Le Pacte Rouge

Un avis personnel...

Publié le : 30 juin 2005

Capitaine des pompiers, Fabio Pazzonni est en mission de sauvetage. Un attentat vient de réduire en poussières le centre des impôts du 8ème arrondissement de Marseille et les secours captent un signal de détresse provenant des sous-sols du bâtiment. Il faut agir vite, malgré les risques, malgré les nappes de gaz et Pazzonni intervient avec deux de ses hommes. Ils découvrent le gardien de nuit mais, sur le retour, sont happés par l'explosion. Personne n'en réchappera...
Paul Cabrera est lieutenant de police à la BAC Nord de Marseille. Il est aussi le neveu de Fabio et assiste à ce titre à la cérémonie officielle rendue en hommage aux soldats du feu morts au combat.
C'est au juge Van Bruge, spécialiste parisien de la cellule antiterroriste de la DNAT qu'a été confiée l'affaire et la Chancellerie escompte bien que celle-ci soit bouclée au plus vite, d'autant que le second tour des régionales approche et qu'il serait de bon ton de couper l'herbe sous le pied à tout commentaire émanant du Front National.
Malgré tous les moyens mis à sa disposition, le juge Van Bruge n'avance pas. Il a ratissé les habituelles pistes terroristes : basques, bretons, mouvances Al-Qaida et bien sûr les corses, mais toutes ont été écartées. Aucune revendication n'a été formulée. Il décide de reprendre son enquête par le terrain et contacte officieusement la BAC de Marseille ; la préparation d'un tel attentat demande des contacts locaux, des repérages minutieux et tout ça laisse des traces. Il espère obtenir quelques indices à travers les hommes de terrain de la Brigade Anti Criminalité. C'est ainsi que le lieutenant Cabrera se trouve mêlé à l'enquête sur l'attentat et indirectement à celle sur la mort de son oncle, son idole de jeunesse. Il commence à ratisser du côté des cités et dans le milieu marseillais.
Parallèlement, la DNAT poursuit ses investigations et découvre parmi les décombres un document miraculeusement épargné qui les guide vers une grande banque d'affaire londonienne. La piste est plus que mince, mais le jeune Reichman, assistant de Van Bruge, s'en saisit et commence à tirer sur ce petit bout de commencement d'indice...

Olivier Descosse nous entraine dans une double enquête, qui bientôt se triplera avec l'arrivée de la fille adoptive du pompier, elle même avocate. D'un côté, un lieutenant de police taciturne, Paul Cabrera, en but à l'autorité de sa hiérarchie, aux méthodes parfois "limites", une "véritable guerrier urbain, précis, efficace, respecté", de l'autre, Marc Reichman, jeune juge ambitieux, sûr de lui, plus habitué à son clavier d'ordinateur qu'au terrain, qu'aux scènes de crimes, échafaudant des hypothèses à partir de rien. Enfin, Angela, l'avocate, qui crée des liens, fouine là où personne en l'attend.
Les trois éléments fondamentaux constituant les rouages de notre justice sont ici représentés, chacun dans son approche distincte, mais chacun avance ici à son pas, de son côté, poussé par un individualisme exacerbé et des motivations étranges : comme si le flic n'avançait que pour la vengeance, pas pour l'honneur, non, juste pour la loi du Talion, comme si le juge ne poursuivait son enquête que bouffi d'ambition, pour le scoop, pour la promo, par orgueil. Quant à l'avocate, ses motivations sont plus troubles encore...
L'enquête (les enquêtes se déroule(nt) en compagnie de ces personnages. On visite les indépendantistes corses, leurs luttes de pouvoir intestines, on voyage dans les milieux criminels corses, encore eux, avant de partir à la rencontre des siciliens. On aborde quelques circuits de blanchiment d'argent sale qui retrouve ceux de la haute finance internationale... Tous ça est documenté, on voudrait le croire, mais laisse tout de même sur sa faim. On aurait voulu plonger plus profond, plus en détail, et éviter l'éparpillement pour pouvoir y croire.
À travers cette intrigue, Olivier Descosse nous décrit également une Marseille hivernale, sans chaleur, sans soleil, sans Méditerranée, sans accent, mais gangrenée par la violence, les exclusions. Le rythme est là ; l'agencement des chapitres, courts, reprenant alternativement tel ou tel personnage, y participe. L'écriture est simple, efficace, mais au fond, ce qui m'a le plus gêné dans le personnage de Cabrera, c'est son côté justicier solitaire, violent, sans compassion, sans humanité, dans lequel il m'a semblé reconnaître une idéologie où le carburant s'appelle vengeance, haine, individualisme, et prend le pas sur les institutions. Un thriller pour amateur de "brutalité".

Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

De fait, ce genre de thriller fait rarement ma tasse de thé, mais nul n'est parfait et heureusement qu'on n'apprécie pas tous le même polar. Je crois que les amateurs d'Olivier Descosse, qui n'en est pas à son premier roman en compagnie de Paul Cabrera, se retrouveront sans doute dans la lecture de Maxime Chattam.