Cartel 1011 : Les Bâtisseurs

Mattias Köping

Flammarion - Octobre 2024

Tags :  Road Polar Crime organisé Trafic Quidam Années 2010 Plus de 400 pages

Edition originale

Un avis personnel...

Publié le : 13 février 2025

Comme beaucoup, je m’intéresse à l’actualité du polar sous toutes ses formes et je traîne mes guêtres à droite à gauche en quête de la perle rare que j’aurais loupée. Pour les avoir croisées plusieurs fois au cours de ces pérégrinations, certaines couvertures et recensions reviennent parfois me titiller le cervelet, jusqu’au jour où je me laisse tenter, histoire de me faire ma propre opinion. Ce fut le cas avec Cartel 1011.

Au Mexique, au détour des années 70, la station balnéaire en vogue s’appelle Acapulco, la perle du Pacifique, mais c’est à l’est du pays que de gros investisseurs — Fernando Hernandez et ses frères — vont s’installer, face à la mer des Caraïbes et à Cuba, dans une ville créée de toute pièce : Cancún.

Personne n’y croit, à ce projet, et pourtant… Cet endroit est un paradis. De ce paradis, nous allons faire un tas de merde. Et de ce tas de merde, nous allons tirer des montagnes d’or.

Cinquante ans plus tard, en Colombie, Jorge est un broker, un courtier, au service d’un nouveau gang mexicain, le 1011. Sa mission du jour est de se rapprocher du chef des Isulas, (Manuel Alvaro Guzman) des anciens FARC sécessionnistes qui organisent le trafic de cocaïne dans le nord du pays et plutôt à destination de l’Europe et de l’Australie, histoire de ne pas concurrencer les Mexicains sur le marché américain, de toute façon bien moins rentable.
Sous couvert de la menace voilée de s’adresser ailleurs, Jorge propose une sorte d’association forcée qui n’est pas du goût de Guzman. Piqué au vif, la réaction de ce dernier et la fin de non-recevoir qu’il propose seront sanglantes et mortelles pour l’intermédiaire.

À Cancún, Sottos Torres, le chef de la police, tout autant corrompu que ses ouailles, a lui aussi entendu parler de ce nouveau cartel 1011 qui grappille du territoire. Violent, expéditif, organisé, il reste cependant un mystère pour les autorités.

Avec une écriture simple et musclée qui embarque le lecteur. Mattias Köping ne fait ni dans la dentelle ni dans la périphrase. Le style est plutôt brutal, mais néanmoins efficace.
Les cartels sont une mafia, une pieuvre. Mattias Köping en explore les tentacules qui s’étendent à travers le monde. Il multiplie les points de vue, laissant entrevoir les conséquences des trafics nombreux et variés qui leur sont associés : les ravages de la meth en Europe pour l’illégal 1011, mais il s’attache aussi aux désastres écologiques liés à l’exploitation effrénée du sable en Inde par le consortium officiel des Hernandez, la COMEX (bâtiment, pétrole, chimie…). Les cartels, peu importe leurs formes, sont partout.

Ne cherchez pas une intrigue linéaire dans la première partie du roman. Mattias Köping fait le choix d’une narration éclatée, chaque chapitre se déroulant aux quatre coins du monde avec des narrateurs, des personnages, qui n’ont longtemps aucun rapport entre eux, si ce n’est la présence sous-jacente et alternée du cartel 1011 et du consortium de la famille Hernandez, présentés comme les deux faces d’un même virus mortifère.
S’ils n’utilisent pas les mêmes armes, leur but ultime est identique : pouvoir et enrichissement.

Pour tout dire, les fils tendus dans toutes les directions, c’est bien, mais à la longue ça lasse si ne dessine pas une forme de cohérence. Heureusement, les nœuds commencent à apparaître au quart du roman (il faut être un peu patient), puis dans la seconde partie les grains de sable qui vont tenter d’enrayer ces deux machines infernales que sont le cartel 1011 et la multinationale Hernandez. Pour l’un ce sera un prêtre mexicain, pour l’autre quelques journalistes téméraires regroupés en ONG.
Heureusement, car il était temps…

Mais de fait, même si la focale se fait de plus en plus précise et que l’auteur revient sur les différents personnages croisés au fil des pages, le procédé ne change pas foncièrement, et au bout des quasi sept cents pages de ce pavé, on n’aura guère avancé. Le message est clair : les méchants sont vraiment méchants et ils sont partout, mais en dehors de cette assertion fondamentale, pas grand-chose à se mettre sous la dent qu’on ait déjà vu/lu ailleurs et ce malgré un évident travail de documentation. Et ce ne sont pas les (trop) nombreuses scènes de tortures plus ou moins gores qui arrangeront les choses. Pour tout dire, dès la seconde, une version suggérée aurait amplement suffi à donner la perspective.

