sans ses habitants. L'urbanisme à destination d'un piéton qui habiterait en banlieue, à la campagne, n'importe ou, mais pas dans cette connerie.

Mais Gwen Orval ne s'en tient pas là. Vous vous rappelez Labhurne, le flic de l'ombre, et de son affaire pas tout à fait légale ? Il sera le moyen de trouver des fonds pour financer le "rachat" en mettant en œuvre les compétences de notre mercenaire et en lui confiant la mission de retrouver la fille du directeur de cabinet du ministre de l'intérieur, mystérieusement disparue avec un monarchiste déjanté...

Gwen Orval nous promène. Son intrigue rebondit toujours spectaculairement. On suit une voix, puis une autre, mais ce dédoublement n'altère en rien l'intensité du récit, elle aurait même tendance, paradoxalement, à la renforcer, preuve d'une grande maîtrise dans la construction. Au deux tiers du roman, alors qu'on a déjà beaucoup "voyagé", on ne sait toujours pas vraiment où l'on va, sans que ce soit pour autant particulièrement gênant. L'auteur cache bien son jeu, mais il tire toujours les ficelles, et à bon escient. Du coup, on se laisse faire, en confiance.
On suit, les yeux grands ouverts, les sens en éveil, car Gwen Orval, par son écriture, son style, son propos, sait susciter l'intérêt. On en "apprend" à chaque page, passant d'un personnage à l'autre, d'une partie de l'intrigue à l'autre. Et la cohérence viendra...
Le fait que les parallèles soient faites pour se rencontrer est une constante en matière de polar. L'axiome est une nouvelle fois ici brillamment démontré.

Il y aurait presque matière à deux romans distincts dans ce Nord Western. Un pour le Nord (et son contexte social), un pour le Western (et son côté aventure). Gwen Orval a choisi de n'en faire qu'un. L'exercice était périlleux, mais le résultat est à la hauteur du danger. Un beau cadeau.

C'est Noël, me lança Michel. Tu sais, une fête avec des enfants qui reçoivent des cadeaux, des gens qui prennent un Cofidis pour oublier la misère l'espace d'un soir. Des gens heureux, tu vois à quoi ça ressemble ?


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Les Polars en Nord de Ravet-Anceau, collection dans laquelle est publiée le Nord Western de Gwen Orval, sont une mines de belles surprises. N'hésitez pas à vous laisser tenter.

Le début...

Les dix premières lignes...

Une brise fraîche me caressa le visage. Le mois d'octobre venait de se terminer et je sentais une chape de plomb se détacher de mes épaules. J'allais rejoindre le Nord, en compagnie de mon Glock 9mm et de 4000 euros.
Je reprenais la route vers Lille. Ce n'était pas qu'il y ait une lumière dans la nuit à mon intention, ou qu'une fiancée soit couchée dans un grand lit à se morfondre de mon absence... Mais, lorsque, à l'occasion de vos balades, vous ne côtoyez plus que des souvenirs et des morts, c'est qu'il est temps de changer d'air (...)


La fin...

Quatrième de couverture...

Mercenaire déchu, le héros de Nord Western veut rentrer à Lille pour se ranger. Mais sur place beaucoup de choses ont changé. Le bistro de sa jeunesse est en vente, son ami Jean a disparu, et personne n'attend plus après lui. Quand une éminence grise du ministère de l'Intérieur lui propose de reprendre du service, il ressort son revolver et accepte d'enquêter sur la disparition d'une adolescente. Son espoir : réunir suffisamment d'argent pour racheter le café de Jean.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Gwen Orval










Edition(s)...

Informations au survol de l'image...

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