Omnivore

Un avis personnel...

Publié le : 23 octobre 2025

Rita Chandler a bien rêvé de devenir une grande journaliste d’investigation, mais après quelques années dans le métier il lui a bien fallu déchanter et trouver de quoi payer son loyer. Aussi s’est-elle rabattue sur l’alimentaire — dure réalité oblige — et présente désormais une émission culinaire à une heure de grande écoute, dans laquelle elle investit par surprise et en direct les cuisines d’un restaurant. C’est plus efficace pour faire bouillir la marmite.
Ce soir, c’est quasiment le cinquantième épisode qui va démarrer. Rita est à Fontainebleau, elle s’apprête à rejoindre Karl Angus, le jeune chef du restaurant l’Abeille dorée, mais c’est un tout autre spectacle qu’une brigade au travail qu’elle met en lumière derrière sa caméra. Ici, on cuisine de la chair humaine… Et en direct à la télé, ça la fout mal.
Le chef est bien vite arrêté, par sa voisine et son collègue, un duo de flics dépareillés : Rachel Kuklinski, enceinte jusqu’aux yeux et sujette aux crises de panique, et William Toulouze, un grand échalas plus cérébral que sportif. Mais Karl Angus finit bel et bien sous les verrous.

En matière de comédie, et pas seulement policière, le duo est une recette qui fonctionne d’autant mieux si les protagonistes sont aussi dissemblables que possible. C’est le choix d’Olivier Bocquet qui met en scène une équipe de choc assez hétéroclite qui fait sourire à chaque apparition. L’entame du roman est plutôt enlevée, l’humour caustique et le ton général visent à la légèreté. Mais il va falloir tenir sur la durée.
Car bien vite, au fur et à mesure que l’intrigue se noue, on se rend compte que ce duo d’enquêteurs ne fait pas vraiment figure de personnage principal du roman. L’affaire ne tourne pas seulement autour d’eux, et s’ils ne sont pas non plus secondaires, ils n’apparaissent que comme rouage de l’ensemble au côté du chef cuisinier Karl Angus, de la journaliste Rita Chandler, et de quelques figures policières.
De même, si le récit s’engage comme une pure comédie, l’ambiance se fait petit à petit de plus en plus sérieuse et l’humour a tendance à se tarir. Fatalement, en tant que lecteur, on ne sait plus très bien sur quel pied danser.

Olivier Bocquet tente bien d’ajouter un peu de fond à son aventure cannibale, mais sans jamais vraiment approfondir son sujet, oubliant de refermer certaines portes qu’il a ouvertes, et préférant, semble-t-il, tenter de conserver une forme de légèreté qu’il a pourtant fini par perdre en cours de route.
Pour autant, les éléments de son intrigue tiennent la route, même si sa résolution apparaît quelque peu bâclée. On peut d’ailleurs s’interroger sur la pertinence de ces longues revues de presse redondantes alors qu’on aurait apprécié un final un peu plus travaillé qui ne soit pas réduit à une dizaine de pages expédiées à la va-vite.

Un résultat globalement plus brouillon qu’efficace. Olivier Bocquet ne parvenant pas à convaincre en tergiversant sur le choix de la corde de son arc qu'il va faire vibrer.

Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Si l’anthropophagie n’est pas pour vous un sujet rebutant, je ne peux que vous conseiller le roman d’Olivier Bordaçarre, La Disparition d’Hervé Snout (2024), autrement plus abouti.