Albin Michel - Avril 1990
Tags : Roman noir Polar urbain Corruption Flic Moins de 250 pages
Publié le : 03 novembre 2006
Décidément impressionnant cet auteur. Une découverte et un choc.C'est le deuxième roman que je lis et le remue-ménage provoqué par le premier se répète. J'avais encore en moi les vibrations de Dernière Station avant l'Autoroute, et quel plaisir de les retrouver dans L'Étage des Morts.
L'étage des morts c'est un jeu de mot foireux (dixit Pagan lui même) sur État-major. L'organe de régulation, la voix qui, la nuit, envoie les OPJ sur leurs affaires. C'est aussi le lieu du pouvoir. Souvent corrompu et qui grippe tout le système.
On retrouve dans cet opus un chef de groupe nuit, très proche de celui croisé dans Dernière Station…. Jamais nommé, on ne peut pas être sûr que c'est bien le même, mais son passé et ses caractéristiques sont si proches que l'on peut douter. Il fait penser au personnage des premiers westerns de Sergio Leone. Le cow-boy solitaire joué par Clint Eastwood dont on ne connaît pas le nom. Ce chef de groupe est confronté à la mort violente de son meilleur ami. Flic lui aussi, mais qui trempait depuis longtemps dans des trafics louches impliquant les hautes sphères du pouvoir. Confronté à sa hiérarchie, à la femme qu'il a aimé jadis, qui veut se servir de lui comme fusible, il va faire ce qu'il peut pour passer au travers de cette tempête et ne pas trahir la mémoire de son seul ami.
On retrouve les thèmes chers à Pagan : corruption des élites, amitié et désespoir. Et la rédemption, atteignable uniquement par le sacrifice ultime. Petite porte de sortie et d'évasion : la musique. De nombreuses références à Billie Holliday, Duke Ellington, Sidney Bechett parsèment les pages du roman et les notes lancinantes de cette musique nous bercent. La vie est un blues pour Pagan, et comme dans tous les blues, la fin est tragique. Toujours. Absolument.
Et la Nuit. Avec une majuscule. Tant elle est présente, tant elle colle au personnage et au roman. Quelle noirceur. Quel plaisir de s'y perdre.
La mort, comme certaines femmes et quelques hommes, ne veut pas de ceux qui l'aiment trop.
Impossible de passer à côté de cet auteur qui vous remue tripes et boyaux par son style magnifique et envoûtant. Comme je l'ai lu sur le forum, quand Pagan décrit un mec qui fait une photocopie ou prend un café, on a l'impression de lire une tragédie grecque. Si ce n'était pas déjà fait, précipitez-vous chez votre libraire préféré vous procurer ses ouvrages, et s'il ne les a pas, faites les commander, ils sont tous disponibles chez Rivages/Noir en poche.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Tous les autres Pagan, pour le désespoir et la rédemption, pour la musique, magnifique de ses mots et celle qu'il fait passer en citant les artistes de blues qu'il aime.
En janvier 2009, le roman de Hugues Pagan est adapté au cinéma sous le titre Diamant 13, avec Gérard Depardieu, Olivier Marchal et Asia Argento dans les rôles principaux, sous la réalisation de Gilles Béat.
Les dix premières lignes...
C'était un matin de décembre, un de ces beaux matins froids et venteux, avec un ciel tellement récuré de fond en comble qu'il en avait un petit air neuf et pratiquement indolore, comme bien des interventions bénignes sous anesthésie locale. C'était un nouveau ciel et un nouveau matin, mais toujours la même ville et toujours la même vieille histoire. Non loin, sans qu'on la voie d'où j'étais, la Seine crêpelait de courtes vagues grises qui miroitaient à contre courant comme autant de petits copeaux de lumière dans le soleil glacé (...).
Quatrième de couverture...
Savoir quand on a commencé à glisser, pourquoi ?.. Comment on a fini par s'y mettre pour de bon ?.. Allez savoir. Comme si on savait jamais au juste le fond des choses et de soi-même. Pour moi, je dirais la nuit de la femme sans tête. Pas vraiment sans tête, du reste, puisqu'elle l'avait bien perdue mais qu'on l'avait retrouvée. On retrouve presque tout lorsqu'on se donne la peine de chercher… De là à dire que c'est réellement ce qu'on cherchait ou que ça fait toujours plaisir, il y a un monde.
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...