La Forêt des Ombres

Franck Thilliez

Editions Le Passage - Août 2006

Tags :  Thriller Serial Killer Quidam Années 2000 Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 1er septembre 2006

David Miller est embaumeur, croque-mort comme on dit. Son métier : redonner aux défunts une dernière apparence, supportable pour les proches, maquiller la mort. Accessoirement, il écrit. Des polars, des thrillers plus précisément, avec psychopathes au menu.
Depuis quelques temps, lui et sa femme Cathy reçoivent d'étranges lettres signées Miss Hyde, une soi-disant admiratrice croisée dans un salon du livre qui déclare sa flamme à David, mais il y a comme une sourde menace qui filtre entre les lignes. D'ailleurs Cathy l'a bien senti qui surveille chaque jour la boîte à lettres, la messagerie, jusqu'à ce matin où un paquet arrive. À l'intérieur, ce test de grossesse positif qu'elle a jeté, caché à son mari - forcément, puisqu'il ne peut être celui qui l'a fait virer au bleu. Dès lors, Cathy prend peur.
Vient alors à David la proposition d'un autre admirateur, amateur de thrillers lui aussi, riche, insistant comme peuvent l'être les gens qui possèdent ce pouvoir : s'isoler et écrire pour lui, selon ses instructions. Quand on est un jeune écrivain passionné, on ne refuse pas une telle aubaine : écrire en liberté, sans la contrainte des contingences matérielles. David est tout prêt d'accepter l'offre du mystérieux Arthur Doffre, même si celle-ci lui paraît étrange...

Franck Thilliez a la faculté de happer son lecteur dès les premières pages lorsqu'il se met à raconter des histoires, à faire "bouger" ses personnages. Sans doute est-ce dû à l'étonnante proximité qu'il installe à partir des situations qu'il décrit, quotidiennes, ordinaires, avant de glisser petit à petit vers un univers loin, très loin, de cet ordinaire.
Dans La Chambre des Morts, on pouvait noter un clin d'œil à Clarice Starling, l'héroïne de Thomas Harris et du Silence des Agneaux. On pourrait penser qu'il en est de même ici avec le personnage d'Arthur Doffre qui, lorsqu'il apparaît, fait irrémédiablement penser à ce monstre défiguré dont le nom m'échappe qui poursuit Lecter dans Hannibal. Mais les influences et références sont multiples et le huis clos qu'installe Franck Thilliez n'est pas sans rappeler un certain Stephen King et son roman Shining.

David Miller est écrivain et le voilà embarqué dans une prison naturelle de son plein gré, aiguisé par le plaisir d'écrire, poussé dans ses retranchements "morbides" par un maître du jeu machiavélique.
L'exercice du huis clos n'est pas chose facile - unité de temps, unité de lieu - mais Franck Thilliez se sort magistralement de "l'écueil" qu'il s'est imposé. Il installe une ambiance et fait monter l'angoisse de main de maître, peut-être même avec une certaine jubilation, s'aidant en cela d'une technique éprouvée : chapitres courts, alternance des narrateurs.
Une écriture particulièrement fluide ; pas vraiment une affaire de style, mais une capacité à raconter, des facultés de conteur qui font qu'on se laisse bercer, mener, hanter, selon l'humeur, sans jamais accrocher.
Et puis on ne peut laisser de côté la réflexion de l'auteur par rapport à son propre travail et, par extension, au goût des lecteurs pour ce genre de littérature, la manière qu'il a de se mettre en scène dans la peau de Davis Miller dans lequel on ne peut que percevoir une sorte de double littéraire :

- Les lecteurs sont de bien étranges créatures (...). Ils s'abreuvent de sang, se délectent devant les pires atrocités que leur servent les thrillers à deux sous... tant qu'ils ne se sentent pas concernés. Ils se croient extérieurs à tout cela. Mais vous (...), vous les confrontez à ce qu'ils repoussent sans cesse, par tous les moyens. Leur propre mort, cette réalité du corps pourrissant.
- Vous savez, la mort est laide, elle répugne, elle réclame qu'on hurle quand on la croise. Moi je la contiens, j'en fais abstraction. Mais, en définitive, tout reste enfoui en moi. Alors la plume, c'est comme...
- Votre paratonnerre.
- Tu as le sens du récit, c'est évident, mais j'espère que tu seras largement meilleur dans le roman ! Comment veux-tu que je m'évade si tu me récites un baratin qui a déjà été raconté des centaines de fois, et que je connais par cœur ? Saisis l'âme, l'instant, la peur de ces personnages. Soit différent ! (...) Soit à la hauteur !

Et que ce soit Davis ou Franck, ils le sont à la hauteur. Un superbe thriller à lire dans la continuité, pour rester dans l'ambiance, sans faiblir, et qui confirme, s'il en était encore besoin, le talent montré dans les précédents opus.
S'il prenait à Franck Thilliez de composer ses romans dans une atmosphère plus "noire", de leur insuffler un dimension sociale, je crois bien qu'on toucherait alors au chef d'œuvre.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Franck Thilliez devient au fil de ses romans une des références en matière de thriller. Lisez, par exemple, si ça n'est pas déjà fait, La Chambre des Morts, tout aussi réussi.

Le début...

Les dix premières lignes...

La femme fracassa le test de grossesse contre une poutre du grenier.
Résultat positif. Son monde s'écroulait.
Tête baissée, pieds nus, elle errait sur le plancher, s'écorchant les talons sur des échardes. Peu importait le sang. La douleur était ailleurs.
Trahison.
Le vent hurlait sous les tuiles du toit, les flammes des bougies s'essoufflaient avant de s'étirer plus fines, happant les reflux d'oxygène. Sous les tourbillons invisibles, une lettre parfumée, lacérée à coups de ciseaux, sur une vieille table en bois. Une lettre d'amour. La soixante-troisième qu'elle lui écrivait (...)


La fin...

Quatrième de couverture...

Hiver 2006. Cœur de la Forêt-Noire.
Le Froid, la neige, l'isolement... Les conditions idéales pour écrire sur un tueur en série, retrouvé pendu voilà plus d'un quart de siècle.
Le Bourreau 125.

Arthur Doffre, riche héritier, vieil homme paraplégique, souhaite le ramener à la vie par l'intermédiaire d'un roman. Un thriller que David Miller, auteur de polar occasionnel et embaumeur de profession, a un mois pour écrire, enfermé dans un chalet avec sa famille, Doffre et sa jeune compagne.
Mais il est des portes qu'il vaut mieux laisser fermées... et très vite, la psychose s'installe.
Ne reste alors qu'une seule solution : combattre ses peurs, repousser la folie, grouper des maigres forces ; et affronter l'impensable...

La Forêt des Ombres, huis clos infernal, nous entraîne dans les méandres de la folie et de la perversion.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Franck Thilliez










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Du même auteur...

Bibliographie non exhaustive... Seuls sont indiqués ici les ouvrages chroniqués sur le site.

Train d'Enfer pour Ange Rouge La Chambre des Morts La Mémoire Fantôme L'Anneau de Moebius Le Syndrôme [E]