Éditions Toute Latitude - Janvier 2008
Tags : Flic Quidam Paris Années 2000 Littéraire Populaire Entre 250 et 400 pages
Publié le : 23 janvier 2008
La Branche, Marco et Nino sont les "bras cassés" du camp de gitans dirigé par le vieux Gino, du côté de Guéret, dans la Creuse.
Lorsque arrive Pâques, une sombre histoire de vol de moutons va précipiter Nino sur les routes ; une petite cavale censée l'amener tranquillement au "vert" en région parisienne chez son oncle Robert, sauf qu'un double accident sur une départementale perdue va l'entraîner dans une aventure hors du commun.
Un double accident du genre exceptionnel… D'abord, en pleine nuit, une voiture toux feux éteints qui les fout au fossé,lui et son copain La Chance, et un peu plus loin, une 205 dans un champ avec au volant une femme, à l'arrière un bébé de six mois. La femme au volant, morte, avec une balle dans la tête, et le nourrisson, bien vivant et affamé dont Nino va bientôt s'encombrer pour rejoindre Paris…
Antonin Varenne a le goût des aventures mouvementées et il ne laisse aucun répit à ce jeune gitan — Nino Valentine — qui participe à l'entame de son récit. Avec un humour décapant et dans un style pétillant, on suit le pauvre bougre dans sa cavale grotesque, burlesque, mais aussi sanglante.
On suit, mais à distance, puisque Nino raconte à une hypothétique cousine, par le détail, ses aventures. C'est l'occasion pour l'auteur de nous faire approcher en "direct" — le style frise avec l'oralité — quelques us et coutumes du monde gitan. Et même si la famille Valentine est un peu caricaturale et passablement déjantée (Nino, Gino, Aldo… « je sais pas ce qu'on a avec les prénoms qui finissent par des zéros… »), on sent la volonté de montrer une communauté où l'honneur, la famille, la tradition, prennent des couleurs inhabituelles, et une grande tendresse pour toute sa vitalité.
Apparaît bientôt un second personnage dont la présentation alterne avec le récit de Nino. Arthur Padovani, lieutenant à la brigade des mœurs, cinquante-neuf ans, qui pour son anniversaire s'offre le luxe de sauver une petite pute — Nathalie — des griffes de ses souteneurs en la confiant à son amie Nicole, elle-même de la partie, mais côté… indépendant.
Padovani, flic obèse de cent cinquante kilos, repoussant et émouvant à la fois, personnage complexe, solitaire, monstrueux, qu'Antonin Varenne va explorer, fouiller dans ses moindres recoins, dans ses pires faiblesses…
Arthur Padovani (…) avalait toujours autant de nourriture qu'il le pouvait, dans le seul espoir qu'elle vienne un jour à manquer aux autres et qu'ils crèvent la gueule ouverte. En dehors de ça, les gns qui trouvaient les gros sympas, il leur déboîtait la tête d'une trempe.
Padovani ne fréquentait pas les miroirs : il se contentait du monde comme reflet de lui-même. La civilisation, cette boursouflure humaine aux ambitions de Miss Univers, il en vomissait de haine.
C'est l'enfant qui sera le lien entre ces deux-là, qui les fera se rencontrer… Une histoire très compliquée, impossible à raconter, mais si facile à lire…
D'autant que les rencontres ne vont pas manquer. Entre temps, Nino aura croisé quelques SDF du canal Saint-Martin (Danton, Bastille et L'Assemblée) ; puis on mettra un nom sur la "cousine", la belle Karine, elle-même co-locataire de Nathalie (la petite prostituée sauvée) ; une vieille sorcière tentera de récupérer l'enfant (son petit-fils) ; tandis que Nicole sera aussi sa grand-mère et qu'un poète « ignoré du succès » entrera en scène pour croiser le chemin d'un bellâtre de magazine à papier glacé ; tout ça sur fond d'élection présidentielle…
Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise… Antonin Varenne a cette fantaisie chevillée au corps qui lui fait construire des univers aussi savoureux qu'improbables. Ses ailleurs sont à la fois proches et lointains, facétieux, burlesques, frisant aussi avec la plus grande détresse, et assis sur une réalité jamais très éloignée — juste recomposée.
Si la première partie du roman se fait exubérante, l'histoire glisse petit à petit vers une sombre et macabre tragédie, envoûtante, déroutante, parfois dérangeante. Le Gâteau Mexicain apparaît comme une sorte de conte de fée mirifique où les princes charmants travaillent aux mœurs ou volent des moutons — voire des enfants — et où les sorcières sont très… vilaines. Mais chacun sait que les contes de fée ne sont pas faits pour les enfants.
Une approche complètement atypique du monde du polar qui confirme un auteur à suivre, de près. C'est nouveau, étonnant, intéressant, foisonnant, déconcertant, et remarquablement écrit.
On y rit, on y pleure. On y vit, on y meurt… pleinement.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Assurément le premier roman du même Antonin Varenne, Le Fruit de vos Entrailles, tout aussi (d)étonnant, quoique sans doute plus… léger.
À noter que vous pouvez découvrir le premier chapitre du présent roman (ainsi que le précédent) sur le blog ouvert à l'occasion de sa parution.
Les dix premières lignes...
Faut que je te raconte cette histoire Cousine, tout comme c'est arrivé, parce que j'en peux plus de parler tout seul. Je te jure que c'est la vérité, mais tu me crois que si tu veux, parce que je t'aime.
Je te dis, de toute façon, ça avait mal commencé.
Marco, qu'est pas futé depuis tout jeune, il s'y prenait comme un pied. Au lieu de choper les bêtes par le cou, y se marrait et y faisait la brouette avec les pattes arrière. Les moutons se sont mis à brailler tout ce qu'ils pouvaient. On n'avait pas fini d'embarquer le deuxième que la chevrotine a volé dans la bergerie, un vrai champ de foire (…)
Quatrième de couverture...
Depuis qu'une rafale de chevrotine lui a dessiné au plomb sa bonne étoile sur les fesses, tout fout le camp dans la vie de Nino Valentine.
Une voiture en flamme, une dent pourrie, un bébé rouquin… Traqué par toutes les polices et dépassé par les événements, le beau manouche se concentre sur l'essentiel : survivre. Un poète raté, un flic obèse et des putes insoumises : autant de nouveaux venus dans sa vie, parsemée de coups de feu et de couches-culottes.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...