Editions de l'Olivier - Avril 1998 - Traduction (anglais) : Jean-François Ménard
Tags : Roman noir Polar social Trafic Drogue Arnaque Truand Etats Unis Années 1960 Populaire Entre 250 et 400 pages
Publié le : 24 mars 2009
Je suis toujours noir dans un monde de Blancs, pensai-je. Mais même si je ne peux pas franchir la barrière qui nous enferme, je peux réaliser mon rêve : moi aussi, je deviendrai important, moi aussi, je serai admiré. C'est simple, si je me donne le mal de devenir un vrai mac, je ramasserai une tonne de pognon. Que ce soit dans le monde des Blancs ou celui des Noirs, tout le monde est ravi de te lécher le cul quand on voit briller le fric sur toi.
Iceberg Slim est, sans doute, le maquereau le plus célèbre des États-Unis, et Pimp est son autobiographie. Ce n'est pas un hasard si beaucoup de rappeurs américains se sont affublés de pseudo tel Ice T ou Ice Cube, pour les plus connus, mais bien pour rendre hommage à Robert Beck, dit Iceberg Slim. Plus récemment, des rappeurs comme 50 Cents avouent avoir sur leur table de chevet les livres de Slim.
Cette autobiographie se présente comme le parfait manuel pour devenir mac et il est difficile d'en parler sans dévoiler quelques moments du livre et comme je n'aime pas gâcher le plaisir des futurs lecteurs, je serai plutôt concis sur ce qui se déroule.
Je serais devenu pour le reste de mes jours un de ces Noirs cireurs de pompes ou porteurs de valises, prisonniers d'un monde blanc aux murs infranchissables. Avec ma pute à la peau noire, j'étais sûr de me ramasser du fric par paquets et c'étaient les Blancs de ce monde interdit qui allaient me le jeter dans les poches.
Donc I'auteur nous raconte sa vie, de sa naissance mouvementée, sa vie de gamin, de sa mère qu'il ne porte pas vraiment dans son cœur et sur qui il se dédouane un peu, à son activité de mac et la rencontre avec son mentor. Il nous plonge dans l'univers des ghettos noirs et dans le monde de la prostitution où chaque Blanc devient un pigeon à alléger de quelques billets.
Ce qu'on peut reprocher au récit, et qu'on retrouve surement dans la plupart des autobiographies, c'est l'enjolivement de la réalité, c'est normal on le fait tous même inconsciemment. Iceberg Slim se présente comme quelqu'un doté d'un intellect supérieur à la moyenne, mais qui bizarrement tombe dans quelques pièges grossiers, et dont l'intelligence ne transparait pas vraiment au fil des pages. De même, on peut douter de sa haine clamée des femmes par laquelle il justifie son activité, mais aussi que les événements se soient si facilement enchaînés pour Iceberg Slim dans la création de son "écurie" et la facilité des filles à venir "travailler" pour lui. Donc si on passe sur le côté autobiographie et qu'on se contente d'un roman inspiré sur la vie de l'auteur, ce livre est un témoignage éloquent et sans concession sur une époque, un pays et une ville : Chicago.
Le racisme est persistant dans la ghettoïsation des Noirs, malgré des mouvements de protestation et les envies d'émancipations de la population noire, pour qui les seules voies de sortie semblent être les économies parallèles (drogue, prostitution, vol). L'ambiance générale de l'époque rappelle les livres de Donald Goines ou Clarence Cooper Jr, voir de George Pelecanos.
En fait, ces salauds de Blancs n'avaient pas libéré les nègres. Les grandes villes ressemblaient aux plantations de coton du sud. Les oncles Tom serviles continuaient d'accomplir les besognes les plus dures et les plus répugnantes pour le compte des Blancs. Ces nègres lucides, les héros de ce temps-là, hurlaient comme des mômes en colère : ils voyaient les Blancs qui continuaient à baiser les jolies Noires, comme aux temps des plantations. Et les filles étaient des idiotes. Elles s'envoyaient en l'air gratuitement avec les Blancs. Elles ne se rendaient pas compte de tout le fric que pouvait leur rapporter leur gros cul noir et voluptueux.
Un livre qui malgré ses défauts reste une référence à côté de laquelle il serait bon de ne pas passer.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Si vous avez aimé ce livre, il faut absolument vous plonger dans l'œuvre de Donald Goines si ce n'est déjà fait, ou bien, enchaîner sur les autres livres d'Iceberg Slim.
King Suckerman de Pelecanos est une autre voie possible.
Les dix premières lignes...
Elle s'appelait Maude et m'avait mise dans son lit en 1921. Je n'avais que trois ans. C'est ma mère qui me l'avait dit, et chaque fois qu'elle me le racontait, sa rage, son indignation semblait aussi intenses, aussi vives que le jour où elle avait surpris cette femme qui haletait et gémissait, au bord de l'orgasme, ma tête minuscule coincée entre ses cuisses d'ébène, ses mains puissantes serrées comme un étau autour de mon crâne.
Ma mère travaillait dur dans une blanchisserie où on lavait le linge à la main. Ses journées étaient longues et elle avait engagé Maude comme baby-sitter à cinquante cents par jour. Maude était une jeune veuve. Étrangement, à Indianapolis, dans l'Indiana, elle avait la réputation d'être une fervente "Holy Roller", ces excités qui prient Dieu dans des transes collectives (…)
Quatrième de couverture...
Iceberg Slim, alias Robert Beck, est le proxénète le plus célèbre des États-Unis. Pimp, qui raconte en détail sa carrière de maquereau, est un livre cru, qui sent la sueur, le sexe et les parfums lourds. C'est un document unique sur les bas-fonds de l'Amérique noire et blanche, sa beauté sauvage et son abjection. Publié en 1969, il est toujours le livre de chevet de toute une génération d'étudiants et de rappeurs.
« Les livres d'Iceberg Slim présentaient les Noirs comme des êtres humains et nous rendaient notre dignité. Avant d'avoir entendu parler des Panthers, Iceberg Slim m'a fait comprendre qu'il était important d'écrire sur les ghettos. »
Sapphire
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...