Double Détente

Ian Rankin

Editions du Masque - Janvier 2003 - Traduction (anglais) : Daniel Lemoine

Tags :  Criminel Grande-Bretagne Années 1990 Entre 250 et 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 31 janvier 2006

Publié pour la première fois en Angleterre en 1994 sous le pseudonyme de Jack Harvey, Double Détente se place un peu à part dans la production de Ian Rankin. Première singularité, et pas des moindres : l'absence de l'inspecteur Rebus, son personnage récurrent, mais aussi une ambiance beaucoup moins sombre qu'à l'accoutumée, comme si l'auteur avait voulu se ménager un embellie dans la description qu'il nous livre du ciel qui nous gouverne.
Pour autant, Double Détente n'est pas une histoire à l'eau de rose et Mike West est bel et bien un tueur professionnel qui laisse sur son passage ou rencontre dans sa quête quelques cadavres.

On suit donc l'épopée de ce tueur à gages qui, ayant rempli son contrat, se retourne vers son commanditaire anonyme qui l'a trahi en tentant de le faire prendre au moment de l'accomplissement de son forfait. Un histoire d'arroseur arrosé, quoi... Sauf qu'un détective, américain celui-là, est également sur les traces du tueur, payé par un richissime compatriote avide de venger la mort de sa fille victime d'une fatale erreur de trajectoire. Et puis il faudra compter également sur les mystérieux membres d'une secte new age aux financements douteux, secte sur laquelle enquêtait la journaliste cible du contrat.

Ian Rankin s'amuse. Écossais pur cru, il égratigne les anglais :

Leurs yeux restaient rivés sur le dallage perfide des trottoirs de Londres. Si on ne se faisait pas avoir par une dalle cassée, on se faisait avoir par une merde de chien. En outre, ils ne pouvaient pas regarder droit devant eux ; cela serait revenu à susciter le regard d'un inconnu, la rencontre indésirable de deux paires d'yeux.

Mais il se fait également un malin plaisir en créant le personnage du détective américain, Hoffer, caricature de ses compatriotes : obèse, cocaïnomane, vulgaire, hypocondriaque et... taillé à la serpe :

Le cricket, ce (sport) qui ressemble au baseball, en plus facile.
La serveuse revint.
- Cette section est non fumeur.
- Vous êtes un ange descendu tout droit du ciel, vous savez ? dit-il, écrasant sa cigarette sous sa chaussure.
Elle le dévisagea sans comprendre.
- Je suis sérieux, reprit-il, je croyais que des femmes comme vous, on n'en faisait plus. Vous êtes magnifique.
La serveuse n'avait apparemment jamais entendu de tels propos et son attitude s'adoucit un peu. L'esquisse tremblante d'un sourire se forma aux coins de ses lèvres.
- Alors, qu'est-ce que vous faites, ce soir ? poursuivit Hoffer, qui se leva. Enfin, à part effrayer les enfants ?

L'auteur joue constamment sur plusieurs tableaux, utilisant habilement une narration à deux voix, jouant sur la dichotomie, l'amour/haine des américains et des anglais :

En Amérique, un bar ressemblait à un bar, à un endroit où on allait pour boire. Il ne voyait pas à quoi servaient les chevaux en cuivre, les gravures encadrées représentant des clippers et les étagères chargées de livres. Oui, de livres, comme si les gens prenaient ces endroits pour des bibliothèques et décidaient de boire un verre, pendant qu'ils y étaient.

Mais Ian Rankin ne s'arrête pas là, tout est double dans ce roman, en équilibre instable : le tueur et son commanditaire, les flics et le détective privé, le méchant enquêteur et le gentil tueur, le malade imaginaire et l'hémophile en bonne santé, la vieille Europe et la nouvelle Amérique... Le blanc n'est pas très clair et le noir pas si sombre.

Une intrigue tentaculaire savamment construite, des personnages plus typés les uns que les autres qui évitent les clichés, s'approchant plutôt de la caricature à l'humour sous-jacent. Double Détente est à prendre comme une sorte d'exercice de style, ou plus précisément comme un exercice de polar, brillant et maîtrisé de bout en bout.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Ian Rankin a signé trois romans sous le pseudonyme de Jack Harvey (en fait le nom de jeune fille de sa femme), dont deux seulement ont été traduits en français, le présent Double Détente, et Nom de Code : Witch.

Le début...

Les dix premières lignes...

Elle n'avait plus que trois heures à vivre et, au bar de l'hôtel, je sirotais du jus de pamplemousse au tonic.
- Vous savez ce que c'est, aujourd'hui, dis-je, il n'y a que les durs qui s'en sortent. On ne peut plus se permettre de faire du sentiment.
Mon compagnon, lui aussi, était dans les affaires. Lui aussi avait survécu aux hauts et aux bas des années 80 et il hocha la tête aussi vigoureusement que le lui permettait le whisky qu'il avait ingurgité.
- La place aux sentiments, dit-il, est dans l'humanitaire, pas dans les affaires (...).


La fin...

Quatrième de couverture...

Reporter à la télévision, elle enquêtait sur une secte américaine, et la voilà abattue d'une balle en plein cour, à la sortie d'un hôtel londonien. Une fois de plus, Mike West a exécuté son contrat à la perfection. Mais comment se fait-il que la police soit arrivée si rapidement sur les lieux ? Une seule personne peut l'avoir trahi : son employeur, dont il ignore l'identité.
Abandonnant ses habitudes de loup solitaire, Mike va entraîner Bel, 20 ans, fille de son seul ami et par ailleurs fournisseur d'armes, sur la piste de son adversaire fantôme. Pas facile de mener une enquête, quand on a tous les flics du Royaume-Uni à ses trousses, plus un détective privé des plus tenaces, et bientôt, outre-Atlantique, des sbires à la solde du National Security Council...


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Ian Rankin










Edition(s)...

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Réédition Réédition poche

Du même auteur...

Bibliographie non exhaustive... Seuls sont indiqués ici les ouvrages chroniqués sur le site.

Causes Mortelles L'Ombre du Tueur Nom de Code : Witch Le Jardin des Pendus Du Fond des Ténèbres Piège Pour un Élu