Le Baiser de Jason

Laurent Scalese

Belfond - Avril 2005

Tags :  Thriller Roman d'enquête Crime organisé Drogue Flic Historique (avant 1930) Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 1er mai 2006

L'intro est sympa, et je pense que l'auteur a travaillé son sujet sur les histoires de trafic de drogue. Mais dès le premier chapitre on bute sur un ensemble de petites phrases, de mots et de situations :

En parlant du héros : "Sa propension à résoudre les affaires à sensation lui avait permis de gravir rapidement les échelons de la hiérarchie" (voilà-t-y pas qu'on est tombé sur un génie).

Un verbe : abhorrer dans "il abhorrait l'idée de s'enfermer dans un centre commercial". Abhorrer : Avoir pour une personne ou une chose une antipathie telle qu'on ne saurait la voir ou y penser sans éprouver un frémissement et un mouvement tendant à s'en éloigner ou à l'éloigner. Le héros devrait aller voir un psy pour avoir une telle abhorration des centres commerciaux !

Une expression : opiner du bonnet (désuet ?)
Des expression sorties d'un chapeau : "... le ton hargneux et l'œil torve...", ou "... un rictus colérique ...". Mais le meilleurs était pour la fin : "Vidal soutint son regard, aussi glaçant que celui d'un serpent". Tant qu'il ne s'agissait pas des mains.
Encore une autre : "Le nez du commissaire se plissa sous l'effet de l'exécration".

Un légiste sentencieux cite à notre ami commissaire (le génie censé tout savoir) tous les paramètres (que ledit génie semble justement ne pas connaître) pouvant influencer le refroidissement d'un cadavre qui vient d'être découvert. L'éternel adjoint qui râle parce que son chef lui demande de vérifier une liste de numéros de téléphone dans un calepin. Une référence à un autre bouquin de l'auteur "... qui avait aidé Saganne à résoudre l'énigme du Samouraï qui pleure".
Le commissaire héros ne pense qu'à une chose de manière quasi maladive (on l'apprend un peu plus tard) : attraper Jason. Et qu'est-ce qu'il fait alors qu'une victime d'une overdose vient d'être découverte, vraisemblablement achalandée par ce Jason ? "Cette enquête me prend la tête, si on se faisait un resto ?"
Il a quand même des faiblesses : sa fille de 14 ans qui s'est suicidée. Tous les ans il essaye d'aller la voir au cimetière. Mais l'épreuve est trop dure, alors il se prend une cuite à chaque fois...

Des clichés à chaque chapitre. Certains mots semblent sortir directement d'un dictionnaire des synonymes. Ces mêmes mots côtoient un dialogue et un récit qui se veulent "dans le coup". La cohabitation des deux donne une sensation de texte artificiel.
Certes l'auteur s'est documenté sur le monde de la drogue j'en conviens. Certes il a sans doute potassé le monde du 36 en citant le séchoir. Le monde des tontons aussi d'ailleurs, ces fameux tontons dont les flics ne révèlent jamais l'identité. Certes... Mais au total ce livre ne me fait pas vibrer, je ne suis pas ému par la tristesse alcoolique d'Eric Vidal qui pleure sa fille suicidée et qui reste fidèle à sa compagne malgré la pute au grand cœur qui lui offre son corps (gratuitement) car elle est amoureuse de lui. Fidèle aussi, malgré son collègue qui lui organise une soirée avec des call-girls (dont une qui possède la beauté froide des filles de l'Est... ce n'est pas la phrase exacte et c'est sorti du contexte, désolé. Les filles maghrébines doivent certainement sentir la vanille et les filles italiennes ont un corps exubérant je présume).

On voit (on devine) des ficelles. Un peu comme dans les films ou au bout de 15 minutes le héros est mis en grand danger de mort. Mais comme il reste encore 1h10 de projection, on se doute bien qu'il va survivre.
Jason (le méchant impitoyable) téléphone au personnage principal. Vite, ce dernier cherche à localiser l'appel qui vient... du 36. Ben oui, sauf qu'on le trouve pas. Quel suspense ! On n'a même pas droit au combiné qui pend dans le vide en oscillant encore chaud d'avoir été tenu par Jason.
Autre artifice. Un flic, dénommé Pelletier, sort avec une de ses collègues. Dans un chapitre ultérieur, la collègue vient de faire l'amour avec le méchant, sans que d'aucune manière on puisse savoir s'il s'agit de Pelletier ou pas. Quel mystère.
J'ai l'impression de lire les aventures de Rocambole (que j'ai lu, ce n'est pas une image).

Laurent Scalese est édité, a été lauréat de nombreux concours de nouvelles policières. Il le mérite certainement. Mais son univers n'est pas le mien.
Il existe d'autres auteurs de romans policiers français à découvrir. Commencer par Scalese donnerait une fâcheuse mauvaise première impression du "polar" au détriment d'auteurs que je trouve plus talentueux.

Dernière minute . On apprend finalement qui est Jason. Oui, scoop car j'ai failli ne pas finir le bouquin. J'avais poursuivi jusqu'à que ce que Jason soit démasqué afin de recueillir ces phrases et expressions savoureuses : "... ivre de rage et de révolte..." ou "Cette dureté soudaine [du visage] le rendit méconnaissable, au point que Vidal eut l'impression d'être en face d'un étranger".
À tout hasard je parcours les dernières pages en diagonale, et paf, Eric Vidal se prend un coup sur la tronche pour finalement se réveiller chez lui ! Et là gros coup de chantage : on lui propose de travailler pour l'Organisation sinon on tue sa petite amie kidnappée. Vous allez rire, c'est le chapitre juste avant l'épilogue. Et là on se dit que l'auteur nous prépare un deuxième bouquin "La Vengeance de Jason" ou "Le Masque Frappe Deux Fois", ou que l'épilogue c'est l'enterrement de la petite amie, tuée par une Pieuvre sans pitié.
Non. Eric Vidal avait simplement fait un mauvais rêve. C'est bêta.

