Le Silence selon Manon

Benjamin Fogel

Rivages / Noir - Avril 2021

Tags :  Roman noir Polar politique Polar social Discrimination Quidam France Années 2020 Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 1er octobre 2024

Après avoir exploré les « bienfaits » de la transparence numérique au milieu du XXIe siècle dans son premier roman (La Transparence selon Irina), Benjamin Fogel revient dans un quasi présent (nous sommes en 2025) afin de développer autour des prémices qui ont permis l’émergence de cette organisation de la société.
Et il prévient d’entrée : une partie de son récit repose sur des faits bien réels.

Mars 2025, Juliette Gosset, jeune femme de vingt-deux ans, blogueuse cinéphile à ses heures perdues, se suicide après avoir été prise pour cible sur le net par une meute de harceleurs suite à un de ses articles.
Sébastien Mille, enquêteur quinquagénaire dans les services de renseignements, s’intéresse à cette affaire qui met en avant le rôle des « incels » (les célibataires involontaires), un groupe d’hommes persuadés que la libération des femmes a rendu leur vie impossible.
À leur tête, un certain KenKillER, dont le fonctionnaire aimerait bien casser l’anonymat derrière lequel il se cache pour sévir. Et pour ça, il lui faudrait pouvoir infiltrer les réseaux de diffusion afin d’enrayer le carnage qui se prépare, à l’instar de ce qui s’est déjà passé aux États-Unis.

Kahina Val est la compagne de Yvan Langalter, leader du groupe Signicant Youth, figure de proue du mouvement féministe Neo Straight Edge qui s’oppose frontalement aux masculinistes.
Lors d’un concert dans la banlieue parisienne, une vingtaine d’ultras incels se préparent à faire irruption dans la salle armés de battes de base-ball. Ils ont été repérés à l’extérieur, mais aussi sur leurs fils de discussion, infiltrés par les membres du mouvement Neo Straight Edge. L’altercation a cependant lieu. Kahina, la compagne d’Yvan est légèrement blessée et Simon de Christo, le frère du chanteur, en ressort souffrant d’acouphènes sévères suite à un coup reçu.

Intervient ensuite Tristan de Largile, connu dans le monde des incels sous le pseudonyme de Mialek ; c’est lui qui a agressé Simon et Kahina lors du concert. Puis Iris Velba, compagne de Simon ; c’est elle qui a infiltré les réseaux incels, les intralluces, et qui décide de traquer Mialek. Manon Parvel enfin, meilleure amie d’Iris, qui souffre de surdité et doit consulter Kahina, neurologue.


Comme dans le premier volet de sa trilogie, Benjamin Fogel choisit un format choral pour tenir son récit, alternant les personnages, les points de vue, les façons d’aborder son sujet de fond, un procédé qui lui permet d’ailleurs de mieux le cerner.

Du côté des « méchants », agissant sous couvert d’anonymat, on a affaire à des monstres, mais qui se révèlent des agneaux perdus dans la vie réelle. Quant aux « gentils », ils sont beaux, jeunes, riches, instruits, intelligents, mais aussi arrogants et égoïstes, et se confrontent à ce qu’ils considèrent comme la bêtise. Mais sont-ils pour autant heureux ? Pas sûr tant sont compliquées leurs relations, biaisées par leur ego centrisme.

Benjamin Fogel situe son roman au temps des prémices qui ont conduit à l’élaboration du système de transparence, sujet au cœur du premier chapitre de sa trilogie. Trente ans avant ce dernier, un évènement vient interroger la société et finit par susciter un débat sur l’anonymat lié à l’utilisation des réseaux sociaux qui gangrène les rapports humains.
La réflexion est globale, intelligente, et oublie le manichéisme pour explorer toutes les facettes du « problème ». La multiplication des personnages permet d’être dans tous les « camps » à la fois.
Autant j’avais été quelque peu dérouté par le style « essayiste » de La Transparence selon Irina, autant dans ce second volet l’auteur emprunte un schéma beaucoup plus classique et séduisant, en tout cas moins « exigeant » et plus fluide.
Le propos est bien sûr social et politique, mais Benjamin Fogel n’en oublie pas de l’intégrer, de le mêler même, à une intrigue solide. Seul bémol personnel, le dénouement du roman et une impression d’inachevé, de « décalé », tant celui-ci ne se révèle pas à la hauteur du reste du texte. Mais je vous laisse juger sur pièce.

La littérature, le roman noir, questionne notre époque, nos relations humaines, mettent en lumière leurs défauts, leurs travers, proposent parfois des ouvertures à défaut de solutions. La trilogie de Benjamin Fogel est à classer indéniablement dans cette catégorie que peu d’auteurs parviennent à intégrer.
Le Silence selon Manon complète intelligemment La Transparence selon Irina, et on reparlera bientôt du dernier volet de cette trilogie, L’Absence selon Camille.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Vous l’aurez compris, si Le Silence selon Manon apparaît comme un « préquel » du premier épisode de la série, c’est qu’il convient de le lire au préalable, même si La Transparence selon Irina peut paraître plus « ardu » de prime abord.

Le début...

Les dix premières lignes...

L’attentat de l’Absolute Club est une attaque terroriste masculiniste perpétrée en France le 13 juin 2025 dans la salle parisienne du même nom, lors d’un concert du groupe de rock Significant Youth, réputé pour ses prises de position féministes.
Vers 21 h 15, Kris Terneuil, un homme de 32 ans, a ouvert le feu dans la foule et fait cinq victimes, dont un gardien de la paix, Hamid Rechani. Il a été tué une quinzaine de minutes plus tard par les forces de l’ordre.
Dans un communiqué posté sur un forum avant de lancer l’assaut, Kris Terneuil explique avoir agi pour dénoncer le mépris des femmes à l’égard des hommes. Se revendiquant du mouvement incel — pour involuntary celibates, ou célibataires involontaires en français —, Kris Terneuil, sous couvert d’anonymat, harcelait depuis plusieurs années des personnes en ligne…


La fin...

Quatrième de couverture...

Le harcèlement en ligne a pris de telles proportions que la police y consacre de plus en plus de moyens. Le commissaire Sébastien Mille, spécialiste de ces questions, s’intéresse de près aux manœuvres des masculinistes qui se réunissent sur des forums où ils déversent leur haine des femmes.
À Paris, les musiciens de Significant Youth sont agressés lors d’un concert par une poignée d’incels, ces célibataires involontaires qui détestent les valeurs humanistes et féministes défendues par le groupe. Cet épisode n’est que le prélude à un attentat beaucoup plus violent qui va bouleverser la vie du leader Yvan, de son frère Simon et de leur entourage. Il faudra à Sébastien Mille une obstination hors du commun pour identifier les coupables, d’autant plus insaisissables qu’ils savent être furtifs…


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Benjamin Fogel










Edition(s)...

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Réédition Réédition poche

Du même auteur...

Bibliographie non exhaustive... Seuls sont indiqués ici les ouvrages chroniqués sur le site.

La Transparence selon Irina