Gallimard / Série Noire - Juin 2003 - Traduction (anglais) : Luc Baranger
Tags : Polar social Comédie Discrimination Quidam Amérique profonde Années 2000 Humoristique Plus de 400 pages
Publié le : 1er mars 2006
Samuel Hunter est agent d'assurance à Santa Barbara, excellent vendeur,
excellent menteur, qui joue facilement et sans aucun scrupule sur les
peurs des gens pour les embobiner et leur fourguer ses polices en tous
genres. Sam est à l'aise avec tout le monde, par choix, pour éviter les
ennuis. Sauf que ce jour-là, en sortant de son bureau, il perd son
aisance naturelle, son assurance, subjugué par la beauté d'une fille
qui lui tombe sous le nez et qu'un indien mystérieux jette dans ses
bras. Un vrai choc, une révélation !
Lorsqu'un peu plus tard, ce même indien réapparaît insidieusement pour l'aider dans son métier, Sam est pris d'un furieux doute et commence à sonder
sa mémoire.
Lui, cet espèce de golden boy bien intégré, ce modèle de réussite professionnelle à l'américaine, aussi
lisse qu'une vieille carpette usée, est aussi un indien. Il se souvient
de la réserve Crow, du temps où il s'appelait Samson Chasseur Solitaire
et où son oncle Pokey, entre deux bitures, faisait son éducation
spirituelle, sa première chasse, son premier jeûne, et la première fois
qu'il a entendu parler de Vieux Bonhomme Coyote...
Dire de Christopher Moore qu'il est un auteur fantasque tiendrait du
pléonasme ; il suffit d'un seul de ses chapitres pour en prendre
conscience. Mais comme tout ceux qui manient l'humour, c'est aussi
grâce à la pertinence de son analyse, à sa profondeur, qu'il réussit à
nous faire rire vraiment. Car c'est bien le propre de ce premier roman
(en France) : on y rit beaucoup, énormément même, au sens propre comme
au figuré.
On assiste à l'épopée loufoque de Samuel Hunter qui va voir sa vie de yuppie bouleversée par la
résurgence du passé et l'apparition d'un personnage légendaire de la
culture Crow, Vieux Bonhomme Coyote.
Une lecture au premier degré est déjà un enchantement, un dépaysement, par
son côté déjanté, loufoque, ubuesque. On a là une galerie de
personnages édifiante prise dans un tourbillon infernal de situations
des plus délirantes - à ce titre, la virée à Las Vegas est un véritable
morceau d'anthologie.
Lorsqu'on s'attarde sur le fond du récit, on se retrouve avec de nombreuses réflexions et une cohérence d'ensemble évidente. On approche la culture amérindienne, notamment celle des Crows, leur philosophie, leurs croyances, mais
aussi le traitement réservé par la bonne société américaine à ces
minorités. On suit aussi la démarche d'un homme qui, ayant renié ses
origines pour mieux se couler dans le moule du système finit,
aiguillonné par sa conscience, par retrouver les valeurs qui sont les
siennes.
Un Blues de Coyote est un conte moderne, une légende revisitée, et comme tel, est aussi empli de poésie, de magie, d'amour. Il est en plus, grâce à la verve et l'imagination débridée de son auteur, plein de vie. Un vrai bonheur ! D'ailleurs, tout est dit, ou presque, dans la dernière phrase :
La magie de Coyote, aux Blancs, ça peut pas leur faire de mal.
Quelques pistes à explorer, ou pas...
Christopher Moore a pour l'instant vu quatre de ses romans traduits en français et tous parus dans la Série Noire. Sans l'avoir encore lu, je vous recommande pourtant un détour du côté de L'Agneau (sous-titré, L'Évangile selon Biff, tout un programme...).
Laissez-vous tenter également par l'humour, moins déjanté, mais tout aussi fin et mordant, de William Lashner avec, par exemple, Les Prévaricateurs.
Les dix premières lignes...
Samuel Hunter s'affairait comme un beau diable dans son bureau, expédiait les
appels téléphoniques, vérifiait les documents que vomissaient les
imprimantes, tout en vociférant des instructions à sa secrétaire.
Pendant ce temps, dehors, de la poudre magique farinait le trottoir.
Sam débutait chaque jour par une sarabande survoltée : il fonctionnait
telle une machine, jusqu'à ce qu'il parte à son premier rendez-vous ou
lance le démarcheur approprié sur telle ou telle affaire.
Les gens qui connaissaient Sam le jugeaient travailleur, intelligent, et
même sympathique ; soit exactement l'image qu'il souhaitait offrir de
lui-même (...).
Quatrième de couverture...
Que sommes-nous de plus pour les dieux que des mouches importunes et
lubriques qu'ils écrasent pour le plaisir ? Vaste question... que Sam
Hunter, trente-cinq ans, parfait golden boy, n'avait pas eu à se poser
avant que le Coyote ne débarque dans sa vie pour y semer la pagaille.
Car l'animal en question n'est pas celui de Tex Avery (quoique) mais
l'incarnation d'une divinité crow bien décidée à rendre infernal le
quotidien de Sam. Pourquoi lui ? Dans quels buts ?.. L'occasion,
entre légendes indiennes et réalités yankees, d'une balade ravageuse à
mourir de rire, et de peur parfois, au pays des mythes anciens et des
machines à sous...
Sa trombine... et sa bio en lien...
Informations au survol de l'image...