Toi aussi, petit Kevin, lis Le Baiser de Jason et marque sur un carnet ce qui t'as bien plus dans ce livre.


Le commentaire de Geoffroy

Alléché par la critique dithyrambique de la 4ème de couverture : "Les Anglo-Saxons sont les maîtres incontestables du roman policier. Pour notre plus grand plaisir, un Français paraît capable de leur tailler des croupières : Laurent Scalèse." et aussi par son succès en librairie et le prix Sang d'Encre des lycéens 2005. Je me suis attelé à lire Le Baiser de Jason. Et là déception !
L'histoire commence par le meurtre et la mutilation d'une passeuse, le crime est signé Jason, le Commissaire Eric Vidal en est certain, il le traque depuis trois ans. C'est le point de départ du roman et de l'intrigue qui va essentiellement tourner sur le leitmotiv "Qui est Jason ?". Car il apparaît très vite pour Eric Vidal que Jason est renseigné par un flic, peut-être même que lui-même est flic.

Le début de intrigue, sans être originale, est prometteuse. Malheureusement si les courts chapitres donnent un certain rythme, les rebondissements sont convenus et souvent prévisibles, et je pense, complètement desservis par une mise en scène poussive des moments critiques.
Le personnage central du livre est le commissaire Eric Vidal, membre émérite du 36 Quai des Orfèvres, et responsable d'une équipe avec qui, il maintient des relations amicales, sauf un certain Roland Picard. Vidal est sujet à des démons du passé : sa fille s'étant suicidée ce qui l'a précipité dans l'alcool. Le commissaire se raccroche à un objectif pour maintenir la tête hors de l'eau : la capture de Jason. Le personnage m'est apparu antipathique, agressif et ne maîtrisant pas son sujet.

Mais plus que le personnage principal, c'est le style de l'auteur auquel je n'ai pas accroché du tout. Il ne fait que survoler la psychologie de ses personnages, alors que l'utilisation de la troisième personne lui permettait beaucoup de liberté. Le manque d'humour dans les dialogues, et dans les personnages manque aussi cruellement et a pour effet de me rendre indifférent au sort des personnages. Et puis, l'auteur introduit à sa guise des personnages dans le récit, les présentant avec une biographie aussi brève qu'irritante, exemple au 2/3 du roman :
"Membre du groupe Delavigne, le capitaine Ortal Mutz était âgée de vingt-huit ans. Petite, finement musclée, elle se mouvait avec une grâce féline. Sa chevelure auburn, dont les boucles cascadaient sur ses épaules, encadrait un visage harmonieux dans lequel brasillaient des yeux tantôt bleu, tantôt verts. Promise à une brillante carrière, elle avait pratiqué la danse classique avec acharnement durant des années. Le jour de ses dix-huit ans, une radiographie avait réduit à néant ses chances de devenir étoile. Le diagnostic du médecin était sans appel : son ossature, usée par trop d'efforts, était comparable à celle d'une quinquagénaire; si elle reprenait l'entraînement, elle s'exposait à des fractures. Elle s'était engagée dans la police une semaine plus tard, sur un coup de tête. Elle n'avait pas eu à regretter cette décision. Vidal avait sympathisé avec elle dès son arrivée au 36, trois ans auparavant."
Voilà tout est dit, vous connaissez maintenant Ortal Mutz.

Par contre le roman est très bien documenté, les méthodes policières, ainsi que le langage ou argot policier, ont été étudié et retranscrit. Par moment, Laurent Scalèse nous fait visiter ce lieu mythique qu'est le 36, Quai des Orfèvres.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Dans le genre thriller français, n'hésitez pas : faites un tour chez Franck Thilliez.

Le début...

Les dix premières lignes...

Julia Hurbon colla son front trempé de sueur contre le hublot de l'Airbus A340.
L'angoisse noua sa gorge quand elle remarqua que les nuages exécutaient un ballet endiablé et que le ciel s'obscurcissait. Le commandant s'adressa aux passagers afin de leur signaler l'entrée de l'appareil dans une zone de turbulences, précisant que la dégradation des conditions atmosphériques avait été annoncée avant le décollage. Avec une pointe d'humour, il invita le personnel de bord à "raconter une histoire" aux plus anxieux (...).


La fin...

Quatrième de couverture...

Une enquête menée sur un rythme explosif dans les arcanes du 36, quai des Orfèvres. La "Grande Bleue", la plus ravageuse des drogues, vient de faire une nouvelle victime. Eric Vidal, commissaire aux Stups, sait que le crime est signé Jason, son pire ennemi. Ce trafiquant sans foi ni loi sévit dans les milieux branchés de la capitale et demeure insaisissable. Dès que Vidal tient une piste, Jason élimine systématiquement les témoins. Cette capacité à anticiper les actions de la police intrigue le commissaire autant qu'elle l'inquiète : le criminel aurait-il des accointances avec sa brigade ? Les informations confidentielles filtrent de manière incompréhensible, les meurtres se succèdent, et la réputation des Stups est menacée... Prêt pour un face-à-face mortel avec un véritable maître de l'illusion et du piège, Vidal ne réalise pas que ses équipiers et la femme qu'il aime sont en danger...


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Laurent Scalese










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