Rail Noir - Novembre 2003
Tags : Thriller Serial Killer Flic Années 2000 Plus de 400 pages
Publié le : 31 mai 2005
Suzanne a disparu, comme ça, un soir, en rentrant du labo où elle travaillait. Une épingle à cheveux, c'est tout ce que le commissaire Franck Sharko a retrouvé de sa femme, dans le parking, c'était il y a six mois...
Depuis il survit à l'absence en errant à travers ses souvenirs.
"Heureusement" il y a le boulot : Sharko est appelé dans une lointaine banlieue parisienne ; le corps de Martine Prieur, une jeune et riche veuve,
vient d'être découvert à son domicile. À son arrivée, le commissaire
constate une mise en scène terrifiante et macabre : le cadavre a été
décapité, la tête reposant sur le lit, les yeux arrachés puis remis en
place dans leurs orbites, le reste du corps, nu, ligoté à n'en plus
finir, lardé d'entailles, est suspendu à deux mètres du sol par un
complexe système de crochets, de cordes et de poulies. Une première et
rapide analyse fait apparaître un tueur d'une froideur exceptionnelle ;
aucune précipitation dans la mise en œuvre de son crime, une
préparation et un matériel conséquents, une absence de violence à
caractère sexuel : on a affaire là a un "artiste" qui a voulu exposer
son œuvre de mort au regard de tous. Ça sent le défi à plein nez...
Le plus intrigant dans ce début d'enquête reste que le cinglé qui est
derrière tout ça ait pu résister à ses pulsions sexuelles : en général,
ce genre de crime fait appel à des fantasmes et qui dit fantasmes, chez
M. Toutlemonde, dit sexe...
De retour chez lui, Sharko croise sa vieille voisine guyanaise, Doudou Camélia, qui pratique une sorte de vaudou et lui a toujours confié sa certitude que Suzanne était toujours en vie. Elle l'apostrophe au passage : "Je sens le mauvais dans ta chamb'e, Dedou, le t'ès mauvais".
La prédiction s'avère fondée puisque Sharko découvre dans sa messagerie
un mail du tueur lui détaillant la lettre qu'il vient d'envoyer à la
mère de sa victime, revendiquant son crime et retraçant l'agonie de
Martine Prieur.
Franck confie le mail ainsi que la photo incongrue qui l'accompagne à son ami Thomas Serpetti, un as de l'informatique qui a fait fortune au moment des "start-up" et a su se retirer, la bourse bien remplie, avant que la "bulle" n'explose, contrairement à beaucoup. Il cherche à remonter jusqu'à l'expéditeur,
mais la piste est brouillée. Par contre, il semble bien que la photo
soit cryptée et qu'elle cache autre chose que ce qu'elle veut bien
montrer...
Dès l'ouverture de ce roman, on s'attache très vite à ce commissaire en
souffrance, confronté à la disparition inexpliquée de sa femme et à
l'ignominie d'un tueur sadique et machiavélique. Les phrases, joliment
tournées, sonnent juste et la petite galerie de personnages secondaires
qui accompagnent le commissaire respire l'humanité. Franck Thilliez
nous offre pour commencer une plongée dans le monde de l'investigation
scientifique et de ses différentes branches : biologie, toxicologie,
morphologie, anthropologie, toutes y passent, l'autopsie, les
empreintes digitales, la traque informatique, la cryptologie... Mais
jamais la technique ne l'emporte sur l'humain ; les nombreuses
descriptions n'empêchent pas qu'on ait affaire à des êtres sensibles,
eux aussi confrontés à la douleur et à l'horreur. Pas de voyeurisme non
plus, l'auteur réussit parfaitement à éviter l'écueil. Les scènes
d'horreur participent au récit mais elles ne sont pas particulièrement
mises en avant. Elle sont juste nécessaires à la bonne compréhension.
Franck Thilliez montre une fascination pour l'investigation scientifique de la police :
Sur une scène de crime, un échange s'opère entre l'assassin et les éléments invisibles qui constituent l'espace ; le tueur abandonne un peu de lui-même et emporte avec lui une infime partie de l'endroit où il se trouvait, sans qu'il ne puisse rien y faire. C'est sur cet échange que nous devons investiguer
Fascination qu'il tempère et laisse
respirer son récit par quelques touches déroutantes d'irrationnel. Mais
si sa documentation est immense, son imagination est foisonnante. Son
intrigue nous entraine dans un voyage au pays des pervers, dans les
milieux sado-maso du Paris nocturne, ceux qui ont pignon sur rue, ou
pire encore, ceux qui se cachent derrière la Toile.
Dans un style travaillé où il fait preuve d'une science consommée de
l'adjectif juste, Franck Thilliez construit une intrigue diabolique, à
la logique implacable, mêlant l'horreur, l'ignoble, avec une rigueur
toute scientifique pour atteindre son but : nous faire frémir sur les
dangers de l'Internet. Une vraie réussite...
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Retrouvez Franck Thilliez sur son site "Auteurs du Nord" qui vient de faire peau neuve. C'est une mine de renseignements concernant la police scientifique, mais vous pourrez également y tester vos connaissance en la matière à travers un quizz polar, dialoguer avec l'auteur ou avec les membres du forum... Une visite s'impose quoi !..
Les dix premières lignes...
La pluie chaude d'un orage d'été attaque avec caractère les pavés
glissants du Vieux Lille. Plutôt que de chercher un abri, je préfère
contempler les traits d'eau qui s'engagent dans les sillons des tuiles
ocre, s'accrochent aux gouttières en perles d'argent pour venir ensuite
danser au creux de mes oreilles. J'aime humer ces odeurs de briques
anciennes, de greniers et de fourre-tout. Ici, dans ce silence de bulle
d'eau, tout me rappelle Suzanne, cette ruelle que je remonte, forme le
couloir du temps qui me mène à elle. Je tourne rue des Solitaires et,
juste après l'angle, m'engouffre dans le Némo où je commande une bière blanche de Brugges (...).
Quatrième de couverture...
Depuis six mois que Suzanne a disparu, le commissaire Franck Sharko erre dans un monde peuplé de ténèbres.
La découverte d'un cadavre cruellement mutilé, en une mise en scène
défiant l'imagination, va le propulser au cœur d'une implacable
machination meurtrière. Un voyage hallucinant et halluciné, des
carrières granitiques bretonnes aux sordides backrooms sadomasos de
Paris...
Tapie dans l'ombre de la Toile, serait-ce la résurrection de l'Ange rouge, cet esprit machiavélique qui mène la danse à un train d'enfer ?
Et ce n'est pas Poupette, sa loco modèle réduit, seule encore à apaiser ses tourments, qui pourra lu indiquer la voie...
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...