Franck Membribe

Un avis personnel...

Publié le : 28 mars 2024

Erkan, connu sous le surnom de Protoman, et son pote Kevin sont sur la route de crêtes, entre Cassis et Marseille. Ils ont piqué une bagnole et se défoncent gentiment au protoxyde d'azote, la dope qui fait rire, avant de filer se ressourcer de junk food au MacDo du coin, puis de terminer la soirée par l'incendie de la 308, comme d'hab'. À demain Kevin, pour une nouvelle journée entre petit deal et grosse glandouille.

Au Texas, Richard Wyatt Jr, magnat du gaz de schiste, se fait dessouder par une faction qui signe ses crimes de la lettre « I », pour « injection ». Pentobarbital pour l'occasion.
Laurent Rebsamen, quant à lui, est un spécialiste, expert de l'énergie, qui a découvert sur le tard les méfaits du gaz naturel sur le climat. Pour l'heure, il suit de loin les agissements de la faction I qui vient de frapper à nouveau – un responsable du gaz algérien cette fois – avec un sentiment mitigé : il comprend leurs motivations sans toutefois adhérer à leurs méthodes.

Hayette travaille dans un EHPAD à Marseille. Proche des résidents, elle y subit les brimades de ses collègues, tout comme elle subissait la peur dans la cité qu'elle vient de quitter. Mais Hayette garde espoir, elle vient de décrocher son diplôme d'infirmière, de trouver un nouveau logement, un nouveau boulot. La roue tourne...

Des situations, des personnages sans rapport entre eux, mais les liens se tissent petit à petit : on retrouve Erkan à l'hôpital, atteint d'une pathologie étrange liée à son excès de dopes en tout genre que les médecins ont du mal à cerner. Dans le couloir, Hayette est prête à prendre soin de lui, mais la rencontre prend une tournure inattendue lorsqu'elle reconnaît Protoman dans son patient, un de ceux qui l'ont violée...

Laurent Rebsamen arrive en Russie, toujours autour du gaz. Il assiste à une tentative ratée d'assassinat de la faction sur un des oligarques qu'il doit rencontrer. Les circonstances font qu'il se retrouve derrière les barreaux pour avoir cherché à dissimuler un indice important : une grosse seringue.

Franck Membribe a pris le parti d'une narration éclatée pour son roman. On se retrouve donc avec deux, voire trois intrigues parallèles sans lien entre elles, si ce n'est, peut-être, l'utilisation de ce poison à usage vétérinaire. Le procédé n'est pas sans risques et le dosage se doit d'être subtil pour ne pas perdre l'intérêt du lecteur dans un éparpillement.
D'autant que si l'on suit en détails les parcours des différents personnages – il en apparaît régulièrement de nouveaux au cours du récit, qui viennent tisser de nouveaux fils – la fameuse faction I reste dans un brouillard diffus. A peine quelques esquisses, seulement à mi-parcours, pour évoquer cette forme de radicalisation écologiste, lui trouver des parallèles avec certains extrémismes plus religieux.

Si de nombreuses pistes sont ouvertes, elles tardent à être empruntées, voire explorées, le roman s'attachant plus à ses personnages – les féminins étant sans doute les plus réussis – qu'aux motivations écologiques de ces djihadistes du dérèglement climatique.
Franck Membribe ayant pratiqué en son temps la littérature jeunesse, je me suis demandé parfois si le ton pratiqué ici, les « raccourcis » qu'il impose, n'étaient pas plutôt destiné à un public plus jeune.

Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

La fibre écologie est parfois présente dans le polar. Elle a fait l’objet récemment d’une dystopie effrayante signée Thomas Bronnec : Collapsus.

Le début...

Les dix premières lignes...

Protoman pose pour la postérité. En arrière-plan, le profil tranchant de l’île aux rats domine l’archipel de Riou. Les rafales font cliqueter les cartouchières croisées sur son torse. Ils ont fermé la route des Crêtes par arrêté préfectoral à cause des risques d’incendie. Interdit ? Pour les cafards peut-être. Les cheveux dans le vent, de son vrai nom Erkan Taioglou, Protoman aime la défonce, en petit guérillero de la dope bon marché. Juché sur la falaise de Cassis vidée de ses touristes, il jubile sans raison particulière. Ou plutôt si, il est content de lui. Les cafards sont au boulot et lui, il glande. Et puis ils ont piqué une bagnole aujourd’hui. C’est la fête ! Les scooters, c’est trop nase à la fin. Une 308 rouge. La grosse kiffe. Ça crame super bien les 308, il a remarqué. Mais son acolyte en a marre de la séance photos.
— T’as qu’à faire des selfies, gros !
— Fais voir la tête que j’ai.
Kevin lui tend son smartphone à regret. Protoman sourit de toute sa dentition anarchique en faisant défiler les clichés. Il aime…

La fin...

Quatrième de couverture...

Des militants écologistes radicaux de la faction « I » sèment la terreur. Leur mode opératoire : élimination physique des principaux responsables du saccage planétaire qui menace la survie de l’humanité par injection létale de Pentobarbital, produit vétérinaire utilisé pour euthanasier les animaux. Laurent, géo-économiste de l’énergie, est témoin de leurs agissements au cours d’une mission. En cherchant à entrer en contact avec eux, sa vie bascule.
De Marseille à la Russie, de la Palestine à l’Irlande, un roman picaresque où « l’écologie punitive » à la papa est déclassée au profit de l’éradication active des pollueurs.