Verticales - Septembre 1998
Tags : Polar rural Psychologie Criminel Quidam France Années 1990 Original Moins de 250 pages
Publié le : 27 septembre 2008
C’est une fille de papier Charlie. Comme elle, sous sa robe, avec ses sacrées chaussures à talons hauts qui leur font tordre le cul d’une manière toute spéciale. Elle parle pas plus. Ou ce qu’elle dit, on n’y comprend rien, ce qui fait que c’est du pareil au même. Une de tes filles de papier, sauf qu’elle est pas en papier. Voilà.
À chaque roman — dont on devrait causer un peu plus ici prochainement — Pierre Pelot pose une ambiance. À la lecture de La Forêt Muette on se dit que Comès ou Tardi pourraient mettre toute cette sueur et cette trouille en image. Il faudrait bien des dessinateurs de cette trempe pour rendre tous les fils fangeux qui rampent dans « Le Cul de la Mort, un endroit qui ne figure pas nominativement sur les cartes d’état-major ou autres ; même le très sérieux Institut géographique national a choisi, semble-t-il de l’oublier. Les relevés topographiques de niveaux l’ignorent pareillement. Ce n’est pas un but de promenade. Les chasseurs l’évitent, les pique-niqueurs et cueilleurs de champignons ne s’y retrouvent que par mégarde, après avoir perdu leur chemin, et ils retournent bien vite sur leur pas, découragés par le relief chaotique du lieu. »
C’est dans ces lieux que l’on va s’installer au creux du mystère et de la promiscuité de deux bûcherons. Pierre Pelot endosse l’habit de conteur, un conteur macabre qui branche l’ambiance de La Forêt Muette sur cette catégorie bien spéciale de films de série B des années soixante-dix qui ont quelque chose à voir avec La Colline à des Yeux de Wes Craven ; un genre d’ambiance oppressante, palpable, poisseuse et malsaine qui, sous l’horreur, explore la folie des Hommes. Faut dire que parmi ces deux bûcherons il y en a un qui a connu le maquis, puis l’Indochine… de quoi chambouler la cervelle. Alors quand une fille de magazine « jeune, blonde, vêtue d’une robe légère de tissu bleu pâle qui s’arrêtait à mi-cuisse sur ses jambes nues » se pointe dans cette forêt étrangement muette les fils se tendent à craquer.
Un livre terrible sur le comportement humain, les pulsions et la folie.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Si vous voulez encore de la forêt, il y a un très bon Stephen King, La Petite Fille qui Aimait Tom Gordon, et puis, essayez donc aussi Feux Rouge de Simenon, il y a un étrange rapport entre ces deux romans que je n’arrive pas à saisir, peut-être vous m’en direz des nouvelles ?
Les dix premières lignes...
La brume et le ciel bas installaient une fausse nuit visqueuse qui mangeait tout goulûment, la forêt comme la route. Juillet était pourri. Juin l’avait été avant. À la radio, ils parlaient de catastrophes sur une grande partie de l’Europe, de pluies diluviennes, de tempêtes, de fenaisons impossibles et de récoltes gâchées.
Ces torrents d’eau glacée n’avaient pas empêché Diên et Charlie de travailler. Les soirs, à l’abri dans la vieille fourgonnette qui leur servait de camping-car, tandis que les trombes droites frappaient la tôle et les vitres.
—Tu peux les compter, Charlie, les bûcherons dehors par un temps pareil !
Il passait le dos de sa grosse main noire de résine sur ses joues crissantes de barbe, hochant la tête tandis qu’une petite lueur de fierté éclaboussait le fond de ses yeux.
— On est cinglés, rétorquait Charlie (…)
Quatrième de couverture...
Charlie et Diên — vétéran de la guerre d'Indochine — forment un singulier duo de bûcherons.
Ils sont les seuls à accepter de travailler dans une zone de coupe dangereuse, un lieu-dit surnommé le Cul de la Mort. Cet endroit est en outre redouté pour les horreurs qui y furent commises lors de la seconde guerre mondiale. Il règne dans ce lieu, hanté par une mémoire douloureuse, un silence oppressant.
Les deux hommes vivent et travaillent là dans une perpétuelle tension. Le danger que représente leur labeur et la violence qui émane de leurs êtres créent une atmosphère lourde, presque insupportable.
Leur solitude va être rompue par l'apparition étrange d'une jeune femme. Est-ce la fameuse Dame de la Mort qui, selon Diên, apparaissait à certains soldats en Indochine ? Est-elle réelle, humaine ou n'est-elle qu'une illusion ? Elle semble avoir marché longtemps dans la forêt. Ni sa tenue légère, ni les chaussures à talons qu'elle porte à la main n'indiquent qu'elle l'a fait par choix. Elle est couverte de griffures, d'égratignures ; ses pieds sont à vifs.
Alors qu'épuisée, elle s'endort, non sans avoir dévoré la nourriture offerte par les deux hommes, ceux-ci, embrasés par cette inattendue présence féminine, vont alors se défier.
Le drame éclatera, entraînant Charlie et Diên dans un affrontement paroxystique.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...