Panorama

Lilia Hassaine

Gallimard - Août 2023

Tags :  Roman d'enquête Polar social Psychologie Flic France Futuriste Moins de 250 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 15 décembre 2023

En 2029, un évènement va précipiter la profonde transformation de la société française : Julian Gomes, un influenceur au million d’abonnés, se fait justice lui-même — répondant ainsi à l’avis majoritaire de ses followers — en abattant son oncle, coupable d’abus sexuel à son encontre, mais rendu intouchable par la prescription des faits. Bientôt, la « revenge week » est lancée, c’est l’embrasement, le pouvoir vacille. L’avocate de Gomes, Gabrielle Boca, lance le mouvement « Transparence citoyenne » et appelle à la clémence pour les « victimes-coupables ». Devant le succès, elle organise en ligne des états généraux qui aboutissent au démantèlement des institutions et à l’établissement d’une démocratie participative. Viktor Jouanet, un architecte, s’empare du sujet et propose d’instaurer la transparence de l’habitat.

Nos villes, qui furent des jungles, sont devenues des zoos.

Vingt ans plus tard, la « transparence » du nouvel urbanisme est une réalité acceptée par la plupart. La délinquance n’est plus qu’un souvenir, les gens se sont rapprochés, et les récalcitrants, les chantres de l’intimité, peuvent toujours s’installer à l’écart des métropoles dans des zones de non-droit.
Hélène Dubern est flic, mariée à David, et dans cette société où tout se sait, tout se voit, elle enquête, en compagnie de son collègue Nico, sur la disparition de la famille Royer-Dumas. Une incongruité dans un quartier où « tout n’est que luxe, calme et sécurité ».

Lilia Hassaine, en poussant le curseur, nous propose l’évolution d’un monde où, après que quiconque se soit montré à tous à travers les réseaux sociaux, c’est désormais la multitude qui dispose de la vue sur chacun des membres qui la compose ; une sorte d’open space à l’échelle d’une nation, avec, à l’écart, quelques exceptions.

Il serait indécent de narguer ceux qui n’ont pas le même niveau de vie.

Dans cette cité du renouveau, les gens se regroupent par affinités et font d’eux-mêmes le boulot des algorithmes.
Le travail d’imagination se fait sur le fil. On sent que l’auteure a pris un malin plaisir à explorer les possibilités de son concept de société dans les moindres détails et ça donne quelques trouvailles, comme ce lit sarcophage qui préserve à la fois l’intimité et la notion de consentement des couples en mal d’aventure sexuelle, ou ces prisons équipées de cellules aux parois constituées de miroir sans tain.
Des prisons ? Dans ce monde parfait ? Oui, car en dehors des zones de transparence existent encore des quartiers de béton où s’entassent les plus démunis ou ceux qui ont fait le choix de ne pas se dévoiler au regard des autres. Le quartier des Grillons fait partie de cette aire de non-droit où les citoyens de seconde zone signent une décharge qui les dépossède de la protection de l’État. Cachez cette misère qu’on ne saurait voir…
Miguel, le père de famille disparu, est originaire de ce quartier.

Lilia Hassaine n’est pas tout à fait à l’aise avec les codes du polar. Passé une mise en place prometteuse, le récit commence à patiner un peu et la liste des dérives potentielles liées à la « Transparence » se fait répétitive, voire redondante. Il manque d’un soupçon de tension dans l’intrigue, ou l’enquête. On ne sent pas la narratrice, Hélène, très investie, même si elle fait de son mieux pour comprendre ce qu’il s’est passé. Elle agit plutôt comme une observatrice, agissant à distance, empêtrée dans ses problèmes de couple.
Certains m’objecteront qu’il ne s’agit pas là d’un roman policier et prendront pour preuve sa publication dans la « blanche » de Gallimard. Mais lorsqu’on met en scène une disparition et une policière qui enquête, pour ma part, je vois « polar », et c’est ce qui m’a tenté. Et puis les étiquettes, après tout…
Reste qu’au final, je suis resté sur ma faim. Si Lilia Hassaine réussit brillamment son pari sur l’établissement de la « transparence » et offre une vision alarmante de l’évolution possible de notre société dans une dystopie plutôt alléchante — à l’inverse de ce qu’elle imagine — force est de constater que la partie « enquête » de son récit n’est pas du même niveau. Jusqu’à un final à la fois tiré par les cheveux et pourtant prévisible.
Peut-être qu’au fond ça n’est pas vraiment un polar… Dommage.

Le like est l’équivalent numérique de la croquette pour chiens.

Panorama a été couronné du prix Renaudot des lycéens en novembre 2023.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

En matière de dystopie angoissante (pour la partie, selon moi, réussie du roman) on peut se rapprocher du récent Collapsus de Thomas Bronnec.

Le début...

Les dix premières lignes...

Derrière la baie vitrée, une femme est assoupie. Sa poitrine se gonfle et s’affaisse comme la houle matinale. Nico se colle contre son dos et embrasse ses cheveux défaits. Je n’avais encore jamais vu de blonde dans son lit.
Nico a décidé d’oublier et de vivre. Moi je n’y arrive pas, et je me demande encore comment les choses ont pu déraper à ce point.
C’était il y a tout juste un an.
Une famille a disparu, là où personne ne disparaissait jamais.
On m’a chargée de l’enquête, et ce que j’ai découvert au fil des semaines a ébranlé toutes mes certitudes. Il ne s’agissait pas d’un simple fait-divers mais d’un drame attendu, d’un mal qui irradiait tout un quartier, toute une ville, tout un pays, l’expression soudaine d’une violence qu’on croyait endormie.
Mais avant de vous raconter cette histoire, il me faut remonter le temps. Car aucun des évènements du 17 novembre 2049 ne peut être compris si l’on ignore ce qui s’est produit ici vingt ans auparavant, quand nos villes, qui furent des jungles, sont devenues des zoos (…)


La fin...

Quatrième de couverture...

C’était il y a tout juste un an. Une famille a disparu, là où personne ne disparaissait jamais. On m’a chargée de l’enquête, et ce que j’ai découvert au fil des semaines a ébranlé toutes mes certitudes. Il ne s’agissait pas d’un simple fait-divers, mais d’un drame attendu, d’un mal qui irradiait tout un quartier, toute une ville, tout un pays, l’expression soudaine d’une violence qu’on croyait endormie.
Hélène, ex-commissaire de police, reprend du service pour retrouver un couple et leur petit garçon, Milo. Elle rencontre les dernières personnes à avoir été en contact avec eux. Depuis que la France a basculé dans l’ère de la Transparence, ces hommes et ces femmes vivent dans un monde harmonieux, libéré du mal, où chacun évolue sous le regard protecteur de ses voisins. Mais au cours de son enquête, Hélène va dévoiler une vérité aussi surprenante que terrifiante.
À travers cette contre-utopie, c’est le monde d’aujourd’hui que l’auteur interroge. Ce roman haletant montre des êtres en proie à leurs pulsions et à leurs fêlures derrière leur apparente perfection.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

Lilia Hassaine










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