Pas très subtil et un peu simpliste, n’hésitant pas sur les clichés et proposant une vision très manichéenne, Cartel 1011 : Les Bâtisseurs est un premier volet qui prend un temps infini pour asséner des vérités connues de tous et laisse le lecteur en suspens, dans le vide, au terme d’une interminable ballade morbide. Perso, j’en resterai là et ne m’infligerai pas les prochains tomes. N’est pas Don Winslow qui veut.

Bobby avait encore dix jours à passer au Mexique, et il comptait bien en profiter à mort. La première passe aurait lieu dans sa chambre, vers dix-sept heures : une adolescente vénézuélienne, toute fraîche, lui avait-on promis. La môme avait rêvé de voir les États-Unis, le pays de l’Oncle Sam, de la liberté et de tous les possibles. À la place, elle verrait des couilles, mais, attention, des couilles américaines. D’une certaine façon, elle approcherait de son rêve.


Vous avez aimé...

Quelques pistes à explorer, ou pas...

Mattias Köping a sans doute une grande ambition pour sa trilogie consacrée au Cartel 1011, mais si vous recherchez un peu plus de subtilité sur le sujet, la référence en la matière est signée par Don Winslow avec La Griffe du Chien (2015), Cartel (2016), et enfin La Frontière (2019).

Le début...

Les dix premières lignes...

Au début, il n’y avait rien.
Cancún, ce nom d’origine maya l’indiquait assez, n’était qu’un nid ou un trou de serpents. S’ils avaient deviné combien ce toponyme s’avérerait funeste, les Mayas auraient-ils baptisé ainsi ce jardin d’Éden ? Le mépris qu’ils y mirent se retourna contre cette beauté sidérante.
Dans les années 1960, le futur emplacement de la célébrissime station balnéaire se réduisait à un port de pêcheurs, flanqué d’une base militaire lilliputienne. Puerto Juárez, situé en face de l’Isla Mujeres, comptait tout juste cent vingt âmes et quelques bateaux.
Puis ils vinrent, les conquérants. Ceux-là, ce n’étaient pas des soudards débarquant de caravelles, équipés d’arquebuses, de mousquets et de rapières, les moustaches fièrement relevées, virgules de prestance dans leurs gueules d’assassins. Ils ne ployaient ni sous le morion ni sous la cuirasse. C’était bien pire : ils portaient cravate, chemise et attaché-case.


La fin...

Quatrième de couverture...

La péninsule du Yucatán, entre le golfe du Mexique et la mer des Caraïbes. Des sites d’une beauté renversante mais qui, depuis des siècles, se résignent à la violence. Le Yucatán est le fief du clan Hernandez, arrivé avec les premiers conquistadors et qui compte sur le pharaonique projet du Train Maya pour resserrer encore l’emprise qu’exerce son conglomérat, la toute-puissante Comex. C’est là aussi, entre Cancún et Tulum, qu’émerge un nouveau cartel, le 1011, capable du pire pour asseoir son hégémonie sur les trafics internationaux. Comme celui des capitaines d’industrie, l’appétit des criminels est sans limite. Tout s’achète et tout se vend : drogues, armes, matières premières, animaux, territoires, corps, âmes. Rares sont les téméraires qui osent leur résister. En Europe aussi, les victimes s’accumulent. Les forces de police sont sur les dents, confrontées à une sauvagerie inédite. Car nul ne bâtit de nouvel empire sans anéantir les précédents.
Premier volet d’une partie d’échecs dévastatrice qui débute au Mexique pour se déployer dans le monde entier, Cartel 1011 : Les Bâtisseurs confirme le talent hors normes de Mattias Köping, devenu en deux livres cultes, Les Démoniaques et Le Manufacturier, une figure reconnue du roman noir français.


L'auteur(e)...

Sa trombine... et sa bio en lien...

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