Les Terres Animales

Laurent Petitmangin

La Manufacture de Livres - Août 2023

Tags :  Psychologie Quidam Futuriste Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 19 décembre 2023

C’est un coin de campagne reculé, un massif, qui a connu dix Fukushima. Irradié, contaminé, condamné ; une zone morte. Pourtant, ils sont quelques-uns à vivre toujours là. Certains pour l’argent, dédommagés par le gouvernement pour occuper le terrain ; d’autres, comme Fred et Sarah, pour honorer le souvenir de disparus. Vic, leur fille emportée par la maladie, repose dans le cimetière du village.
Ils sont un petit groupe, réduit à sa plus simple expression. En dehors de Fred et Sarah, il y a là un second couple, Lorna et Marc, et enfin Alessandro. Leurs seuls voisins sont à une quinzaine de kilomètres : un groupe de petits vieux qui eux non plus n’ont pas voulu quitter leur région, leur histoire. Ils seront rejoints bientôt par une famille d’Ouzbeks délogés de leur refuge par les intempéries, ouvriers survivants des travaux de déblaiement de la centrale endommagée.
Les besoins ont été réduits à l’essentiel. On récupère l’eau de pluie, on cultive le minimum sur les parcelles les plus épargnées par la radiation, on élève quelques poules recluses dans des poulaillers protégés.
Les autorités ont bien tenté de les déloger, par la persuasion d’abord, par la force ensuite, mais ils ont tenu bon, porté par la détermination de Sarah qui refusait d’abandonner sa fille. Alors la zone contaminée a été clôturée, électrifiée ; suffisamment étendue pour leur laisser de quoi vivre en « pillant » les réserves laissées sur place lors de la fuite.
Leur perspective, c’est trois ans. Elle n’est pas clairement exprimée, juste acceptée. Une vie en combinaison protectrice à l’extérieur, une vie entourée d’amis à l’intérieur. Dehors, tout paraît « normal », le mal est invisible, pernicieux, caché, à l’affût. La nature a repris ses droits, luxuriante. Il leur faut cependant garder constamment à l’esprit qu’elle reste mortelle.
Et puis il y a cette question qui revient sans cesse : pourquoi rester ?

C’est un court récit que propose Laurent Petitmangin, une histoire qui va à l’essentiel, dans une situation dystopique pas vraiment localisée, ni dans l’espace ni dans le temps, qui s’apparente à un grave accident nucléaire. Pour autant, pas d’intrigue post-apocalyptique, ce qui intéresse l’auteur ce sont les humains, leurs failles, leurs espoirs, leur essence.
En s’attachant alternativement aux différents membres de ce quintet plongé dans cette atmosphère de fin du monde, il écrit une partition aux accents humanistes.
Chacun à sa manière s’interroge. Vaut-il mieux vivre « libre » dans un monde qui pourrit sur pied, ou entravé dans une société trop policée ? Il est aussi question de l’attachement à la terre, aux racines, de l’amitié qui remonte à l’enfance, et face à ces points d’interrogation, les hommes n’ont pas toujours les mêmes réponses que les femmes.
Un événement (heureusement que je ne lis jamais les quatrièmes de couverture) viendra bouleverser le fragile équilibre de cette mini communauté et faire exploser les certitudes « recomposées ».

Laurent Petitmangin pousse ses personnages dans leurs derniers retranchements. C’est une aventure à la fois belle et triste. En précipitant leur « fin », il offre à ses protagonistes une parenthèse « (dés)enchantée » sur fond de compteur Geiger, comme un retour à l’essentiel des relations humaines, avant de fondre leur espoir dans le drame et le renoncement, puis de conclure sur un final déchirant.
Un roman pas drôle du tout…


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Désolé, pas d’idée…

Le début...

Les dix premières lignes...

Il faudrait dire le silence. Longtemps. Le silence qui éprend la crénelure des arbres. La fine dentelle de ceux-ci, bien détachée du ciel lavé, qui n’attend que le printemps pour s’enrichir et foisonner. Dans trois semaines, ces arbres seront magnifiques, débourrés d’un vert déjà strident ou encore tendre. Partout le renouveau. Partout un motif d’espoir. Pas ici.
Je marche, et je continue de me demander si je fais bien de poser mes pieds là, à cet endroit. Je cherche des traces de pas sur lesquels poser les miens, comme si c’était seulement miné. Comme si ça servait à quelque chose. Les pas d’avant n’ont pas tué la radioactivité, l’ont peut-être dispersée tout au plus, ça ne sert donc à rien, mais je le fais quand même. Il y a tellement de gestes qu’on fait et qui n’ont plus de sens. Arrivé à la maison, je prendrai le temps de les décontaminer, ces chaussures, selon un protocole qui me pèse chaque jour davantage (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

Il y avait là de petites villes avec leurs églises, quelques commerces, des champs, et au loin, la centrale. C’était un coin paisible entouré de montagnes et de forêts. Jusqu’à l’accident. Il a fallu évacuer, condamner la zone, fuir les radiations. Certains ont choisi de rester malgré tout. Trop de souvenirs les attachaient à ces lieux, ils n’auraient pas vraiment trouvé leur place ailleurs. Marc, Alessandro, Lorna, Sarah et Fred sont de ceux-là. Leur amitié leur permet de tenir bon, de se faire les témoins inutiles de ce désert humain à l’herbe grasse et à la terre empoisonnée. Rien ne devait les faire fléchir, les séparer. Il suffit pourtant d’une étincelle pour que renaisse la soif d’un avenir différent : un enfant bientôt sera parmi eux.

Laurent Petitmangin, toujours aussi bouleversant d’humanité, nous raconte les souvenirs indélébiles, les instincts irrépressibles et la vie qui toujours impose sa loi au cœur de ces terres rendues au règne animal.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Laurent Petitmangin










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